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gner du mal. Nous devons accorder notre foi à un fait quand il est vérifié. L'office de notre raison consiste à acquérir la plus grande certitude possible des choses; il lui est impossible d'expliquer complétement ce qui est au-dessus d'elle. Notre philosophe a le bon sens de maintenir la sienne dans cette mesure, où elle est loin d'être à l'étroit: retinuit, quod est difficillimum, ex sapientia modum (1). Il est même bien aise, dans ses Considérations sur l'économie de l'univers, de faire connoître que ce n'est que par la théologie que l'on peut prouver les dogmes chrétiens.

Son Imitation de Pascal, dont il procède évidemment, étoit destinée à nous convaincre que notre sainte religion ne borne pas notre raison, mais l'épuise; qu'elle est non-seulement susceptible d'être démontrée, mais qu'elle possède le privilége exclusif d'être fondée et perpétuellement soutenue par des faits;

que nous ne devons pas être effrayés de ce qu'elle propose à notre courage des efforts surnaturels, puisqu'elle offre en même temps à notre infirmité des secours également surnaturels. Il est regrettable que, sur les traces d'un si étonnant modèle, sa plume, docile à sa pensée, n'ait pas achevé d'exposer combien l'extrême foiblesse des plus fortes objections de l'impiété est une preuve sensible de nos vérités; combien nous avons de pressants motifs de nous confier à l'autorité de plusieurs siècles plutôt qu'au système de ces sophistes orgueilleux auxquels les hommes ne défèrent qu'autant que leurs passions le leur conseillent.

Quelques lettres adressées à Voltaire, dans lesquelles le capitaine au régiment du roi lui soumet avec candeur ses idées littéraires, terminent ce que nous possédons des œuvres variées et durables du marquis de Vauvenargues (2).

(1) Tacite. Vie d'Agricola IV.

(2) D'après l'édition de M. Suard.

La seule qui ait paru de son vivant, sans nom d'auteur, est 1 vol. in-12 de toute rareté. Paris, 1746.

La 2e édition, de 1747, élaborée par lui, ne parut qu'après sa mort.

Un vrai philosophe ne seroit-il pas celui qui peut vivre d'accord dans ce monde avec tous, qui sait se proportionner au besoin de tous les esprits et aimer même ceux qui ont des opinions opposées aux siennes? Il faut sans doute mettre une noble chaleur à prouver les erreurs de la raison humaine, mais il faut d'abord soigneusement éviter toute amertume. Dites à l'homme qu'il se trompe; indiquez-lui exactement en quoi il s'égare; mais n'outragez jamais son cœur; ne l'appelez pas insensé. Tel étoit Vauvenargues; philosophe profond sans obscurité, moraliste ferme sans humeur, écrivain véritablement original, il demeurera certainement un des types les plus gracieux de l'esprit françois. Il fait plus que de nous faire doucement rêver et de nous offrir un modèle exquis de mesure et de goût; il nous aplanit les sentiers qui conduisent à la vertu, il nous entraîne à les parcourir notre main dans sa main; il n'écrit que dans ce but, et il y parvient. Comme le soleil du printemps, ses conseils éclairent et échauffent, et celui qui les écoute, pénétré de cette tendre vénération que les grands talents commandent, ne nous blâmera pas de répéter avec Marmontel : Vauvenargues! c'est l'homme du monde qui a pour moi le plus d'attrait!

Prince AUGUSTin Galitzin.

La 3o, 2 vol. in-12, parut en 1797, par les soins de M. Fortia d'Urban. Une 4, peu recommandable, fut publiée par M. Couret qui ajoutoit à son nom celui de Villeneuve.

Celle de Suard est la 5o.

Les OEuvres de Vauvenargues se trouvent dans la collection des prosateurs français de 1818, et c'est d'après ce texte que Brière en publia deux éditions estimées, une en 1821, en 3 vol. in-8, et une autre en 1823, en 3 vol. in-18.

En 1821, Belin a joint une foible partie des OEuvres de Vauvenargues aux caractères de La Bruyère et aux mauvaises maximes de La Rochefoucauld.

Toutes ces éditions sont difficiles à rencontrer.

PARTICULARITÉ CURIEUSE

A PROPOS D'UNE

LETTRE DE PIERRE CORNEILLE.

Nous avons rendu compte dans le Bulletin du Bibliophile (juillet-août 1856, page 855) de la vente de la collection d'autographes de M. Belward Ray, à Londres, où se trouvoit, entr'autres pièces remarquables pour la France, une lettre entièrement autographe et signée de Pierre Corneille. Mais cette lettre a été renduc par l'acquéreur, ayant reconnu qu'elle n'étoit pas autographe de Pierre Corneille. La cause de cette erreur est assez singulière pour être mentionnée dans le Bulletin. En effet, la lettre dont il s'agit a été écrite par Thomas Corneille, au nom de son frère sous sa dictée, ou copiée postérieurement à la date par Th. Corneille. En lisant la copie de cette pièce, que nous reproduisons textuellement, il est impossible de croire cependant qu'elle n'émane pas de l'auteur du Cid, et l'illusion ne cesse qu'après avoir comparé l'original avec des autographes authentiques de Pierre et de Thomas Corneille. Nous reproduisons le texte de cette pièce :

«A Rouen ce 14 juillet 1637.

<< La raison mon cher amy n'a jamais eu d'empire ni sur les <«< fous ni sur les sots, et voila juste pourquoy elle peut estre « d'usage quelque peu pour les gens sensés. Ayant l'approba«<tion de ceux-cy et la vostre qui est tout ce que je souhaite, « je ne dois donc éprouver aucune peine des extravagances

<< que débitent les premiers. L'envie peut encore aller se join«dre a eux sans que jaye pour cela un moindre souci. Si le « Cid est jugé par l'Académie et s'il est jugé avec impartialité, quelque soit son jugement je ne dois voir en cette intention « qu'une entreprise qui m'honore; mais jay bonne raison je « vous assure mon amy, de craindre que cet Aréopage ne se « laisse influencer par celui qui les a fait ce qui sont, ne croyez pas que Chapelain et Sirmon se dédisent, ils sont trop près de leur maître pour penser autrement que luy. Enfin je vous « promets que je suis moins occupé de ma pièce que d'ap<< prendre ce que vous faites. Mr Jourdy m'a conté les plus « belles choses de son voyage de Dreux et me donne grande "envie de venir vous voir dans votre belle famille; mais c'est

un plaisir que je ne sauray auoir encore de longtemps, veu " que je veux vous montrer une nouvelle piece qui est loin « destre finie. Adieu mon cher amy, mander moy de vos noue velles plus souvent et croyer que vous me combler de joye e quand je recois des vostres.

<< CORNEILLE. »

ANALECTA-BIBLION

Le Mystère de la Vie et Hystoire de Monseigneur sainct Martin, lequel fut archeuesque de Tours: contenant comment il fut conuerty à la foy chrestienne, puis convertit ceux de Millan et plusieurs autres. Aussy y sōt plusieurs autres beaux miracles faictz par son intercession qui seroyent longz à racompter: finablement comment il mourut sainctement, et est ce présent

mystère à cinquate et trois personnages dont les noms sensuyvent ci-après. A Paris, par la veufve Jean Bonfons, libraire, demourant en la rue Neufue Nostre-Dame, à l'enseigne de sainct Nicolas.

M. Brunet (Manuel du Libraire, 3e éd., t. III, p. 536) cite la Vie et les miracles de Monseigneur saint Martin, translatée de latin en françoys, imprimée à Tours, par Matthieu Lateron, le 7 mai mil cccc. iiii. xx et xvi, par Jean de Liége, libraire, petit in-fol. goth. ; ce seroit le premier livre imprimé à Tours, et dont les exemplaires seroient fort rares.

Le même auteur (Sup. in-8° Vie des Saints, p. 401) cite aussi : SAINT MARTIN, AUECQUES LES MIRACLES ET ORAISON: Cy fine la Vie miracles et oraison de Monsieur saint Martin, imprimée à Rouen, par Jacques Leforestier, demeurant à l'enseigne du Tieulle d'or, près les Augustins, petit in-4o goth. de 6 feuilles, avec une figure en bois. Il ajoute que l'on trouve dans le catalogue Lang, no 2308, Vie et miracles de saint Martin, archevesque de Tours, Paris, Michel Lenoir, 1499, in-4o goth., imparfait au commencement. « Nous ignorons, dit-il, si c'est une édition de l'opuscule ci-dessus, ou une réimpression de la Vie et des miracles de saint Martin, imp. d'abord à Tours, en 1496, petit in-fol. de 106 ff., avec 96 fig. en bois, vol. rare, dont notre Bibliothèque royale conserve un exemplaire imprimée sur vélin avec fig. enluminées. »

Ce ne fut que dans le tome II du supplément, p. 478, que M. Brunet transcrivit littéralement le titre de notre mystère, qu'il avoit vu chez M. Techener, auquel il avoit été communiqué; livre unique, en ce sens que le seul exemplaire connu appartient à la Bibliothèque de Chartres; avant elle il faisoit partie de la bibliothèque de Josaphat, à quelques kilomètres de la ville (1).

Le Mystère de saint Martin se trouve relié avec quatre ou(1) Ex lib. 126 monri B. Mariæ D. Josaphat.

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