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esprit de ma méthode; car elle se compose de deux parties distinctes, dont l'une renferme les moyens matériels, et l'autre les moyens intellectuels or, l'on sent que la première ne serait rien sans la seconde.

Il faut s'attendre aussi que je parlerai quelquefois de mes idées en opposition avec d'autres qui sont généralement répandues sur le sujet que je traite; car comment pourrais-je en parler autrement? On doit présumer que si je présente une méthode nouvelle, c'est parce que je la crois meilleure que celle dont on se sert: je dois done tâcher de faire sentir les avantages de l'une et les défauts de l'autre. Après cela, c'est au lecteur à se tenir sur ses gardes, s'il me soup> çonne d'erreur ou de mauvaise foi: et pourvu que la modération règne dans mes critiques, je ne suis plus comptable des impressions qu'elles peuvent produire.

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES.

Une chose qui étonne tous les jours les observateurs, c'est de voir que dans le grand nombre de ceux qui ont appris la musique, il s'en trouve si peu qui sachent la lire de vive voix. La plupart ont besoin d'interroger leur violon, leur

piano, leur flûte, pour déchiffrer la romance nouvelle; et c'est en effet l'instrument qui la lit pour eux. C'est comme si l'on se servait, pour lire toutes sortes de livres, de quelques machines propres à cet effet, dont on apprendrait à jouer en négligeant le moyen si expéditif de la parole.

Voilà des idées qui font un singulier trajet: la vue des signes écrits fait agiter les doigts, les doigts excitent l'instrument, et l'instrument prononce la-pensée. Mais pourquoi la vue des signes ne dit-elle directement rien à l'esprit du lecteur? C'est, dit-on, qu'il ne sait pas la musique vocale. On le voit bien. Mais n'est-ce pas par elle qu'il lui eût fallu commencer...... ou finir? et que résulte-t-il de ne l'avoir mis qu'au point où il est ? Il en résulte, ce dont se plaignent tous les jours les maîtres, qu'un tel lecteur ne sait pas phraser la musique, qu'il ne sait pas quand il quitte un ton ou un mode, ni quand il y rentre: car, après tout, l'instrument ne fait que des notes; et, pour qu'il fasse autre chose, c'est à l'esprit à le diriger: or, pour cela, il faut savoir la musique vocale, c'est-àdire, la musique proprement dite.

En effet, qu'est-ce que la musique, sinon l'art de parler, de lire, et d'écrire le chant?

sinon une langue dans laquelle, ainsi que dans toutes, des idées (ce sont les airs) sont attachées à des signes institués pour les rappeler à l'esprit ? Ces signes sont ou articulés, comme les mots ut, ré, mi....., ou écrits, n'importe de quelle manière; mais tant que celui qui les considère ne sent pas se réveiller en lui d'idées mélodieuses, et que réciproquement des idées qu'il entend exprimer ne lui rappellent pas leurs signes, on est fondé à dire qu'il ne connaît pas cette langue.

On confond trop souvent l'artiste avec le musicien. Ce sont deux choses toutes différentes; on peut être l'un sans l'autre, et la voix n'a, à cet égard, aucun privilége; elle a besoin d'être cultivée comme tout autre instrument. On peut, en sachant bien la musique, ne pas posséder les qualités qu'exige une agréable exécution; comme on peut, en ne la sachant pas, avoir une voix très-souple, très-sonore, et beaucoup de goût ; et c'est un préjugé de croire qu'il n'y ait que de belles voix qui soient capables d'apprendre la musique vocale toute voix en est capable', dès qu'elle chante juste la .gamme, ou seulement une moitié, de gamme, c'est-à-dire, le premier tétracorde ou le second, car ils se ressemblent exactement.

La voix se distingue entre les instrumens comme en étant un dont tout le monde sait jouer; par cette raison, il doit être antérieur aux autres dans une étude un peu bien ordonnée; et, comme chacun le porte avec soi, c'est celui qui est susceptible de la plus grande perfection, parce qu'on y peut faire le plus d'exercice. De combien de sentimens de l'ame n'est-il pas l'interprête, et dans quelles classes de la société, dans quelles situations de la vie n'est-il pas mis en jeu? C'est donc celui qui doit commander à tous. Il est le moyen immédiat que la nature nous donne pour exprimer nos idées et pour en rappeler le souvenir; il en est le premier signe, et c'est toujours à lui qu'elles se rapportent, par lui qu'elles se réveillent. Savoir un air, par exemple, c'est le savoir chanter, sans parler du bien ni du mieux. Le compositeur qui écrit ses pensées plume courante ne va pas en chercher les signes à tous les instrumens pour lesquels il écrit; c'est sa voix seule qui le dirige, comme il nous arrive à nous-mêmes quand nous écrivons une lettre (1).

yeux;

mais il

(1) Nous lisons et nous écrivons des est prouvé qu'alors la parole sert d'intermédiaire tacite, et que nous prononçons tout bas les mots que nous

Ainsi, puisqu'il en faut revenir à la musique vocale, dès qu'il s'agit d'écrire la musique, mieux valait commencer par elle. Il fallait donc, premièrement, mettre les signes écrits en rapport avec les sons de la voix, non avec les trous, les touches, les cordes des instrumens. La science du musicien est donc dans la musique vocale avant toute autre; c'est-à-dire, qu'elle est dans la musique, ce qui est assez évident.

Si l'on trouve peu de personnes en état de lire oralement la musique, on en voit bien moins qui soient en état de l'écrire, c'est-à-dire, d'écrire un chant sous la dictée d'un instrument, sans être obligées de faire au leur la même interrogation phrase par phrase. Aussi peut-on dire que le talent de celles qui atteignent à ce degré n'est pas tant le produit des méthodes d'enseignement, que celui de l'heureuse organisation et du travail de l'individu.

Quand on réfléchit qu'il n'est presque personne qui ne chante des poésies légères, personne qui ne retienne aisément en mémoire des

voyons. Même les personnes qui ont peu d'habitude sont obligées de faire un petit mouvement des lèvres. (Voyez là-dessus MM. DE DESTUTT-TRACY, ConDILLAC, etc.)

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