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lui faire distinguer, dans le chant, deux espèces mesure, savoir mesure à trois et mesure à deux temps. Il m'a été facile de lui faire sentir la différence d'effet qu'elles produisent en écrivant un même air connu sous ces deux mesures : il a dès-lors attribué cette différence à ce que dans l'une de ces mesures un temps fort revient périodiquement frapper l'oreille de deux en deux coups, et que, dans l'autre, il ne revient que de trois en trois coups. Cependant cette différence lui parut d'abord si grande, l'air en étant totalement défiguré, qu'il lui cherchait d'autres causes, celle-là lui paraissant trop simple pour un tel effet; mais ce fut vainement, car il n'en trouvait ni dans l'intonation ni dans la durée des sons. Il fut donc en état de distinguer laquelle régnait de ces deux mesures dans tel chant que je lui faisais entendre; mais en même-temps il fit de lui-même la remarque que, si le chant est très-lent, les temps forts sont si éloignés l'un de l'autre, que l'oreille a perdu le souvenir du premier quand revient le second, et qu'alors la différence de rhythme étant à-peu-près nulle sous ce rapport, il doit être impossible de reconnaître, à cette marque, l'espèce de la mesure. Cette réflexion était juste; cependant je dus l'avertir que, même

dans ce cas, un musicien exercé reconnaîtrait encore si la mesure est à trois ou à deux temps, mais qu'il le ferait par de certaines règles de composition et de goût auxquelles chacune est soumise; par ce qu'on appelle la cadence des phrases, qui est comme le nombre dans le discours; par les retours, quelquefois périodiques, d'un même dessin; surtout par la correspondance des phrases musicales avec les phrases poétiques, quand l'air contient des paroles (1): au surplus, ceci ne faisant pas directement partie de ce cours, je dus m'y borner à quelques exemples.

Je lui fis aisément distinguer dans chaque temps les parties fortes et faibles, selon le même principe. Ceci le conduisit naturellement à une double manière d'exprimer les sixièmes, c'està-dire, six sons pour un temps; car ces sixièmes peuvent être des demi-tiers, et s'exprimer en

(1) On n'a même souvent que ce dernier recours pour découvrir la mesure, ou seulement les temps égaux de ces airs que chantent par cœur des personnes qui, ne sachant pas de musique, y négligent des fractions du temps sur les silences et les syncopes. On sent que ce n'est pas sous la dictée de telles personnes qu'on peut se vanter d'écrire un air quant à la mesure.

trois groupes de deux sons: ou bien ils peuvent être des tiers de moitié, et s'exprimer en deux groupes de trois sons ou triolets. Il comprit bientôt que les douzièmes pouvaient s'exprimer en trois façons, étant de trois espèces, comme on le verra plus loin.

Je viens aux signes de durée. Je considère que toute la musique ne roule que sur deux parties fondamentales, l'intonation et la mesure ce qu'on appelle broderies et goût de chant, trils, cadences, etc., n'est évidemment qu'un accessoire dépendant de l'une ou de l'autre. Or, il faut écrire le chant sous ces deux rapports; mais j'observe que l'élève, au point où je l'ai conduit, sait déjà l'écrire sous le premier rapport, et qu'il a divers moyens pour cela: 1.° les mots ut ré mi, etc.....; 2.° les points noirs écrits sur les barreaux de l'échelle et remplaçant les coups de baguette; 3.° les chiffres 1 2 3 4 5 6 7; 4.° les lettres a bcdefg, en posant, quand il le faut, de petits points par-dessus ou par-dessous, pour distinguer entr'eux les sons aigus et graves qui portent le même nom dans les diverses octaves (1). Je tiens à ce qu'il emploie indifféremment tous ces moyens, afin d'étendre la

(1) Voici, par exemple, trois octaves de sons en allant

sphère de ses idées, car on ne connaît bien ce qui est, on n'en apprécie au juste la valeur, qu'en le comparant à ce qui pourrait être sans cela.

du grave à l'aigu, avec la correspondance des mots aux chiffres et aux lettres :

ut ré mi fa sol la si | ut ré mi fa sol la si

| ut rẻ mi fa sol la si

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Rousseau n'employait pas le point d'une manière fixe, comme je le fais ici; il ne l'employait que pour annoncer le changement d'octave, quand le chant passait d'une octave à l'autre; de sorte que ce point venant de paraître sur une note pour avertir de la prendre dans l'octave supérieure, toutes les notes qui suivaient cellelà étaient censées dans la même octave qu'elle ( quoiqu'elles ne portassent aucun point), jusqu'à ce qu'un point contraire au premier les en eût fait descendre, qu jusqu'à ce qu'un autre point, placé dans le même sens, les eût élevées encore à l'octave suivante. Il résultait de ce système, qu'en prenant une note au milieu du chant, on ne pouvait pas dire de suite à quelle octave elle appartenait, sans recourir à tous les points antérieurement placés, dont il fallait faire des sommes et des différences. Aussi, sentant cet inconvénient, l'auteur avait cherché à l'atténuer, en plaçant une lettre en tête de chaque ligne de musique, laquelle indiquait à quelle

Mon élève n'a donc à apprendre l'écriture musicale que sous le second rapport, qui est celui de la durée. Entrons ici dans l'analyse approfondie de la pensée mélodique, pour en

octave appartenait la dernière note de la ligne précédente. Mais ceci ne faisait que changer la difficulté sans la détruire, puisqu'il fallait au moins faire le calcul pour la ligne où l'on se trouvait arrivé, aussitôt que l'on s'était égaré dans la lecture. Il paraît que J. J. avait cru diminuer de cette manière la quantité de points à placer par-dessus ou par-dessous les notes; mais il ne fit pas attention que le changement d'octave peut avoir lieu, dans le chant, aussi souvent que la permanence d'une même octave, et que ce qui lui semblait diminuer le nombre de points dans une occasion, devait l'augmenter dans une autre. Ainsi, par exemple, ce passage

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étant écrit à la manière de Rousseau, offrirait deux fois plus de points qu'on n'y en voit par la mienne; car il se présenterait ainsi :

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Il suit de là qu'il fallait d'abord pourvoir à la clarté de l'expression, sans s'embarrasser de la quantité de points à placer, qui d'ailleurs n'a aucune espèce d'inconvénient.

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