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puissances qui l'ont signée, était, suivant lui, la meilleure garantie de la continuation de cette paix.

Sir Robert Peel répondit à ce discours, que les obligations imposées par le traité de la quadruple alliance étaient de fournir des armes à l'Espagne, de laisser réparer les vaisseaux espagnols dans les ports anglais, et, si les circonstances l'exigeaient, d'assister l'Espagne au moyen d'une force navale. Quant à cette dernière obligation, on reconnaîtrait sans doute que quoiqu'elle fût réellement stipulée par le traité, le droit des gens en rendait l'accomplissement extrêmement difficile. A moins d'une déclaration de guerre, l'obligation spéciale d'un secours naval ne pourrait être exécutée, sans violer directement les lois généralement reconnues entre les nations. Prenez pour exemple une nation neutre qui aurait besoin d'armes, ou qui voudrait faire le trafic des armes. Quels que fussent les engagements particuliers du gouvernement anglais, ils ne pouvaient lui donner le droit d'entraver les entreprises de ses propres sujets, et d'empêcher cette nation neutre de recevoir des armes. Mais sans une déclaration de guerre bien positive, on n'avait non plus aucun droit d'arrêter sur mer les vaisseaux d'un pays neutre. Cette difficulté, que tout le monde comprendrait, et qui était vivement sentie par le ministère sous lequel le traité de quadruple alliance avait été signé, aussi bien que par le dernier cabinet, était ce qui avait déterminé celui-ci à borner son assistance à un envoi d'armes; non qu'il reculât devant les stipulations du traité, mais à cause des obstacles que le cabinet précédent avait également trouvés insurmontables. Il comprenait bien que la reine d'Espagne avait les mêmes droits que tout autre allié de l'Angleterre à être secourue par ce pays. Elle avait été reconnue, peu importe par quel ministère; car le premier principe de tout gouvernement, principe inculqué par l'honneur et l'intérêt du pays, c'est que les engagements pris par un ministère quelconque soient respectés par celui qui lui succède, quoique

d'un parti opposé; et c'est pour cela qu'il aurait trouvé l'administration dont il faisait partie inexcusable de s'être dérobée aux obligations de la quadruple alliance et de ne pas les exécuter d'une manière loyale, honorable et juste. Mais, après cette déclaration, il lui serait permis de contester la politique d'un acte particulier, qui, pour la première fois dans l'histoire moderne de l'Angleterre, admettait une intervention directe dans les affaires intérieures d'une autre nation. Le ministre des affaires étrangères avait établi que les intérêts permanents de l'Angleterre étaient liés à l'affermissement du trône de la reine d'Espagne. Mais il avait poussé trop loin l'induction qu'il tirait de cette position. Quelle limite peut-on mettre à un tel principe? Quelle nation n'y trouverait pas un prétexte pour s'immiscer dans les affaires domestiques des autres? Le principe général, suivi jusqu'à présent par l'Angleterre, était celui de la non-intervention. Sir Robert Peel admettait, cependant, qu'il pouvait avoir des exceptions dans des cas particuliers, soit à cause du voisinage immédiat, soit à cause de circonstances d'une nature critique et d'un intérêt urgent. Mais venir dire que pour la protection et le développement des intérêts anglais, il nous faut coopérer activement à l'établissement ou au maintien d'une forme quelconque de gouvernement dans un pays situé comme l'était l'Espagne, ce serait détruire la règle générale de non-intervention, et mettre l'indépendance de chaque état faible à la merci de ses voisins puissants. Il demandait ce qui, dans ce cas, empêcherait les puissances du Nord, sous le prétexte de leurs intérêts à défendre, d'intervenir de même à main armée? On dirait peut-être que l'expédition sanctionnée par le gouvernement anglais n'était pas une intervention directe dans les affaires intérieures de l'Espagne. Mais comment pourrait-on nier que la permission accordée à des sujets anglais d'entrer au service militaire d'une puissance étrangère, et de s'organiser en Angleterre, était une intervention armée pour aider cette puissance contre

une insurrection de ses propres sujets? Pendant la discussion sur le bill des enrôlements étrangers, on objectait contre la clause qui autorisait le roi de suspendre l'exécution de la loi par ordre du conseil, que s'il n'y avait pas de pareille loi, les sujets seraient libres de s'enrôler au service militaire d'un pays étranger, sans donner lieu de s'en plaindre auprès du gouvernement anglais; tandis que si la couronne était autorisée à suspendre l'exécution de la loi à l'égard d'une nation belligérante quelconque, le gouvernement pouvait être censé avoir envoyé lui-même l'expédition en question.

Lord Palmerston, dans sa réplique, disait que le dernier orateur ayant concédé que la foi nationale était engagée à l'exécution du traité de quadruple alliance, il demandait la permission de rappeler à l'attention de la chambre les circonstances qui avaient accompagné la signature de ce traité. Don Carlos et dom Miguel étaient alors en Portugal. Les prétentions de don Carlos au trône d'Espagne avaient été rejetées par une autorité regardée par toute l'Europe comme suffisante à déterminer la question. L'Angleterre avait ensuite reconnu le droit de l'infante Isabelle à la couronne de l'Espagne. A cette époque le gouvernement espagnol avait l'intention d'envoyer des forces militaires en Portugal, avec le consentement du gouvernement portugais, pour expulser de ce royaume don Carlos, qui s'occupait à organiser une armée pour envahir l'Espagne. Les deux puissances de la Péninsule étant d'accord sur cet objet, il devenait nécessaire de consigner cet accord dans une convention, et il fut jugé expédient que les gouvernements anglais et français donnassent leur adhésion à cet arrangement. Le quadruple traité fut conclu en conséquence, et son objet immédiat, comme il est énoncé dans le préambule, était le rétablissement de la paix partout dans la Péninsule; et le moyen d'atteindre cet objet fut déclaré être l'expulsion des infants don Carlos et don Miguel du royaume de Portugal. Il était donc évident que, malgré que

le traité était limité dans son opération immédiate au territoire portugais, son but ultérieur était la pacification de toute la Péninsule. Lors du retour de don Carlos en Espagne, on jugea nécessaire de rédiger des articles additionnels au traité pour répondre à ce nouvel incident. D'après le 2e de ces articles, «Sa Majesté le roi du royaume-uni de la Grande-Bretagne et de l'Irlande s'engage à fournir à Sa Majesté Catholique tous les secours d'armes et de munitions de guerre que Sa Majesté Catholique pourra réclamer, et en outre à l'assister avec des forces navales, si cela devient nécessaire.» En commentant cette stipulation, lord Palmerston disait que tous les publicistes étaient d'accord sur le principe, qu'un gouvernement, qui stipulait de cette manière à fournir des armes à un autre, était censé prendre une part active à la lutte dans laquelle ce dernier se trouvait engagé; et la stipulation d'aider la reine d'Espagne avec des forces navales, démontrait encore plus fortement ce même principe. Si donc on objectait à l'ordre du conseil qu'il identifiait le gouvernement anglais avec la cause du gouvernement actuel de l'Espagne, il répondrait que cet effet avait déjà été produit par les articles additionnels du quadruple traité. Quant à ce qu'on avait allégué du danger d'établir un précédent pour justifier l'intervention d'autres puissances, il ferait seulement observer que l'intervention de l'Angleterre était fondée sur un traité destiné à soutenir les droits d'une souveraine reconnue par les autorités compétentes du pays qu'elle gouvernait. Dans le cas d'une guerre civile, provenant d'une succession contestée, ou d'une révolte de longue durée, nul publiciste ne niait le droit des autres puissances de s'allier à une des parties belligérantes suivant leur convenance. Sans doute l'exercice de ce droit doit dépendre des circonstances. Mais le droit était général pour tous les états qui voulaient l'exercer. Un état pouvait soutenir une des parties belligérantes, un autre état pouvait s'adjoindre à la partie opposée, et tous les deux devaient agir en pleine

connaissance des suites possibles de leurs déterminations. Il soutenait donc que la mesure en question n'était établie sur aucun nouveau principe, et qu'elle n'entraînait aucun danger comme précédent. Chaque cas devait être déterminé d'après les considérations de prudence qui lui étaient applicables. Dans le cas actuel, il maintenait seulement que la mesure en question était parfaitement en accord avec l'esprit des engagements que le gouvernement anglais avait contractés, qu'elle n'était fondée sur aucune innovation dans les principes, et qu'elle était justifiée par le droit des gens généralement reconnu 1.

$ 27. Intervention des cinq puissances dans la

révolution'

Nous avons déjà expliqué comment les cabinets anglais et français avaient soutenu le droit d'intervenir, comme parties contractantes aux traités de Vienne, dans les affaires du royaume de Pologne et de la ville libre de Cracovie, et que le belge de 1830. cabinet anglais, en refusant d'intervenir, même avec ses conseils, dans la question des décrets de la diète germanique de 1832, avait fait ses réserves quant au droit. C'était seulement par des considérations de politique, de prudence, et d'opportunité, que ces deux gouvernements furent déterminés à se désister de l'exercice du droit d'intervention comme étant applicable à ces questions 2.

Les négociations qui ont eu lieu par l'entremise de la conférence de Londres, par suite de la révolution belge de 1830, présentent des exemples frappants de l'application de ce droit pour conserver la paix générale, et concilier, autant que possible, le nouvel ordre de choses avec les stipulations des traités de Paris et de Vienne. Ces négociations ayant apporté des changements notables aux transactions de 1814 et 1815, nous allons en donner une analyse succincte.

1 HANSARD, Parliamentary history (Third series), vol. XXVIII, pp. 1433-1163.

2

Voyez § 13, pp. 122-432, § 14, pp. 157-172.

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