tirait à proprement parler, toute sa force? Car au fond, qu'était-ce que le Congrès, sinon l'Autriche, l'Angleterre, la Russie et la Prusse ayant consenti par faveur à admettre la France dans le comité de Pologne et de Saxe? La prétention de faire la loi, tantôt à la cour de Pétersbourg, tantôt à celle de Berlin et même. à l'Autriche, au nom de l'intérêt général, eût été une inutile témérité. Contenir les principales puissances dans les termes du traité de Paris par la voie des insinuations, des observations, ou quelquefois par la fermeté, était tout ce que l'on pouvait faire. Loin donc de condamner le Congrès de n'avoir point disposé des forces qu'il pouvait mettre en mouvement, lorsque la majorité avait embrassé un parti, il faut bien plutôt lui savoir gré d'avoir été modéré. Ceux qui l'accusent de faiblesse, eussent été bien plus prompts encore à l'accuser de violence et de domination outrée, s'il eût suivi leurs inspirations. Est-ce à une époque où l'on s'élève tant contre les autorités absolues, qu'il convenait au Congrès d'affecter un pouvoir despotique ? Ainsi s'évanouit cette fausse attribution de puissance universelle, d'après laquelle on a prétendu qu'il eût pu repousser la Russie derrière la Vistule, l'Autriche derrière l'Isonzo, la Prusse derrière l'Oder, abaisser l'Angleterre, expulser le Turc d'Europe et émanciper toutes les colonies. En agissant de la sorte, le Congrès se fût constitué désorganisateur universel et fauteur d'une guerre générale. Il eût lui-même prononcé sa dissolution; dissolution dont le premier effet eût été, que chaque grande puissance eût gardé ce qu'elle occupait, en vertu de la conquête devenue ainsi la seule règle des acquisitions; au lieu que, par une discussion réfléchie des droits, des prétentions et des intérêts, et par une sage réserve dans ses décisions, le Congrès est parvenu à construire un tout qui a obtenu l'assentiment et la garantie de la très grande majorité des puissances. Lorsqu'il commença à délibérer, l'Europe n'était point organisée, il n'y avait que des Etats épars, sans autres liens que ceux résultant des traités conclus à l'occasion de la guerre. Le Congrès s'attacha à retrouver le continent dans ces débris, et l'arracha une seconde fois au déluge de maux préparés par un despotisme envahisseur. En dix mois, il répara les désordres de vingt-cinq années de désolation. En même temps qu'il invitait les peuples à des sentiments fraternels, il plaidait leur cause près des rois, et leur obtenait des constitutions favorables à l'exercice des droits légitimes. Les détracteurs du Congrès diront que, malgré tout le bien dont on lui fait honneur, le mécontentement et le malaise ont éclaté dans plusieurs pays, à un degré beaucoup plus haut, qu'avant la réunion de cette assemblée. Si le déplacement du commerce et des grandes fortunes avait favorisé certaines contrées, le retour de chaque chose à ses vraies proportions, ainsi que les distributions plus égales, ont été à certains États quelques avantages provenant de circonstances passagères et liées à un grand désordre politique. Le Congrès ne pouvait donner à tous les à son indépendance. Il était plus que jamais disposé à suivre ce plan de conduite, à la condition toutefois que les autres puissances agiraient dans le même sens et qu'aucune d'entre elles ne chercherait à profiter de la faiblesse de la Porte pour en tirer des avantages susceptibles de porter atteinte aux droits des autres. Une fois ce principe admis, il se déclarait prêt à travailler de concert avec l'Angleterre au maintien de l'Empire ottoman et à ne plus montrer aucune inquiétude à son sujet. C'était une vraie satisfaction pour lui de voir quelle confiance l'Angleterre avait en sa parole et il espérait qu'établie sur de telles bases son entente avec elle prendrait plus de force et deviendrait plus intime (1). (1 Ibid., p. 475). prenant de nouveau la légitimité pour base. >> (1) (1) Flassan, Histoire du Congrès de Vienne, Paris, 1829, t. II, |