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J'ai dit dans l'usage, car, dans le fait, l'armure de nos clefs n'annonce point le mode mineur,

qu'on écrive devant la clef la note sensible; l'autre, que ce soit la médiante ou la tonique, ce qui revient parfaitement au même. Cependant la chose est inutile à ceux qui ne savent pas lire, et elle l'est encore à ceux qui savent. D'ailleurs, pourquoi feindre de dévoiler une énigme par une énigme? n'est-il pas plus simple d'en dire le mot, si l'on veut parler pour être entendu? Qu'on mette donc à la clef ce mot, majeur, ou celui-ci, mineur, si l'on tient à faire connaître le mode aux yeux un instant avant que la voix n'en décide. Il est même étonnant que cette dernière indication, franche et précise, soit exclue de la tête d'une pièce de musique, tandis qu'elle est admise, comme on sait, dans le courant de la modulation. De là cet embarras de règles qu'on donne aux élèves pour déterminer le mode, dont l'une est de regarder les accords d'harmonie quand il en est capable), mais dont la plus pauvre et la moins sûre est de regarder la dernière note de la pièce. Il est clair que ces règles ne sont que pour les yeux, qu'elles ne vont pas à l'esprit, et qu'elles sont dédaignées de ceux qui savent lire; mais leur existence prouve l'insuffisance des méthodes pour accoutumer l'oreille à la distinction des tons et des modes, et qu'on croit y suppléer en accoutumant les yeux à la distinction des purs signes qui représentent ces idées. C'est comme si l'on faisait lire à un enfant des mots d'une langue étrangère, pour la seule fin de les lui entendre articuler,

elle n'annonce rigoureusement que le mode majeur. Ainsi, quand on dit qu'un bémol à la clef constitue le ton majeur de fa, ou le mineur de ré, on énonce une fausse idée, puisqu'on ferait entendre que ces deux modes contiennent le même système de sons, ce qui ne saurait être, y ayant l'ut dièse dans le second mode qui n'est pas dans le premier, et au contraire l'ut naturel dans le premier qui n'est pas dans le second. C'est pour préserver mon élève de cette incorrection du langage, que j'ai dû établir, avec plus de précision qu'on n'a coutume de le faire, la distinction des deux modes majeur et mineur : le mode mineur, lui ai-je dit, contient, à sa sensible près, les mêmes sons que le majeur relatif. D'où il suit qu'en bémolisant la sensible du mode mineur (comme en faisant du sol dièse un sol bécarre), on entre sur la dominante du mode majeur relatif; et aussi qu'en diésant la dominante du mode majeur, on entre sur la sensible du mineur relatif.

Je regarde donc comme de fausses notions qu'on donne aux élèves, de leur dire qu'on descend la gamme mineure avec d'autres sons qu'on ne la monte. C'est les jeter dans l'indécision sur la composition de cette gamme. La gamme majeure a bien, quand on veut, le même pri

vilége, et ce privilége-là n'est autre chose qu'une modulation, c'est-à-dire, un changement de ton ou de mode. Ainsi, en faisant remarquer aux élèves

que le second tétracorde de la gamme mineure est sujet à de fréquentes variétés, on ne devrait pas se dispenser de leur dire que ces variétés diverses constituent autant de diverses modulations, et qu'il est absurde de les représenter comme appartenant toutes à la même gamme; ainsi de ces quatre variétés :

mi fa sol la,

mi fad sold la,

mi fad sol la,

mi fa sold la,

la première appartient incontestablement au mode majeur d'ut; la seconde, au mode majeur de la; la troisième, au mode majeur de sol (ou au mineur de mi); et la quatrième, seulement au mineur de la.

Ce qui engendre le mode mineur et le caractérise, ce n'est pas seulement l'altération de certains sons de la gamme naturelle, car cette altération peut n'amener qu'un changement de ton en conservant le mode le même, comme il arrive, par exemple, si l'on dièse le fa ou si l'on bémolise le si, etc.; mais c'est l'insertion

d'intervalles augmentés et d'intervalles diminués parmi les intervalles majeurs et mineurs. C'est là ce qui produit évidemment des impressions et des idées nouvelles que ne pouvait pas faire naître la gamme ordinaire, puisqu'elle ne contient que des intervalles majeurs et mineurs seulement. Ainsi, dans le mineur de la on trouve la septième diminuée sold fa, la quarte diminuée sold ut, et une seconde avec une quinte augmentées qui sont le renversement de ces deux intervalles. Voilà comment je prémunis mon élève contre l'erreur de ceux qui représentent la gamme mineure par ces deux systèmes de sons:

en montant la si ut ré mi fad sold la ;

en descendant la sol fa mi ré ut si la.

On ne peut pas mieux méconnaître le caractère ou mode mineur, qu'en le représentant de cette manière. On insère le fad, dit-on, pour adoucir la dureté de la seconde augmentée fa sold; et c'est justement cette seconde qu'on élimine, qui aurait caractérisé le mode.

Si, maintenant, je lui explique la succession des tons dans un morceau de musique, je le fais facilement par le plus grand nombre de notes communes que deux tons puissent avoir, ce qui rend la transition beaucoup plus douce

que s'ils en avaient moins. Par-là, il se rend aisément raison pourquoi à la sortie d'un ton on prend d'abord celui de la dominante ou de la sous-dominante, car il reste six notes communes, ou le plus qu'il y en puisse avoir, pour établir la liaison; il apprend que la modulation sur les notes communes, surtout aux trois notes d'accord parfait qui en font partie, sert à préparer l'entrée au nouveau ton, et à annoncer le dièse ou le bémol qu'il va contenir avant qu'on l'ait entendu sonner. Il s'explique de même pourquoi aux changemens de mode, sortant du majeur, on prend le mineur de la même base, ou celui de la sous-sensible; car le quintacorde de la base au mineur est tout composé de notes du majeur dans le second cas, ou n'a changé que sa médiante dans le premier tandis que le tétracorde, complément de la gamme, est en partie commun aux deux modes, sauf les altérations auxquelles le mineur est sujet dans sa sixième et septième notes.

cas,

Au point où nous en sommes parvenus, il manque peu de chose à mes élèves pour compléter leur instruction, sinon une pratique suffisante sur tout ce qui précède : c'est à quoi je consacrerai les quatre derniers mois de ce cours, en y comprenant aussi tout ce qui concerne la

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