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conséquent sujet à tous les règlements que son gouvernement trouve convenable d'y établir.

D'un autre côté, les puissances intéressées dans la libre navigation de la rivière soutinrent que les stipulations du traité de Paris, 1814, par lesquelles la Hollande, placée sous la souveraineté de la maison d'Orange, devait recevoir un accroissement de territoire, et en même temps la navigation sur le Rhin devait être libre « du point où il devient navigable jusqu'à la mer, et réciproquement, » étaient inséparablement liées ensemble dans l'intention des puissances alliées parties contractantes à ce traité. Cette intention fut remplie par le congrès de Vienne, qui décida l'union de la Belgique à la Hollande, et confirma la liberté de la navigation du Rhin comme une condition de cette augmentation de territoire qui avait été acceptée par le gouvernement hollandais. Le droit de libre navigation sur la rivière, disait-on, implique nécessairement le droit de faire usage des eaux diverses qui l'unissent avec la mer; et l'expression jusqu'à la mer pourrait être regardée sous ce rapport comme l'équivalent du terme dans la mer. La prétention donc du gouvernement néerlandais de lever des droits sur les passages principaux de la rivière dans la mer rendrait parfaitement inutile aux autres états le privilége de naviguer sur le Rhin dans les limites du territoire des Pays-Bas 1.

Après une négociation prolongée, cette question fut enfin décidée par la convention conclue à Mayence, le 31 mars 1831, entre tous les états riverains du Rhin, d'après laquelle la navigation de ce fleuve fut déclarée libre depuis le point où il devient navigable jusque dans la mer (bis in die See), en y comprenant ses deux principales embouchures dans les limites du royaume des Pays-Bas, le Leck et le Waal, comme prolongation du Rhin, en passant par Rotterdam et Briel par le

1 Annual Register, 1826, vol. LXVIII, pp. 259–263.

premier de ces passages, et par Dortrecht et Helvoetsluys par le dernier, avec le droit de faire usage du canal de Voorne pour communiquer avec Helvoetsluys. Dans ce traité il est stipulé, de la part du gouvernement néerlandais, que dans le cas où les passages à la mer par Briel ou Helvoetsluys deviendraient innavigables, par suite des causes naturelles ou des obstructions artificielles, ce gouvernement est tenu à indiquer d'autres communications aussi commodes que celles qui sont ouvertes à ses propres sujets. Cette convention contient aussi des règlements détaillés pour le maintien de la police de la rivière, et pour fixer le tarif des droits à prélever sur les vaisseaux et les marchandises passant à travers le territoire néerlandais, en allant à la mer, ou en revenant, pour remonter le fleuve, comme aussi par les divers ports des états riverains du Haut-Rhin 1.

Les principes soutenus par le congrès de Vienne au sujet de la navigation des grands fleuves de l'Europe avaient déjà donné lieu à de graves discussions entre le gouvernement des États-Unis d'Amérique et celui de l'Espagne, à l'époque où les deux rives du Mississipi appartenaient encore à cette puis

sance.

Par le traité de paix signé à Paris en 1763, entre l'Angleterre, la France et l'Espagne, le Canada fut cédé à l'Angleterre par la France, et la Floride par l'Espagne; la frontière entre les possessions anglaises et françaises fut alors établie par une ligne imaginaire tracée par le milieu du Mississipi, depuis sa source jusqu'à l'Iberville, et à travers ce dernier fleuve et les lacs Maurepas et Pontchartrain jusqu'à la mer. Le droit de navigation du Mississipi fut accordé aux Anglais dans toute son étendue, sans qu'ils fussent soumis à aucun payement. Peu après, la Louisiane fut cédée à l'Espagne par la France, et par le traité de Paris de 1783 la Floride fut rendue à l'Espagne.

1 MARTENS, Nouveau recueil, vol. IX, p. 252.

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— DEPUIS LA RÉVOLUTION FRANÇAISE En attendant, l'indépendance des États-Unis avait été reconnue, et la navigation du Mississipi fut permise à leurs citoyens par le traité qui fut conclu entre eux et l'Angleterre. Mais l'Espagne, qui possédait les deux rives du fleuve à son embouchure, et même plus haut que son embouchure, prétendit avoir un droit exclusif à la navigation depuis l'embouchure jusqu'au point où la frontière méridionale des États-Unis touchait le fleuve. Les États-Unis résistèrent à cette prétention, et soutinrent leur droit de participation dans la navigation du Mississipi, se fondant pour cela sur les traités de 1763 et de 1783, aussi bien que sur le droit naturel et le droit des gens. Les discussions entre les deux gouvernements furent terminées par le traité de 1795, signé à San-Lorenzo el Real, qui déclara (art. 4) que la navigation du Mississipi serait libre dans toute sa largeur et dans toute sa longueur pour les citoyens des États-Unis, et dont le 22o article leur permit de déposer leurs marchandises dans le port de la NouvelleOrléans et de les exporter de là, sans payer d'autre droit que le loyer des dépôts. L'acquisition que les États-Unis firent dans la suite de la Louisiane et de la Floride ayant renfermé le fleuve tout entier dans le territoire de la république, et la stipulation qui assurait aux sujets de la Grande-Bretagne la navigation du Mississipi (traité de 1783) n'ayant pas été renouvelée dans le traité de Gand de 1814, le droit de navigation sur le Mississipi appartient maintenant exclusivement aux États-Unis.

Le droit qu'avaient les États-Unis de participer avec l'Espagne dans la navigation du Mississipi avant l'acquisition de la Louisiane, reposait, selon le gouvernement américain, sur un principe profondément gravé dans le cœur de l'homme, à savoir que l'Océan est ouvert à tous les hommes et que les fleuves le sont à tous leurs riverains. L'autorité de ce droit naturel était encore augmentée par le fait qu'il était reconnu par presque tous les états qui permettaient aux habitants

étrangers des rives d'un fleuve qui se trouvait en partie dans leurs états, de naviguer librement sur ce fleuve; et quand il arrivait que les habitants de la partie inférieure du fleuve s'opposaient à ce que les habitants de sa partie supérieure y naviguassent, ce n'était qu'un triomphe du plus fort sur le plus faible, et qui était par suite condamné par la société en général. Le fait, alors récent, de la tentative que fit l'empereur Joseph II pour rendre la navigation libre sur l'Escaut, depuis Anvers jusqu'à la mer, était regardé comme une preuve de l'unanimité des opinions sur ce sujet, puisque personne hors de la Hollande ne soutenait les prétentions d'Amsterdam, et que là même on s'appuyait, pour les défendre, plutôt sur des traités que sur le droit naturel. A proportion que les possessions des habitants de la partie supérieure du fleuve sont grandes par rapport à celles des habitants de la partie inférieure, le droit des premiers doit nécessairement l'emporter davantage sur celui des derniers. Les États-Unis possédaient 600,000 milles carrés de territoire sur les bords du Mississipi et de ses affluents, tandis que le territoire des Espagnols n'avait pas la millième partie de cette étendue. Cependant le fleuve était la seule voie que pouvaient prendre les marchandises américaines, et, pour dire la vérité, le transport de ces marchandises ne pouvait non-seulement pas nuire à la population espagnole, mais pouvait même servir à améliorer sa condition. Les vrais intérêts de tous les habitants des rives du fleuve s'accordaient donc parfaitement avec leurs droits.

Le gouvernement américain soutenait que quand même la partie du fleuve comprise entre la Floride et la Louisiane appartiendrait exclusivement à l'Espagne, les habitants de la partie supérieure du fleuve n'en auraient pas moins le droit de naviguer librement le long de ses rives. Ce ne serait en effet qu'un droit imparfait, puisque sa pratique devait nécessairement être subordonnée aux intérêts de la nation qui habitait

ces rives; mais ce serait pourtant un droit, et un droit incontestable, et si on s'y opposait, ou si, par des règlements inutiles, on l'entravait tellement qu'il ne fût plus d'aucune utilité pour les États-Unis, ce gouvernement serait justifié en demandant réparation d'une pareille injustice. L'Espagne ne possédait qu'une si petite portion de terre habitable sur les deux rives du fleuve au-dessous de la frontière américaine, que cela pouvait, à vrai dire, être regardé comme une partie de terre s'avançant dans la mer; car quoique l'on comptât quatrevingt lieues de cette frontière jusqu'à l'embouchure du fleuve, ce n'était pourtant qu'en de certains endroits que la terre était assez élevée pour être à l'abri des fréquentes inondations. Il n'y avait donc qu'un si petit nombre d'habitants (qui n'avaient guère la chance d'augmenter) sur les rives du fleuve, que la navigation la plus libre pouvait être tolérée sans leur porter préjudice 1.

Il était essentiel pour les deux parties intéressées que la libre navigation du Mississipi fût établie sur les mêmes bases que l'avait voulu le traité de Paris, c'est-à-dire dans toute sa largeur. En effet, sans ce droit, la navigation du fleuve eût été également impossible aux Américains et aux Espagnols; car le Mississipi est extrêmement irrégulier dans son cours, et le seul moyen de le remonter est de le traverser tantôt d'un côté et tantôt de l'autre, profitant ainsi des nombreux remous qui se trouvent dans les tournants du fleuve.

C'est un principe que le droit à une chose donne droit aussi aux moyens sans lesquels cette chose deviendrait inutile. Ainsi le droit de naviguer sur un fleuve entraîne aussi de toute nécessité le droit de jeter l'ancre sur ces rives, et d'y aborder en cas de sinistres ou pour tout autre motif. Ce prin

1 Les autorités sur lesquelles on s'appuyait étaient les suivantes: GROTIUS, De J. B. ac pacis, lib. II, cap. 2, § 11—13, et 3, § 7-12. PUFFENDORFF, lib. III, cap. 3, §§ 3-6. WOLF, Inst., SS 310-312. VATTEL, liv. I, § 292, liv. II, §§ 123-139.

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