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XV.

MANIFESTES ET DÉCLARATIONS DE

GUERRE. (†)

Manifeste de la cour de Versailles du 26 d'avril 1744, portant déclaration de guerre contre l'Impératrice-Reine de Hongrie, Marie - Therèse. (1)

LORSQUE S. M. s'est trouvée dans l'obligation, aprés que toutes les voies de conciliation ont été épuisées, d'accorder à la maison de Bavière les secours qu'elle s'était engagée à lui fournir, pour l'aider à soutenir des droits sur quelquesuns des états de la succession du feu empereur Charles VI, elle n'avait aucun dessein de se rendre partie principale dans la guerre. Si le roi eût voulu profiter des circonstances pour étendre les frontières de son royaume, personne n'ignore combien il lui eût été facile d'y parvenir, soit

(†) voyez aussi, Déclarations de cours et proclamations. (1) En vertu du traité d'alliance que la cour de Versailles avait conclu avec l'électeur de Bavière dont elle reconnut les prétentions sur la succession de l'empereur Charles VI, les trou pes françaises reunies à celles de l'électeur s'étaient portées déja en 1741, dans les états héréditaires; mais ce ne fut qu'en 1744, que la France ayant éprouvé des revers, et la reine de Hongrie ayant rejette les ouvertures de paix que la cour de Versailles lui avait faites, qu'elle se détermina à lui déclarer la guerre dans les formes, et comme partie principale.

par la voie des armes, qui n'auraient alors éprouvé qu'une faible résistance, soit en acceptant les offres avantageuses et réitérées qui lui ont été faites par la reine de Hongrie pour le détacher de ses alliés. Mais, loin que la modération de S. M. ait produit les effets qu'on devait s'en promettre, les procédés de la cour de Vienne envers la France ont été portés à un tel point d'aigreur et de violence, que S. M. ne peut différer plus longtems d'en faire éclater son juste ressentiment. Les écrits scandaleux dont cette cour et ses ministres ont inondé l'Europe, l'infraction de toutes les capitulations, la dureté des traitemens qu'elle a exerces envers les prisonniers français qu'elle retient contre les stipulations expresses du cartel, enfin ses efforts pour pénétrer en Alsace, précédés de déclarations aussi téméraires qu'indécentes, qu'elle a fait répandre sur les frontières, pour exciter les peuples à une révolte; tant d'excès redoublés forcent aujourd'hui S. M., pour la vengeance de sa propre injure, la défense de ses états, et le soutien des droits de ses alliés, de déclarer la guerre, comme elle la déclare par la présente, à la reine de Hongrie, tant par terre que par mer.

Contre-Manifeste de l'Impératrice- Reine de Hongrie, du 16 de Mai 1744. (†)

Il est notoire avec combien de religion et de scrupule, nous nous sommes appliqués depuis notre avénement au trône de nos ancêtres, à remplir les traités de paix, d'amitié et d'alliance que notre maison avait contractés avec toutes les puissances de l'Europe. La chose est même si incontestable que plusieurs ont pensé que nous avions poussé trop loin la complaisance. Tant d'égards cependant, dont nous avons usé, n'ont point été capables d'empêcher la couronne de France de violer la paix qu'elle avoit jurée

(†) Ce n'est que par l'opposition des manifestes que dans les querelles politiques, on peut bien saisir le point de droit; de FLASSAN T. 5 p. 198.

peu d'années auparavant; d'attaquer la succession hérédi taire, qu'elle nous avoit solennellement garantie, de machiner les desseins les plus pernicieux, au préjudice de notre maison archiducale, non-seulement dans toutes les cours des princes chrétiens, mais même à la Porte - Ottomane, au grand scandale de cette dernière, qui, se piquant de fidélité et de bonne foi, n'a pu manquer d'en témoigner son aversion; d'allumer la guerre dans le nord, pour nous frustrer du secours que nous en pouvions attendre, d'inonder, avec de nombreuses armées nos royaumes et états héréditaires, qu'elle s'était chargée de nous garantir; de les épuiser jusqu'au dernier sou, ainsi que ses généraux s'en sont vantés; de distribuer capricieusement à d'autres princes la plupart de nos états, de dire hautement qu'elle nous forcerait, sur les remparts de Vienne, de signer ces indignes conditions; de prétendre, non-seulement que notre maison archiducale était éteinte, mais de travailler en effet à sa destruction, de la manière qu'il a été dit; en un mot, de troubler l'Empire, toute l'Europe et la Chrétienté en mettant tout en combustion. Le souvenir de ses entreprises est trop récent pour avoir besoin de preuves: mais puisque le parti adverse a franchi absolument toutes les règles de bienséance, nous ne manquerons pas de mettre incessamment au jour, plusieurs secrets qu'on a voulu dérober à la connaissance du public, et que des égards outrés et superflus nous ont empêchée jusqu'à prèsent de divulguer. En attendant, il n'y a personne au monde qui ne doive être convaincu que les histoires ne fournissent aucun exemple d'un semblable procédé, et que la postérité aura peine à le croire. Mais ce qui doit paraître incompréhensible à tout le monde, est, de voir couvrir du voile de l'amitié, un procédé si inoui et si incroyable; et que, comme pour se moquer de tout ce qu'il y'a de gens raisonnables, on s'efforce de leur persuader qu'il n'est pas incompatible avec la modération, l'amour de la paix, et les intentions les plus innocentes et les plus pures; c'est-à-dire, que les traités de paix solennellement jurés ne souffrent aucun préjudice de ces hostilités poussées à l'excès. Des artifices si palpables et si évidens, n'ont jamais été capables de nous en imposer un seul moment, ni de nous faire oublier ce que nous nous devons à nous-mêmes, à notre postérité, à nos sujets, à nos alliés, à l'Allemagne notre patrie, et à toute la Chrétienté. Et quoique nous soyons très éloignée de tous sen

timens de haine et de vengeance, qui n'ont jamais prévalu, ni ne prévaudront jamais à l'avenir dans notre esprit, sur un état durable et véritablement heureux de paix et de prospérité; néanmoins toutes les voies amiables ayant été orgueilleusement rejettées par le parti adverse, qui s'est contenté d'opposer à l'exposition des matières de droit, après les avoir écoutées avec dédain, d'un côté, la grande supériorité de nos ennemis réunis, et de l'autre, la faiblesse de notre maison archiducale, qu'on comptait généralement abandonnée; nous n'avons pu nous dispenser de faire les derniers efforts pour la défense qu'on nous a forcé de faire, dans la ferme confiance que nous avons en Dieu, qui punit toujours l'orgueil, la perfidie et le parjure, quand même tout secours humain viendrait à nous manquer, son bras tout puissant pouvant seul nous en tenir lieu.

Nous n'avons point été frustrée dans notre attente, sans que les heureux succés que Dieu nous a accordés, aient cependant diminué en rien nos sentimens pacifiques. Nous nous sommes expliquée depuis, de la même façon que nous avions fait auparavant, et nous n'avons insisté que sur un dédommagement indispensable, attendu l'insuffisance de tant de promesses, traités, garanties, sermens, en un mot, des engagemens les plus forts que l'esprit humain soit capable d'imaginer, et dont nous avons éprouvé si sensiblement la faiblesse, afin de nous mettre efficacement à l'abri, pour l'avenir, de semblables entreprises hostiles, et des maux infinis qui en sont la suite. Nos ennemis n'étai ent pas dans les mêmes dispositions, etc. (†)

(†) Le manifeste ajoute, que la guerre de la France contre la Grande-Bretagne, alliée de la reine de Hongrie, eût été un motif suffisant pour cette souveraine, de déclarer la guerre à la cour de France, quand même celle-ci n'aurait eu d'autre tort; mais qu'elle venait de la lui déclarer à elle-même dans les formes, après la lui avoir faite pendant quelques années, en l'attaquant avec toutes ses forces, d'une manière parjure et contraire à tout droit divin et humain.

Manifeste de la Cour de Versailles, du 15 de Mars 1744. (†)

Dès le commencement des troubles qui se sont élevés après la mort de l'empereur Charles VI, le roi n'avait rien négligé pour faire connaître que S. M. ne désirait rien avec plus d'ardeur, que de les voir promptement appaisés par un accommodement équitable entre les parties belligérantes.

La conduite qu'elle a tenue depuis, a suffisamment montré qu'elle persistait constamment dans les mêmes dispositions; et S. M. voulant bien ne former elle même, aucune prétention qui pût mettre le moindre obstacle au rétablissement de la tranquillité de l'Europe, ne comptait pas d'être obligée de prendre part à la guerre, autrement qu'en fournissant à ses alliés, les secours qu'elle se trouvait engagée à leur donner. Des vues aussi désintéressées auraient bientôt ramené la paix, si la cour de Londres avait pensé avec autant d'équité et de modération, et si elle n'eût consulté que le bien et l'avantage de la nation anglaise; mais le roi d'Angleterre, électeur d'Hanovre, avoit des intentions bien opposées, et on ne fut pas longtems à s'apercevoir qu'elles ne tendaient qu'à allumer une guerre générale.

Non content de détourner la cour de Vienne de toute idée de conciliation, et de nourrir son animosité par les conseils les plus violens, il n'a cherché qu'à provoquer la France, en faisant troubler partout son commerce maritime, au mépris du droit des gens et des traités les plus solennels. La convention d'Hanovre du mois d'octobre 1741, sembla cependant devoir rassurer Sa Majesté sur la continuation de pareils excés. Le roi d'Angleterre, pendant le séjour qu'il fit dans ses états d'Allemagne, parut écouter les plaintes qui lui furent portées, et en sentir la justice; il donna sa parole royale de les faire cesser, et il s'engagea solennellement à ne point troubler les alliés du roi dans la poursuite de leurs droits; mais à peine fut-il retourné à Londres, qu'il oublia toutes ses promesses; et aussitôt qu'il fût certain que l'armée du roi quittait entièrement la Westphalie il fit déclarer par ses ministres, que la convention ne subsistait plus, et quil s'en tenait dégagé. Alors il se crut dispensé de tout ménagement. Ennemi personnel de la France,

(†) v. DE FLASSAN, Histoire de la diplomatie française, T. 5 P. 187.

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