Sidor som bilder
PDF
ePub

Enfin, je lui fais remarquer qu'on ne rend pas à son gré maximes ou minimes tous les intervalles de la gamme, la chose étant trop difficile, comme il le sentira bien, s'il l'essaie un moment. Je lui dis qu'on peut faire la septième, la quarte et la tierce diminuées, et je l'y exerce; mais qu'on ne peut pas faire telles la quinte, ni la sixte ni l'octave. Quant aux intervalles augmentés qu'on peut ou ne peut pas faire, ils sont les complémens de ceux-là.

Je lui explique ensuité aisément ce que c'est que deux modes relatifs, majeur et mineur, en prenant pour modèle le majeur d'ut avec le mineur de la qui sont dans cette hypothèse, et lui faisant voir que si la propriété d'ut se porte à un autre son de la gamme, la propriété de la suit la première à une tierce mineure d'intervalle par-dessous; que, par exemple, le mode majeur de sol a pour relatif le mineur de mi; ainsi de tous les autres dont je lui mets le tableau sous les yeux, et que l'exercice lui grave suffisamment en mémoire.

Il me demande alors si le mode mineur est annoncé à la clef par des dièses ou des bémols, comme l'est le mode majeur. Je lui fais voir qu'il serait inutile de l'annoncer de cette manière, à cause des variétés fréquentes auxquelles

il est sujet dans son second tétracorde. Le mode mineur de la, par exemple, ne peut pas se désigner à la clef par le fad et le sold, parce que, quoique ces deux dièses s'y rencontrent, néanmoins ils n'y sont pas permanens. On se contente donc de ne rien mettre à la clef; mais cette désignation étant faite la même pour le mode majeur d'ut, elle laisse dans le doute sur le mode de la pièce écrite, et l'on est obligé de lire du moins une couple de mesures pour deviner la pensée de l'auteur. Neanmoins, ceci n'est pas un inconvénient pour mon élève, et il a bientôt vu si l'ut, par exemple, qu'il supposait tonique en mode majeur, n'est pas plutôt une médiante en mode mineur. De là, se rappelant ce qui a été dit de la génération des tons, il conclut généralement que l'armure de la clef par dièses ou par bémols annonce toujours dans l'usage l'une ou l'autre de ces deux choses, soit la tonique d'un mode majeur, soit la médiante d'un mode mineur; et que c'est à la lecture à déterminer laquelle de ces deux choses a lieu (1).

(1) Quelques auteurs, attachant peut-être trop d'importance à cette légère incertitude, ont proposé de la mais par des manières détournées : l'un voulant

lever,

J'ai dit dans l'usage, car, dans le fait, l'armure de nos clefs n'annonce point le mode mineur,

qu'on écrive devant la clef la note sensible; l'autre, que ce soit la médiante ou la tonique, ce qui revient parfaitement au même. Cependant la chose est inutile à ceux qui ne savent pas lire, et elle l'est encore à ceux qui savent. D'ailleurs, pourquoi feindre de dévoiler une énigme par une énigme ? n'est-il pas plus simple d'en dire le mot, si l'on veut parler pour être entendu? Qu'on mette donc à la clef ce mot, majeur, ou celui-ci, mineur, si l'on tient à faire connaître le mode aux yeux un instant avant que la voix n'en décide. Il est même étonnant que cette dernière indication, franche et précise, soit exclue de la tête d'une pièce de musique, tandis qu'elle est admise, comme on sait, dans le courant de la modulation. De là cet embarras de règles qu'on donne aux élèves pour déterminer le mode, dont l'une est de regarder les accords d'harmonie (quand il en est capable), mais dont la plus pauvre et la moins sûre est de regarder la dernière note de la pièce. Il est clair que ces règles ne sont que pour les yeux, qu'elles ne vont pas à l'esprit, et qu'elles sont dédaignées de ceux qui savent lire; mais leur existence prouve l'insuf fisance des méthodes pour accoutumer l'oreille à la distinction des tons et des modes; et qu'on croit y suppléer en accoutumant les yeux à la distinction des purs signes qui représentent ces idées. C'est comme si l'on faisait lire à un enfant des mots d'une langue étrangère, pour la seule fin de les lui entendre articuler.

[ocr errors]

elle n'annonce rigoureusement que le mode majeur. Ainsi, quand on dit qu'un bémol à la clef constitue le ton majeur de fa, ou le mineur de ré, on énonce une fausse idée, puisqu'on ferait entendre que ces deux modes contiennent le même système de sons, ce qui ne saurait être , y ayant l'ut dièse dans le second mode qui n'est pas dans le premier, et au contraire l'ut naturel dans le premier qui n'est pas dans le second. C'est pour préserver mon élève de cette incorrection du langage, que j'ai dû établir, avec plus de précision qu'on n'a coutume de le faire, la distinction des deux modes majeur et mineur : le mode mineur, lui ai-je dit, contient, à sa sensible près, les mêmes sons que le majeur relatif. D'où il suit qu'en bémolisant la sensible du mode mineur (comme en faisant du sol dièse un sol bécarre), on entre sur la dominante du mode majeur relatif; et aussi qu'en diésant la dominante du mode majeur, on entre sur la sensible du mineur relatif.

[ocr errors]

Je regarde donc comme de fausses notions qu'on donne aux élèves, de leur dire qu'on descend la gamme mineure avec d'autres sons qu'on ne la monte. C'est les jeter dans l'indécision sur la composition de cette gamme. La gamme majeure a bien, quand on veut, le même pri

vilége, et ce privilége-là n'est autre chose qu'une modulation, c'est-à-dire, un changement de ton ou de mode. Ainsi, en faisant remarqueraux élèves que le second tétracorde de la gamme mineure est sujet à de fréquentes variétés, on ne devrait pas se dispenser de leur dire que ces variétés diverses constituent autant de diverses modulations, et qu'il est absurde de les représenter comme appartenant toutes à la même gamme; ainsi de ces quatre variétés :

mi fa sol la,

mi fad sold la,

mi fad sol la,

mi fa sold la,

la première appartient incontestablement au mode majeur d'ut; la seconde, au mode majeur de la; la troisième, au mode majeur de sol (ou au mineur de mi); et la quatrième, seulement au mineur de la.

Ce qui engendre le mode mineur et le caractérise, ce n'est pas seulement l'altération de certains sons de la gamme naturelle, car cette altération peut n'amener qu'un changement de ton en conservant le mode le même, comme il arrive, par exemple, si l'on dièse le fa ou si l'on bémolise le si, etc.; mais c'est l'insertion

« FöregåendeFortsätt »