Sidor som bilder
PDF
ePub

cultés qui arrêtèrent leur législateur au début de sa carrière prophétique. Le ridicule ne fut pas la seule arme employée pour le combattre. L'unité religieuse était pour les tribus du désert l'annonce de l'unité politique, et chacune d'elles, dans son amour de l'indépendance, préférait le culte absurde de quelque divinité de son choix à la connaissance d'un seul Dieu révélé par un seul pontife (*). Dès lors les chefs

(*) « Sa tribu, dans les premiers temps, « ne s'éloigna pas de lui, et ne combattit pas sa doctrine jusqu'au moment où il jeta le blâme sur le culte qu'ils rendaient << aux idoles, et où il les accusa, eux et leurs

[ocr errors]
[ocr errors][merged small]

ancètres, d'impiété et d'erreur; dès lors ils se réunirent pour le persécuter, à l'exception de ceux auxquels Dieu offrit un refuge dans l'islamisme. Comme son oncle Abou-Taleb le protégeait contre ses ennemis, quelques-uns des plus considéra«bles d'entre les Koreïschites vinrent un «jour le trouver. Parmi eux étaient Otha «<et Schaïba, tous deux fils de Rabia; Abou

[ocr errors]
[ocr errors]

[ocr errors]

Sofian, fils d'Omaïa; Abou-Bohtori, fils « de Hescham; Asouad, fils de Mottalib; Abou-Djahl, fils de Hescham, fils de Moghaïra; son oncle Walid, fils de Moghaïrael-Makhzoumi; Nabih et Monabbeh, tous << deux fils de Hadjadj, de la famille de Sahm, et As, fils de Waïl, de la mème famille; ce dernier, père d'Amrou Ben« el-As. Ils dirent à Abou-Taleb: « Le fils de ton frère a déversé le blâme sur notre religion; il a accusé nos sages de folie et

"

"

«

[ocr errors]

«

<< nos ancêtres d'erreur. Empeche-le donc de nous attaquer, ou reste neutre entre «<nous et lui. » Abou-Taleb opposa à leur

ex

désir un refus adouci par des paroles hon« nêtes. Le prophète ayant cependant con«tinué l'œuvre de sa mission, et ayant gra «vement offensé les Koréïschites, ils re« vinrent une seconde fois vers Abou-Taleb, « et répétérent ce qu'ils avaient dit la pre«mière fois; puis ils ajoutèrent : « Si tu « ne lui interdis pas ses attaques, nous vous «< combattrons tous deux jusqu'à ce que périsse un des deux partis. » Cette me"nace parut grave à Abou-Taleb, et il dit au prophète: «Voici que les gens de ta « tribu disent telle et telle chose. Le pro« phète, qui crut que son oncle l'abandon« nait, s'écria: «O mon oncle, quand même « ils placeraient le soleil à ma droite et la « lune à ma gauche, je n'abandonnerais pas

«

[ocr errors]

poursuivirent de leur haine l'homme dont leur instinct devinait les projets sans les comprendre. La résistance s'organisa de toute part; l'insulte, le mépris, l'injure, puis bientôt les attaques à main armée furent employés pour détourner et anéantir les sectateurs du nouveau prophète. S'il n'avait pas été défendu par une famille nombreu breuse et puissante, il eût succombé lui-même: mais d'éclatantes conversions venaient de jour en jour donner plus de force à ses doctrines. Ce fut d'abord Hamza, son oncle, homme de cœur et d'énergie, qui fut poussé à l'islamisme par la force même des injures dont on abreuvait un de ses parents les plus proches. Quelques jours plus tard, Omar Ben-el-Khattab, ce même Omar qui porta dans la suite l'islamisme des extrémités de la Perse aux colonnes d'Hercule, mais qui alors se déclarait l'ennemi le plus acharné du novateur, promit aux Koréïschites de leur apporter la tête de Mahomet (*).

[ocr errors][merged small]

<< mon œuvre. » Le prophète sentit alors ses «< yeux gonflés de larmes, et il pleura; puis «< il se leva, et comme il s'éloignait : « O fils de mon frère, lui dit Abou-Taleb en le rappelant, reviens, et tiens les discours que tu voudras; par Dieu puissant, rien « ne me décidera jamais à te livrer. » Dès lors toutes les tribus persécutèrent qui« conque embrassait l'islamisme. » Voyez Aboulfeda, Vie de Mohammed, p. 17.

«

(*) Omar se nommait, d'après Kodhai, Abou-Hafs Omar, fils de Khattab, fils de Nofail, de la tribu des Benou-Ada, Il était né à la Mecque, et dans son enfance il avait été employé à garder les chameaux de son père, qui le traitait avec une extrême sévérité lorsqu'il manquait en quelque chose à son devoir. On lit dans le Camous qu'Omar avait été surnommé El-Farouk, ou le Séparateur, parce que sa conversion à l'islamisme avait marqué la séparation entre la religion nouvelle et l'idolâtrie des anciens Arabes; en effet, jusque-là l'islamisme, professé en secret par quelques prosélytes, n'avait pas eu le retentissement qu'il acquit alors qu'Omar, homme influent par sa position et son courage, se fut consacré tout entier à la propagation du nouveau culte auquel il venait de se soumettre. D'après Tabari, le nom de Séparateur lui fut donné

Son courage, sa force prodigieuse, donnaient une grande valeur à sa menace; déjà il était en route pour l'exécuter, lorsqu'il rencontra Noaïm, fils d'Abdallah-el-Nahham. Où vas-tu? lui dit celui-ci. Mettre à mort le faux prophète, répond Omar.-Ne ferais-tu pas mieux, d'abord, d'arracher ta sœur et ton cousin Saïd à leurs nouvelles croyances? En apprenant ainsi que sa sœur s'est convertie à l'islamisme, Omar change de route; il se rend chez elle, où il la trouve occupée à lire le Coran. Elle entend les pas de son frère, cache le livre, mais trop tard; Omar l'a vu, il exige qu'elle le lui remette à l'instant; elle hésite, il la frappe, et, vaincue par la douleur, elle obéit. Omar se saisit du Coran, en lit quelques phrases. Les grandes pensées, le style poétique l'émeuvent profondément. Quelle douce morale! s'écria-t-il; où est celui qui l'a apportée aux hommes? Sa sœur lui répond qu'il le trouvera au milieu de ses disciples, dans une maison sur la colline de Safa. Il s'y rend à l'instant, abjure ses erreurs entre les mains du prophète, et devient l'un des plus fermes soutiens de l'islamisme.

Quelques conversions brillantes ne firent que rendre la persécution plus active, et bientôt, sur l'ordre même de leur chef, les disciples de Mahomet émigrèrent en Abyssinie (*). On peut

par Mahomet, pour avoir coupé en deux, d'un coup de sabre, un musulman qui refusait d'obéir à la sentence que le prophète venait de prononcer contre lui.

(*) « Les premiers qui quitterent l'Arabie étaient au nombre de douze hommes et de « quatre femmes. Parmi eux se trouvaient « Othman, fils d'Affan, et sa femme Ro«kaïa, fille du prophète; Zobéir, fils d'A« wam; Othman, fils de Matoun; AbdAllah, fils de Maçoud, et Abd-er-Rahman, fils d'Aouf. Ils s'embarquèrent et se dirigerent vers le Nadjaschi, auprès duquel « ils resterent. Djafar, fils d'Abou - Taleb,

vint ensuite se réfugier près d'eux, et « plusieurs musulmans le suivirent l'un après l'autre. Le nombre entier de ceux qui passèrent en Abyssinie fut de quatre-vingttrois hommes et dix-huit femmes, sans

voir dans le choix de cet empire chrétien combien Mahomet cherchait à rapprocher ses enseignements de ce que lui avaient appris nos livres saints. La connaissance d'un Dieu unique manifestée par un culte, telle était la vérité religieuse qu'il venait révéler à son peuple. Cette vérité, il l'avait prise dans la Bible et dans l'Évangile pour la travestir plus tard sẹlon les besoins de son ambition; mais tout porte à croire qu'il se tint d'abord aussi près que possible des doctrines de l'Homme Dieu dont il ne niait pas l'essence divine. Aussi les musulmans furent-ils reçus à la cour du monarque abyssin avec tous les égards d'une sincère hospitalité. En vain les Koréïschites députèrent quelques-uns d'entre eux vers le prince pour réclamer les fugitifs et l'avertir qu'il avait accordé sa protection aux sectateurs d'un faux prophète, à des ennemis du christianisme. Placé entre des païens et des hommes dont la religion lui semblait se rapprocher de la sienne, le prince abyssin ne crut pouvoir mieux faire que d'interroger les exilés sur ce qu'ils pens nient de Jesus-Christ : << Jésus, lui répondirent-ils, c'est le verbe de Dieu envoyé par lui à Marie toujours vierge.» Cette réponse, conforme aux doctrines du Coran, ôtait tout prétexte à des persécutions nouvelles, et les Koreïschites revinrent à la Mecque avec le regret de voir leurs ennemis échapper à la haine qu'ils leur portaient.

Cependant Mahomet s'était retiré chez son oncle Abou-Taleb, qui, quoique n'ayant pas embrassé publiquement l'islamisme, portait à son neveu le plus grand intérêt et s'était toujours montré prêt à le défendre. Bientôt sa maison devint le rendez-vous de tous ceux qui inclinaient vers les nouvelles croyances, et chaque jour quelque conversion inattendue venait irriter les Koréischites. Ils résolurent alors de frapper pour ainsi dire d'une

[blocks in formation]

note d'infamie, non-seulement l'homme qui réclamait au nom d'un Dieu unique un pouvoir qu'ils ne voulaient pas reconnaître, mais encore ceux qui tenaient à lui par les liens du sang. Tous les Haschémites ou descendants de Haschem, père d'Abd-el-Mottalib et bisaïeul de Mahomet, furent enveloppés dans la proscription. Il fut défendu non-seulement de s'allier à eux, mais même d'opérer avec eux de simples transactions commerciales: ils étaient mis au ban des tribus, frappés dans leur honneur et dans leurs intérêts de fortune. Le pacte solennel qui contenait le serment prononcé à ce sujet par les Koréïschites fut enfermé dans la Caaba et mis sous la protection des trois cent soixante divinités dont les simulacres ornaient ce temple.

[ocr errors]

Ce fut là l'occasion d'un miracle rapporté par les chroniqueurs orientaux, et que suffisent parfaitement à expliquer les nombreuses intelligences entretenues par Mahomet dans les tribus ennemies. Abou-Taleb vint un jour trouver les Koréïschites, et se plaignant avec force de leurs injustes préventions contre la famille de Haschem « Vous avez consacré votre haine, leur dit-il, par un acte so« lennel que vous avez enfermé pour « plus de sûreté entre les murs de la « Caaba. Eh bien, je vous le dis au « nom de mon neveu Mohammed, cet « acte a été rongé par les vers; vos « menaces infamantes contre une fa« mille respectable n'existent plus : le « nom seul de Dieu que vous aviez in« voqué est resté intact, et vous le re« trouverez encore. Vérifiez mes paro« les, ouvrez les portes du temple, et si « j'ai dit la vérité, revenez sur une « résolution qui fait plus de honte à « vous qu'à nous-mêmes. » Les Koréïschites coururent à la Caaba: tout ce qu'avait dit Abou-Taleb était vrai, et beaucoup d'entre eux renoncèrent à persécuter une famille que la Providence protégeait d'une manière si évidente.

Il y avait déjà dix ans que Mahomet luttait contre la réprobation de

ses concitoyens, lorsqu'il se vit presque accablé par deux pertes successives qui lui enlevèrent ses plus fidèles soutiens. Son oncle Abou-Taleb, qui l'avait recueilli dans sa maison, protégé de son influence, défendu contre ses plus ardents adversaires, et sa femme Khadidja, cette enthousiaste dévouée qui l'avait aimé d'amour lorsqu'il n'était qu'un orphelin sans fortune, puis avait cru en lui lorsqu'il s'était dit l'envoyé de Dieu, moururent à peu de mois l'un de l'autre (*). Atteint dans ses plus chères affections, exposé désormais à toute la fureur de ses ennemis, Mahomet ne put tenir tête à l'orage. Il se retira à Taïef. ville située dans les montagnes à l'est de la Mecque. Ne pouvant résister, dans ce nouvel asile, au désir de répandre sa doctrine, il se présenta devant l'assemblée des BenouThakif, habitants de Taïef, pour y soutenir la vérité de sa mission, et ne fut pas plus heureux qu'il ne l'avait été auprès des Koreïschites (**). Non

"

"

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

«

(*) « Abou-Taleb mourut au mois de <schewal de la dixième année écoulée depuis la mission prophétique. Lorsque sa maladie eut pris un caractère de gravité, le prophète lui dit : « Récite le témoi«gnage de la foi musulmane, ò mon oncle, afin qu'au jour du jugement il me soit permis d'intercéder en ta faveur. — Ó fils « de mon frère, répondit Abou-Taleb, si « ce n'était la crainte des injures et l'idée qu'auraient les Koréischites que je n'ai cédé qu'à la peur de la mort, certes je prononcerais la formule du témoignage, » Lorsqu'il fut sur le point de cesser de vivre, il se mit à remuer les lèvres, et Abbas ayant approché son oreille, s'é« cria : « Par Dieu puissant, ò mon nevcu, « les paroles que tu lui avais prescrites, il « vient de les prononcer. » Le prophete dit « alors: Louange à Dieu, qui l'a guidé dans la bonne voie. » Voy. Aboulfeda, Vie de Mohammed, p. 22.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors][ocr errors][ocr errors]

(**) L'un des Benou-Thakif lui dit alors:, Dieu n'a-t-il donc point trouvé d'autre « envoyé que toi?» Et un autre ajouta : Certes, je ne veux jamais discourir avec toi: car, si tu es l'envoyé de Dieu, tu es « un trop grand personnage pour que je « réplique à tes discours; si tu mens con

"

seulement on refusa de le croire, mais on le força de sortir de la ville.

Jusqu'alors toute prédication publique avait été pour Mahomet l'occasion d'un échec nouveau. Il avait rallié autour de lui quelques disciples; mais ses parents eux-mêmes, qui, par suite de l'esprit de famille si puissant chez les Arabes, avaient toujours pris sa défense, étaient loin de croire tous en lui. Pas une ville, pas une bourgade ne lui aurait offert un asile contre la persécution: rien ne semblait done faire prévoir encore son triomphe, et dans cette année même où il devait se croire plus loin de son but qu'au premier jour, l'attendait le vrai succès qui jeta les fondements de sa puissance. Ce fut à l'époque du pèlerinage, pendant le concours, autour de la Mecque, de toutes les tribus du désert, que Mahomet se présenta sur la colline d'Acaba (*) aux portes de la ville, à quelques habitants de Mé

[ocr errors]

«tre Dieu, il ne me convient pas de t'adres« ser la parole. A ces mots, le prophète «se leva pour s'éloigner, désespérant de la « conversion des Benou - Thakif; mais ils - ameuterent contre lui les jeunes turbulents et les esclaves qui le poursuivirent d'injures et de cris, au point que les rassemblements l'obligèrent à entrer dans un « enclos. Alors tous ces insensés le quittè<< rent, et il s'écria: «O mon Dieu, c'est « à toi que je me plains de ma faiblesse, de «mon manque de ressources, et du mépris

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

ex

"

où je suis tombé parmi les hommes. O toi, le plus miséricordieux des miséricordieux; toi, le maitre des faibles, tu es mon seigneur; à quel autre que toi pourrais-tu vouloir que je m'adressasse? Serait-ce à des étrangers qui me feront mauvais visage, " ou à des ennemis auxquels tu as donné la *puissance sur moi? Si tu n'as pas contre "moi de colère, que m'importe le reste ? » Voy. Aboulfeda et le Sirat-er-Reçoul, fol. 68 v.

(*) La colline d'Acaba s'élève au nord de la Mecque. Ce lieu étant devenu célèbre dans les fastes de l'islamisme, on y a depuis élevé un temple. El-Djouzi dit dans l'ouvrage où il décrit les rites et cérémonies du pèlerinage: «La treizième station est la mosquée d'El-Acaba, où les ansariens prêtèrent serment. »

[ocr errors]

10 Livraison. (ARABIE.)

dine venus pour s'acquitter des rites sacrés. Médine, ainsi que nous l'avons vu, avait été peuplée par les tribus d'Aws et de Khazradj venues du Yémen à l'époque de la grande émigration. Ces deux familles devaient d'autant mieux comprendre les dogmes du prophète qu'il les avait puisés dans les différents livres de l'Ancien Testament, et que deux tribus juives, les Benou-Nodhaïr et les Benou-Koraïzha, vivaient à Médine dans un contact continuel avec les Arabes. Sans doute les anciens élus du Seigneur s'y trouvaient dans cet état de dépendance et d'abaissement, miracle permanent depuis l'anathème prononcé contre eux; mais plus hardis dans le désert qu'ils ne le furent jamais en Occident, ce n'était pas sans frémir de colère qu'ils baissaient la tête sous le joug. Plus d'une fois ils avaient dit aux Arabes : «Vienne le prophète que nous attendons, et à votre tour vous nous serez soumis. » En écoutant Mahomet, en entendant l'exposition de cette doctrine si semblable à celle des juifs, les Benou-Aws et les Benou-Khazradj crurent à la venue du prophète qu'appelaient chaque jour leurs antagonistes : « Voici sans doute l'envoyé du Seigneur, se dirent-ils; prévenons les juifs et mettons-le dans nos intérêts. » Dès lors ils crurent en lui, et de retour à Médine, ils parlèrent avec un tel enthousiasme du nouveau législateur, que son nom retentissait dans chacune des maisons de la ville.

C'est à l'année suivante qu'il faudrait probablement rapporter cette légende que les musulmans appellent le voyage nocturne du prophète, et qu'ils ont brodée d'une foule de merveilles telles que peut en comporter un pareil sujet. Aboulféda qui, en fait de prodiges, s'est montré le plus sobre des historiens du prophète, a beaucoup simplifié la question en disant : « Le « voyage du prophète de Dieu depuis « la Mecque jusqu'à Jérusalem en une

seule nuit, et son ascension au delà « du septième ciel, sont placés par dif<< férents auteurs à différentes épo«ques. On n'est pas d'accord non plus

10

a si le prophète fit ce voyage en réalité, ou si, pour lui, ce fut une viasion. Nous imiterons la réserve du prince de Hamah qui n'en dit pas davantage à ce sujet, et nous passerons sous silence la jument Borak avec sa figure de femme, sa crinière de perles, sa queue d'émeraudes, ainsi que l'échelle merveilleuse par laquelle le prophète monta aux délices du Paradis (*).

Les semences de doctrine apportées par quelques hommes des tribus d'Aws et de Khazradj dans la ville de Médine qui portait encore le nom d'Iathreb, avaient prospéré au delà de leurs espérances. Là s'était formée pour la première fois une majorité puissante d'hommes entraînés par conviction ou politique vers une religion dont l'apôtre n'était pas né parmi eux: tant il est vrai que nul n'est prophète en son pays. La Mecque et Iathreb avaient été de tout temps les deux villes les plus importantes du Hedjaz; mais le temple de la Caaba attirant chaque année la foule des pèlerins, donnait à la Mecque une supériorité que sa rivale ne supportait qu'avec peine. Une occasion favorable se présentait d'accueillir l'ennemi des Koréïschites, cette orgueilleuse tribu qui s'était emparée de la garde du temple. Les habitants de. Iathreb la saisirent avec empressement; douze d'entre eux se rendirent auprès de Mahomet pour le prier de les instruire à fond dans les croyances qu'il était venu apporter aux Arabes, et, après avoir entendu ses instructions, lui prêtèrent serment sur cette même colline d'Acaba où leurs concitoyens avaient rencontré

(*) L'ascension nocturne est mentionnée dans la 17 sourate du Coran, dont elle forme le titre. Gagnier a publié un long récit de ce voyage, d'après les traditions d'Abou-Horaira, recueillies par l'auteur du Sirat-er-Reçoul, et autres écrivains orientaux, dans la Vie de Mahomet, qu'il a publiée en trois volumes. Voy. t. Ier, p. 251 à 342. Voy, sur le même sujet les Monuments arabes, turcs et persans du cabinet de M. le duc de Blacas, par M. Reinaud, t. II, p. 83 à 87; voy. aussi la planche 13.

le prophète l'année précédente. Le serment qu'ils prêtèrent fut celui qui plus tard a été exigé des femmes. Il consistait à promettre de ne reconnaître qu'un Dieu unique, de ne pas dérober le bien d'autrui, de ne commettre ni adultère ni homicide, et de ne point mettre à mort ses enfants (*). Nous avons déjà vu que Mahomet avait eu la gloire d'abolir cet usage dénaturé où étaient les Arabes pauvres et chargés d'une nombreuse famille de se défaire de leurs filles, de peur que la pauvreté ne fût un écueil pour leur honneur (**). Les autres articles du serment dérivent également d'une morale pure et douce opposée aux préceptes de violence qui plus tard firent de l'islamisme la religion du sabre. Il est probable que Mahomet avait voulu d'abord vaincre par la persuasion; et les premiers chapitres du Coran qu'il fit descendre du ciel, étaient empreints des sentiments de charité à l'aide desquels il espérait triompher des superstitions du paganisme. Plus tard, la résistance opiniâtre des Mekkaouïs l'entraîna vers les mesures de violence, et le glaive une fois tiré, ni lui ni ses successeurs ne le remirent dans le fourreau.

Les députés de Médine, dont les habitants en faveur de leur zèle prirent le nom d'Ansariens ou aides du prophète, de même que leur ville changea

[ocr errors]

"

(*) Ce serment se trouve dans l'avantdernier verset de la 6 sourate: «< O prophète si des femmes fidèles viennent à toi, et qu'elles te jurent de n'adorer qu'un seul Dieu, de ne pas dérober, de ne pas «< commettre d'adultère, de ne pas mettre à << mort leurs enfants, de ne pas forger de << mensonges, de ne te point désobéir en rien de ce qui est juste, accorde-leur ta « foi, et invoque pour elles la clémence di<«< vine, Dieu est clément et miséricordieux.»>

[ocr errors]
[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors]
« FöregåendeFortsätt »