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longtemps la régie sarde avait cessé de se servir du sel de Venise. Aussi, un des cantons suisses, le Tessin, ayant demandé au cabinet de Turin le libre passage du sel à travers les États sardes, le gouvernement du roi Charles-Albert accéda à cette juste demande. Mais le cabinet de Vienne regarda cette concession comme une infraction à l'ancienne convention de 1751, renouvelée en 1815, et il ordonna à son ambassadeur près la cour de Sardaigne d'adresser au cabinet de Turin ses réclamations à cet égard.

Le gouvernement sarde répondit à la note diplomatique de l'ambassadeur autrichien avec une très-grande réserve, mais en même temps il déclara persister dans sa résolution.

Aussitôt après, le conseil aulique, par un arrêté à la date du 20 avril, frappa les vins piémontais, à l'entrée en Lombardie, d'un droit prohibitif. Jusqu'alors les vins piémontais payaient, à l'entrée dans le royaume lombardo-vénitien, 9 livres 20 autrichiennes l'hectolitre, auxquelles il fallait ajouter 3 livres, droit perçu par l'octroi particulier de la ville de Milan. Par l'arrêté nouveau, ce droit fut élevé à 21 livres 10, ce qui établissait une augmentation de 12 livres par hectolitre.

Fallait-il voir là un acte de représailles? On le crut, et on pensa que, par un décret qui réduisait considérablement les droits perçus jusqu'alors sur les eaux-de vie, sur le sucre raffiné, sur les fruits verts, sur les objets de mode et de luxe, sur la porcelaine, le gouvernement sarde avait voulu, en réponse aux représailles autrichiennes, entrer dans la voie des réformes commerciales et ouvrir à l'influence française la porte d'un pays où n'avait jusqu'à cette heure régné que l'influence autrichienne. On alla jusqu'à parler d'une rupture imminente entre les deux pays, et à expliquer par la crainte des idées libérales du gouvernement sarde les mesures prohibitives arrêtées par l'Autriche.

Mais, si en effet la Sardaigne s'avance prudemment vers de sages progrès, il n'en est pas moins vrai que jamais son gouvernement n'avait pu concevoir l'idée de se faire, en Italie, le représentant de principes révolutionnaires, et que les espérances

insensées nées d'un conflit momentané entre les deux puissances ne se réaliseraient pas tant que la pensée ferme et modérée tout à la fois qui dirige la Sardaigne vivrait dans son souverain actuel. On s'était trop hâté de voir dans les concessions faites à la France une menace à l'adresse de l'Autriche il n'y avait que l'exécution d'un traité conclu avec le gouvernement français.

En vertu des stipulations du traité de commerce du 28 août 1843 (art. 2), la Sardaigne s'était engagée à réduire les droits d'importation sur les eaux-de-vie, sur les articles de mode, sur les vins et sur les porcelaines de France.

Quant au différend qui avait servi de prétexte à ces insinuations, il ne put tenir contre les intentions bienveillantes des deux cabinets l'un envers l'autre. Cédant au vœu du gouvernement autrichien, le roi de Sardaigne accepta la proposition de nommer, pour arriver à une solution satisfaisante, une commission mixte composée des plénipotentiaires des deux puissances.

TOSCANE.

Ce sont des réformes que présente aussi l'histoire de la Toscane.

Déjà, il y a deux ans, S. A. R. le grand-duc de Toscane avait réorganisé l'Université de Pise de manière à en faire le premier établissement de ce genre en Italie; il voulut compléter son œuvre, en mettant en harmonie les différents degrés de l'instruction publique avec le développement de la science et les progrès de la société civile.

Deux ordonnances furent rendues à cet effet, le 3 décembre. La première ordonnait la formation d'une commission supérieure chargée de proposer un plan de réforme, dit des degrés inférieurs de l'instruction publique, de procurer à chaque classe de la population les moyens les plus étendus de s'instruire, et de répandre, autant que possible, l'enseignement élémentaire parmi le peuple. La commission commencerait ses travaux en rendant compte de l'état actuel de l'enseignement dans les

écoles de garçons, et en examinant les méthodes d'enseignement pratiquées. Elle proposerait ensuite un plan complet d'écoles élémentaires, secondaires et supérieures, à fonder dans les diverses localités, depuis le dernier bourg jusqu'aux villes principales, et de manière à créer un enseignement graduel depuis l'instruction élémentaire jusqu'au passage de la jeunesse à l'Université. Enfin, la commission examinerait la question de savoir dans quelles limites l'instruction publique doit être gratuite, dans quelles circonstances l'enseignement supérieur peut être assujetti à des taxes modérées, et quelles sont les garanties que le gouvernement a le droit d'exiger de ceux qui se vouent à la profession d'instituteur.

La seconde ordonnance du grand-duc de Toscane établissait la création d'une école normale théorique et pratique, destinée à la formation d'instituteurs habiles et capables. Les fonds nécessaires à cet objet seraient prélevés sur les économies de l'ordre royal de Saint-Étienne.

Quoique la nouvelle école normale fût placée sous le patronage honoraire de l'ordre de Saint-Étienne, elle formerait une dépendance de l'Université de Pise, serait présidée par un recteur, et dirigée par un chef des études et deux adjoints. Pour être admis à l'école normale, il faudrait produire le degré de licencié dans une des Facultés de philosophie ou théologie du grand-duché.

Outre les élèves internes, il y aurait des agrégés destinés à l'enseignement des mathématiques et des sciences naturelles. La durée des études de l'école normale ne pourrait être audessous de trois ans. L'école serait ouverte à 'dater du 19 novembre 1847.

Une loi publiée le 13 novembre décida qu'à partir du 1er mars 1847, les droits d'ancrage ou tonnage seraient augmentés, dans les ports de la Toscane, d'environ 33 pour 100. Ces droits seraient élevés à une demi - livre toscane par tonneau pour tous les bâtiments d'un port supérieur à 50 tonneaux, au lieu d'un tiers de livre payé jusqu'alors. Les autres droits de

port et de lazaret restaient les mêmes à peu de choses près. Cette augmentation de droit de tonnage absorbait presque tous les avantages que les Russes avaient obtenus par le traité avec la Toscane, et qui les avaient assimilés, quant au payement de ces droits, aux navires nationaux, en faveur desquels les nouveaux droits ne seraient toujours que de la moitié de ceux payés par les navires étrangers.

Ce nouveau règlement de navigation éleva, dans la proportion suivante, les droits perçus dans les ports du grandduché :

Pour les navires de 1 à 10 tonneaux, l'augmentation du droit d'ancrage serait de 50 pour 100; pour ceux de 10 à 15 tonneaux, de 170 pour 100; de 15 à 20, 60 pour 100; de 20 à 25, 221 pour 100; de 25 à 50,175 pour 100; de 30 à 40, 130 pour 100; de 40 à 50, 125 pour 100; de 50 à 60, 52 1/2 pour 100; de 60 à 70, 20 pour 100; de 70 à 80, 25 pour 100; de 80 à 95, 25 pour 100; de 95 à 110, 28 1/2 pour 100; de 110 à 115, 30 pour 100; de 115 à 150, 37 1/2 pour 100; de 150 à 175, 36 1⁄2 pour 100; de 175 à 200, 33 1/2 pour 100. Au-dessus de 200 tonneaux, l'augmentation serait de 25 pour 100.

La portée de cette mesure était révélée par une disposition établissant que ces droits seraient réductibles de moitié pour les navires toscans et ceux des nations avec lesquelles la Toscane est liée par des traités de réciprocité. C'était un appel direct fait aux États qui n'ont point encore de traité de navigation avec le duché, notamment la France et l'Autriche. Le gouvernement français était mis ainsi en demeure d'étendre au pavillon toscan le traitement du pavillon national, mesure qui aurait pour effet de diminuer, au profit de la marine française, la part du pavillon tiers dans l'intercourse des deux pays.

DEUX-SICILES.

Suivant l'exemple si heureusement donné à l'Italie par le nouveau pape Pie IX, S. M. le roi des deux-Siciles rendit, quel

ques jours après la publication du décret d'amnistie par le souverain pontife, un décret en vertu duquel étaient et demeuraient abolies les commissions militaires créées par l'ordonnance du 28 mai 1826, pour juger les délits politiques, qui dorénavant seraient déférés aux tribunaux ordinaires.

La reine de Naples accoucha, le 12 janvier, d'un prince qui fut baptisé le même jour et qui reçut les noms de Gaëtan-MarieFrédéric. Le prince nouveau-né fut tenu sur les fonts baptismaux par le comte d'Aquila, représentant dans cette cérémonie l'archiduc Frédéric d'Autriche. Le titre qui lui fut assigné fut celui de duc de Girgenti. A l'occasion de cet heureux événement, le roi de Naples accorda une amnistie pleine et entière pour les contraventions et délits, et partielle pour les crimes.

DUCHÉ DE MODÈNE.

La mort du duc de Modène appela, cette année, l'attention sur ce petit État, qui reste d'ordinaire en dehors des préoccupations politiques de l'Europe. Le duc François IV, archiduc d'Autriche, prince royal de Hongrie et de Bohême, fils de l'archiduc Ferdinand, avait pour héritier son fils, François-Ferdinand; il régnait depuis le 8 juin 1815.

Le duché de Modène, placé au centre de l'Italie, entre le royaume lombardo-vénitien, le duché de Parme, le grandduché de Toscane et les États de l'Église, renferme une population de 510,093 âmes; son revenu est évalué à 5 millions, et sa dette à 1 million et demi. Réuni, en 1803, à la république cisalpine, il fut reconstitué en 1814, et l'article 98 de l'acte général du congrès de Vienne rendit à l'archiduc François d'Este les duchés de Modène, de Reggio et de Mirandole, et à sa mère, l'archiduchesse Béatrice, le duché de Massa, la principauté de Carrara et les fiefs impériaux de la Lunigiana, en réservant toutefois les droits de réversion établis dans les branches des archiducs d'Autriche. Par suite de la mort de l'archiduchesse, ces derniers districts furent réunis au duché le

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