Sidor som bilder
PDF
ePub

tervalles) qu'on n'a cru leur en apprendre, et il peut être curieux d'en remarquer la cause. D'abord, l'ut a été pour eux le grand terme de comparaison de tous les sons de la gamme : sans doute parce qu'il est celui sur lequel la mémoire se fixe le mieux, que son impression est si profonde qu'elle se conserve même au milieu du chant, et qu'il est le dernier son qu'on oublie quand on est près de s'égarer. Or, ils n'ont pu apprendre les rapports de divers sons à l'ut sans y trouver implicitement les rapports de ces sons entr'eux; tout comme, dirai-je aux géomètres, quand on sait les rapports que deux quantités ont à une troisième, on sait le rapport qu'elles ont entr'elles. Que, par exemple, les deux intervalles ré ut et sol ut soient connus de l'élève, et qu'il les chante dans cet ordre ut ré—sol ut, il exprimera sans y penser le rapport de quarte ré sol dans le passage du premier intervalle au second; et ce même rapport lui reviendra ensuite par mille autres chemins, parce qu'à mesure qu'il avance, il prend pour nouveaux termes de comparaison d'autres sons sur lesquels il s'est affermi. Le sol, par exemple, est un point considérable de la gamme, et le premier après l'ut qu'il aura remarqué; il s'en servira donc de la même manière.

Nous pouvons maintenant conduire la baguette dans le tétracorde aigu sol la si ut, ainsi que dans le quintacorde grave sol fa mi ré ut, c'est-à-dire, qu'on peut lui faire parcourir tout ce champ:

UT ré mi fa SOL la si UT ré mi fa SOL la si UT.

Bien entendu que comme les voix des élèves n'ont deux octaves d'étendue, ils ne pourpas ront faire d'exercice à l'aigu qu'en quittant le ton par lequel ils en pouvaient faire au grave, et réciproquement. Il suffit que la baguette embrasse comme les voix une dixième ou onzième d'intervalle; et quand celles-ci n'embrasseraient qu'une octave, l'élève n'apprendrait pas moins à donner aux deux limites de la sienne la propriété de tonique, ou celle de dominante, ou toute autre.

A proportion que ses idées s'étendent, l'élève cherche à faire des combinaisons neuves des rapports qu'il connaît. Il faut seconder son désir, et lui apprendre à faire d'abord des combinaisons régulières. On lui fera donc, par exemple, parcourir l'échelle en montant de tierce et descendant de seconde alternativement, et réciproquement; mais surtout on lui fera connaître les accords parfaits contenus

[ocr errors]
[ocr errors]

dans la gamme, savoir les trois accords majeurs fa la ut, ut mi sol, sol si ré; les trois accords mineurs ré fa la, la ut mi, mi sol si, ́et l'accord particulier si ré fa; sans lui dire toutefois ces mots de majeur et mineur, qu'il ne doit pas encore connaître : c'est assez qu'il chante ces accords en les distinguant par leur base, les nommant accord de fa, accord d'ut, etc. D'ailleurs, on les lui fera connaître tant dans

leur état direct que dans leur état renversé, qui vient de ce qu'on porte le son grave à l'aigu, ou l'aigu au grave. Mais c'est au maître à prendre ici des précautions en faisant succéder ces accords l'un à l'autre, car il pourrait les renverser et les accoupler de telle sorte que le chant en fût aussi difficile que s'il y entrait des dièses ou des bémols, parce qu'en effet ces dièses ou ces bémols seraient sous-entendus, tels que les demande le ton que chaque accord annonce. Le ton serait donc changé à l'insu de l'élève; et comme il n'est pas en sa puissance de se soustraire à l'impression du nouveau ton, et qu'il dépend du maître de la lui donner plus ou moins profonde, jusqu'à effacer même celle du ton primitif, il arriverait bientôt que l'élève sentirait avec étonnement que la propriété d'ut ne serait plus à sa place, et qu'elle aurait passé

sur un sol, sur un fa, ou quelqu'autre note. Il croirait alors se tromper en dénommant les sons, et de suite, pour se reprendre, il appellerait ut le son qui en aurait acquis la propriété. Cette erreur est si bien dans l'analogie de ses idées, que je serais très-fâché qu'il ne la fìt pas, et je le mettrai quelquefois dans le cas de la faire, exprès pour avoir occasion d'en faire avec lui la remarque, et pour le préparer aux conséquences que j'en veux tirer par la suite.

Chemin faisant, j'aurai arrêté son attention sur les barreaux de l'échelle ou lignes de la portée, pour lui en faire considérer le nombre et la distribution: je lui aurai fait voir que ce système de lignes se compose de cinq noires avec quatre blanches interposées, outre deux ou trois lignes noires surajoutées en dessus et en dessous. Je lui aurai fait mesurer de l'œil toutes sortes d'intervalles, lui faisant compter les barreaux qu'ils embrassent. Il aura vu les intervalles impairs, comme ceux de tierce, de quinte, de septième, occuper des barres de mêmes couleurs ; et les intervalles pairs, comme sont ceux de seconde, de quarte, de sixte, d'octave, aboutir à deux couleurs différentes. Il aura appris ce que c'est que les complémens et les redoublemens d'intervalles; il aura re

marqué que les uns et les autres occupent sur l'échelle des barreaux de même nom. Aussi dira-t-il, par exemple, que sol fa désigne une seconde ou une septième, que sol mi désigne une tierce ou une sixte, sol ré une quarte ou une quinte, selon la position respective des deux sons proposés. Il aura nommé et marqué sur la portée les trois progressions fondamentales de tierce, quinte et septième, semblables à celles de sixte, quarte et seconde, qui en sont les complémens. Il aura mesuré les grands intervalles par les petits, retenant bien, par exemple, qu'il y a dans une quinte deux tierces l'une sur l'autre ; qu'il y en a trois dans une septième ; qu'il y a deux secondes dans une tierce, trois dans une quarte; que l'octave peut se diviser en quarte et quinte, ou en tierce et sixte, etc., etc.

De plus, il aura appris les changemens de clefs dont il n'y a que deux pour lui, savoir: l'ut posé à ligne noire, et l'ut posé à ligne blanche. Voici de quelle manière : j'ai laissé quinze jours ou trois semaines la clef d'ut à une même position, soit, si l'on veut, à la première ligne noire. Il fallait donner à l'élève le temps de lier ensemble l'idée du son avec le nom qu'il porte. Il en est résulté d'abord qu'il a attribué

« FöregåendeFortsätt »