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à avoir le poing coupé les criminels déjà condamnés pour crime de sacrilége, de parricide ou de faux. Elle se prononçait seule, en vertu d'une déclaration de Louis XIV, du 30 juillet 1666, contre les blasphémateurs, qui, repris pour la septième fois, avaient la lèvre supérieure coupée, et la langue entière à la huitième récidive.

Aujourd'hui l'abcision n'est ordonnée que pour crime de parricide et celui de lèze-majesté.

ABDICATION. C'est ainsi qu'on appelait, en France, avant 1789, la renonciation d'un magistrat à sa charge, d'un abbé à son bénéfice, d'un évêque à son évêché, d'un militaire à son emploi, d'un prince à son autorité, comme Amédée, duc de Savoie, en 1434, et Charles IV, duc de Lorraine, en 1634. Depuis, les magistrats, les ecclésiastiques et les militaires, se sont démis de leurs emplois volontairement et quelquefois forcément. Des souverains qui ont régné sur la France, Napoléon est le seul qui ait abdiqué volontairement sa puis

sance.

On confond souvent l'abdication avec la résignation; il en faut cependant établir la différence: l'abdication se fait purement et simplement; la résignation se fait en faveur de quelqu'un : ainsi Auguste abdiqua le trône de Pologne, et Alphonse résigna celui de Portugal.

L'Abdication s'est encore dit de l'action d'un homme libre qui renonçait à sa liberté, et d'un citoyen romain qui renonçait à cette qualité et aux priviléges qui y étaient attachés.

Dans les pays qui admettent l'esclavage ou la servitude de la glèbe, le citoyen peut abdiquer sa liberté et devenir esclave volontaire, contrat illégal dont les Hébreux avaient adouci l'infamie en fixant la durée de ses effets.

Peu d'abdications furent un acte de vertu; peu de princes eurent le courage de s'exiler volontairement du trône : c'est presque toujours la peur d'en tomber, qui donne le courage d'en descendre.

Il faut plus qu'un roi, il faut un grand homme pour abdiquer sans crainte et sans faste. Pittacus abdique la souveraineté de Mitylène, effrayé de > voir Périandre devenir le tyran de Corinthe, après › en avoir été le père. » Sylla, dont le bonheur insulte à la Providence, abdique insolemment, et s'endort sur son épée brisée dans le sang qu'il a versé, en s'écriant:

J'ai gouverné sans peur et j'abdique sans crainte.

Plusieurs abdications ont été l'ouvrage d'une dure nécessité ou de la faiblesse. Dioclétien céda le trône aux manœuvres de Galère; et si cet empereur mérita des louanges, ce fut moins pour avoir quitté l'empire, que pour ne l'avoir pas regretté.

Charles-Quint, fatigué de la prospérité de ses ennemis, abdique son pouvoir avec une fastueuse indifférence : « Il y a aujourd'hui un an, disait le » cardinal de Granville, que l'empereur abdiqua.

Il y a aujourd'hui un an qu'il s'en repent, répondit Philippe II, son fils.

Cette réponse est le mot de l'énigme de toutes les abdications. On peut l'appliquer à Christine :

à peine descendue du trône, elle le regrette, elle redemande celui de Suède et convoite celui de Pologne.

En général, on peut assurer que l'abdication n'est que l'abandon du pouvoir qu'on ne peut plus conserver; ainsi Auguste abdique le trône de Pologne sous l'épée de Charles XII, et il y remonte après la mort de son ennemi. C'est quelquefois une vaine cérémonie : Stanislas Leczinski, abdiquant deux fois une couronne qui ne s'était jamais reposée sur sa tête, en offre un exemple. Mais il est de fait qu'on n'abandonne pas sans peine, et sans éprouver tous les tourmens d'une ambition déçue, un trône qu'on croyait pouvoir transmettre à ses descendans.

On est aussi convenu, en politique, d'appeler abdication la fuite de Jacques II, chassé d'Angleterre par le peuple, et celle de Henri III, abandonnant la Pologne, pour venir en France y succéder à Charles IX: Gustave IV abdique, le 14 mars 1809, le trône de Pologne; il avait été dépossédé le 13. Ce mot d'abdication n'est qu'un voile apparent, couvrant une nécessité cachée de descendre du trône. Dans les pays livrés à la superstition, la peur de l'enfer peut quelquefois l'emporter sur l'ardeur de régner. Philippe V et Amurath II quittèrent le pouvoir pour vivre avec des moines et des derviches; mais bientôt le dégoût des derviches et des moines les replaça sur le trône.

Il est peu d'exemples d'une abdication véritable et solennelle, et l'on ne doit pas donner ce nom aux dépositions des princes qu'on forçait de des

cendre du trône, pour être enfermés dans un couvent; il est incontestable que l'abdication n'est que l'avant-scène d'une déposition, et que les princes n'acceptent la première que pour éviter la seconde. Les abdications de Pierre III, de Charles IV, de Ferdinand VII, de Gustave IV, du roi de Sardaigne, de Napoléon, de Louis, de Joseph, de Joachim, en sont un témoignage authentique.

Ce n'est pas sur deux feuilles de papier, c'est dans la retraite de Moscou que se trouve l'abdication de Napoléon, en 1814; c'est dans le désastre de Mont-Saint-Jean que fut écrite l'abdication ou plutôt la résignation de 1815; et pour connaître quels devaient être les effets de ces deux renonciations, ce ne sont pas les actes écrits qu'il faut consulter, mais les résultats inévitables de ces deux grandes catastrophes militaires.

En dernier résultat, un prince qui abdique ne renonce pas volontairement au pouvoir, qui l'assimile, pour ainsi dire, à un dieu; il doit éprouver toutes les souffrances qui déchirent une âme ambitieuse, et on ne pourra jamais lui appliquer ce beau vers de Corneille :

Et monté sur le faîte, il aspire à descendre.

Les deux abdications de Napoléon établissent, d'une manière positive, les différences qui existent entre les mots abdication et résignation, et peuvent offrir en même temps un modèle de ces sortes d'actes de haute politique pénale; je vais les rapporter en entier.

« Les puissances alliées ayant proclamé que

T. I.

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» l'empereur Napoléon était le seul obstacle au ré>>tablissement de la paix en Europe, l'empereur Napoléon, fidèle à son serment, déclare qu'il re» nonce, pour lui et ses héritiers, aux trônes de » France et d'Italie, et qu'il n'est aucun sacrifice » personnel, même celui de la vie, qu'il ne soit prêt » à faire à l'intérêt de la France.

D

» Fait au palais de Fontainebleau, le 11 avril » 1814. Signé NAPOLEON.

D

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Pour copie conforme:

Signé Dupont (de Nemours), secrétaire du » gouvernement provisoire.

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« Palais de l'Élysée, 22 juin 1815.

Français, en commençant la guerre pour sou» tenir l'indépendance nationale, je comptais sur » la réunion de tous les efforts, de toutes les vo

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lontés, et le concours de toutes les autorités nationales; j'étais fondé à en espérer le succès, et »j'avais bravé toutes les déclarations des puissan

D

» ces contre moi.

>> Les circonstances paraissent changées : je m'of>> fre en sacrifice à la haine des ennemis de la France. » Puissent-ils être sincères dans leurs déclarations, >> et n'en avoir jamais voulu qu'à ma personne! » Ma vie politique est terminée, et je proclame » mon fils, sous le titre de Napoléon II, empereur » des Français.

>> Les ministres actuels formeront provisoire>ment le conseil du gouvernement; l'intérêt que » je porte à mon fils, m'engage à inviter les Cham» bres à organiser sans délai la régence par une loi.

« FöregåendeFortsätt »