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recouvrer argent. Ce neanmoings, balançant l'utillité et profict éminent que je y auray et mes subjectez, lequel est trop plus grand, et augmentera tousjours davantage, j'ay commandé ledict edict de suppression pour estre depesché au plus tost.

« L'autre et second poinct, mon frère, n'est de moindre considération : j'ay ordonné à mes secretaires d'Estat, trésoriers de l'espargne, et autres qu'il appartiendra, ne depescher par cy après aucun office ny bénéfices dont il leur sera baillé mémoire ou placet, sinon trois mois après, et me faire chascun pour son regard ung rolle desdicts mémoires ou placets, lequel ilz rapporteront au terme susdit pour estre leu, et faict la distribution de ce qui s'y retrouvera. J'ay faict ladite ordonnance à deux fins, premièrement pour remédier à une confusion qui est ordinaire en la distribution d'iceux offices et bénéfices, lesquelz sont bien souvent donnez et commandez à diverses personnes, qui engendre un monde de mécontentementz et importunitez; l'autre affin de me réserver un moien de récompenser et gratiffier ceux lesquelz exposent touts les jours leurs vies, et consumment leurs biens, mesmement près de vous pour me faire service, et non les donner à ceulx qui les courent plus viste et en donnent les premiers advertissementz, d'autant qu'il advient bien souvent estre ceulx qui les méritent moings. Mon frère, je vous prie faire entendre à mes bons serviteurs qui sont aveques vous mon intention, affin qu'ils scachent que j'ay bonne souvenance d'eulx, et suis bien délibéré leur faire cognoistre combien m'est agreable le service qu'ilz me font près de vous, priant Dieu, mon frère, vous avoir en sa sainte garde.

« De Paris, ce x jour de janvier 1573'.

« Vostre bon frère,

« CHARLES. >>

Les derniers mots, depuis priant Dieu, sont de la main même de Charles IX.

T. III. 1867.

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COURRIER ANGLAIS

Les catalogues raisonnés (calendars of state papers) que publie de temps en temps le garde des archives sont si bien rédigés, si complets, qu'ils forment souvent la lecture la plus attrayante. On y trouve, non pas une simple table des matières, mais un excellent résumé des pièces dont il s'agit, des notes, des introductions. des secours de toute espèce. Voici par exemple un joli volume se rapportant aux affaires de l'Irlande depuis 1515 jusqu'en 1574: cinq cents pages pleines d'intérêt', les détails les plus curieux sur l'histoire politique, la vie sociale et religieuse, les mœurs, les coutumes, les traditions populaires. Ces bons Irlandais! ils avaient en fait de trahison, au xvIe siècle, des idées originales. En 1582, pour ne citer qu'un seul épisode, Byrne, convaincu de rébellion contre le gouvernement, promit à Carew, si on lui faisait grâce, d'assassiner Fitzgerald qui était à la tête de l'insurrection, et de mettre à mort aussi diverses personnes plus ou moins compromises dans cette échauffourée. Byrne, malheureusement, comptait sans son hôte; Fitzgerald eut connaissance de ses desseins, et le fit tuer lui et ses affides. Bientôt après, ce fut le tour de Fitzgerald. Traqué de toutes parts, il songea à se tirer d'affaire grâce à un procédé analogue: Signez-moi une promesse de pardon, et je vous débarrasserai de Shean Mac Hugh, quoiqu'il soit le meilleur de mes amis. Shean entend parler de ces arrangements, et sans plus tarder il règle ses comptes avec Fitzgerald, précisément comme celui-ci l'avait fait avec le malheureux Byrne.

-Occupons-nous de quelque chose de moins sombre. Voici le troisième et dernier volume d'un ouvrage très-intéressant 2; c'est un recueil de toutes les superstitions thérapeutiques (s'il m'est permis d'employer cette expression) qui existaient en Angleterre avant l'invasion normande. Il y a là des recettes pour les maladies les

1 Calendar of the Carew Manuscripts, preserved in the Archiepiscopal Library at Lambeth. 1515-74. Edited by J. S. Brewer and W. Bullen. (Longmans et Co.)

2 Leechdoms, Wortcunning, and Starcraft of Early England; being a Collection of Documents, for the most part never before printed, illustrating the History of Science in this Country before the Norman Conquest. Collected and edited by the Rev. Oswald Cockayne. Vol. III. (Longmans and Co.)

plus compliquées, des spécifiques merveilleux, des panacées infiniment préférables à l'or potable, sans compter qu'elles sont moins coûteuses:

Pris en liquide, il engraisse,
Pris en poudre, il fait maigrir.

Ainsi disait la chanson, ainsi pensaient les Anglo-Normands. Puis n'oublions pas les interprétations données aux songes, l'art de dresser les horoscopes et de prédire l'avenir d'après l'observation des phases de la lune. Si l'on avait connu la cartomancie dans ces siècles reculés, M.Cockayne aurait trouvé la matière d'un quatrième volume. Tel qu'il est, son ouvrage, rédigé avec le plus grand soin, est fort instructif. Il servira à élucider un grand nombre de passages, réputés obscurs jusqu'ici, dont fourmillent les pièces de Shakespeare et les autres ouvrages du même temps, et il nous fera connaître avec exactitude l'étendue des connaissances scientifiques des Anglais du moyen âge. M. Cockayne s'est acquitté à merveille d'une besogne très-fastidieuse, et d'autant plus difficile qu'elle n'avait jamais. encore été abordée, du moins d'une façon suffisante.

- La nouvelle édition des œuvres complètes de Giraldus Cambrensis se poursuit activement; trois volumes ont déjà paru, revus et annotés par M. Brewer, le quatrième est sous presse; celui dont nous nous occupons ici, et que M. Dimock s'est chargé d'éditer, est le cinquième. Il forme un ouvrage distinct et peut se lire indépendamment des autres. Giraldus Cambrensis était un pauvre auteur, crédule, partial, rempli de préjugés, et d'une vanité ridicule. C'est sur le terrain de l'histoire naturelle qu'on peut le consulter avec le moins de désavantage, car il observait soigneusement. en en tenant note, tous les phénomènes qu'il était à portée d'étudier. La Topographia Hibernica pourrait se définir un pamphlet contre l'Irlande, dont Giraldus ne parle pas en termes très-flatteurs. Il importe de remarquer du reste qu'il ne s'exprimait jamais élogieusement qu'à propos de lui-même; il ressemblait sous ce rapport à Guez de Balzac, le grand épistolier du XVIIe siècle. Le volume de M. Dimock n'en est pas moins très-digne d'attention; recommandons-le à ceux qui s'occupent de l'histoire d'Irlande.

- Nous parlions, tout à l'heure, des préfaces et des introductions qui accompagnent les recueils et documents historiques publiés par le gouvernement anglais. Il est surprenant qu'on n'en fasse pas un tirage séparé, car beaucoup de lecteurs, hors d'état de se procurer une collection aussi dispendieuse, aimeraient d'un autre côté à mettre dans leurs bibliothèques des dissertations historiques d'un mérite incontestable. Plus tard peut-être, verrons-nous ces divers essais réunis en un recueil semblable à celui de Leber en attendant, mentionnons-les dès qu'ils paraissent, et rendons justice à l'exactitude, au talent avec lesquels ils sont composés.

1 Giraldi Cambrensis Topographia Hibernica et Expugnatio Hibernica, Edited by J. F. Dimock. (Longmans and Co.)

M. Stubbs vient d'éditer en deux volumes une ancienne chronique communément attribuée à Benoit, abbé de Peterboroug1 et qui traite des événements compris entre les années 1169 et 1192. Cet ouvrage est très-important par les détails qu'il donne, et quoique l'auteur n'en soit pas connu, M. Stubbs incline à nommer Richard Fitz-Neal, trésorier du roi Henri II, et évêque de Londres de 1189 à 1198. Quant à l'opinion ordinairement reçue que Benoit, abbé de Peterborough, serait le véritable compilateur, elle ne mérite pas qu'on s'y arrète; car elle n'est fondée que sur le fait que le manuscrit où la chronique est conservée British museum, fonds Cotton) paraît avoir appartenu au prélat susnommé. La préface de M. Stubbs, insérée dans le second volume, est un morceau d'histoire tout à fait hors ligne. Le docte professeur regarde Henri II non pas comme un esprit révolutionnaire, mais comme un prince qui savait mettre en œuvre les matériaux dont il pouvait disposer, et qui appliquait à la constitution anglaise la loi du progrès. N'abolissant que ce qu'il se sentait capable de remplacer, il retint des législations anglosaxonne et normande toutes les dispositions de nature à consolider la puissance nationale. La noblesse qu'il humilia était d'origine étrangère, celle qu'il fonda était essentiellement anglaise.

Nous avons déjà eu occasion de mentionner l'early English text Society et les services rendus par ce club littéraire; il faut y revenir. On cite peu d'exemples d'un pareil succès et, il faut le dire, d'un zèle aussi soutenu. Les éditions que l'early text Society met sous les yeux du public s'enlèvent, c'est bien le mot. On les distribue en prix, on les étudie dans les classes les plus élevées des écoles publiques; on commence à comprendre que pour connaître à fond l'anglais du XIXe siècle, il faut d'abord pouvoir se rendre compte de l'idiome du moyen âge. Beaucoup des ouvrages jadis les plus populaires parmi nos voisins d'outre-Manche, étaient français d'origine, et j'ai à peine besoin de remarquer avec quel succès on accueillait les traductions des livres de Christine de Pisan, d'Alain Chartier, du roman de la Rose. Le traité curieux intitulé Ayenbit of Inwyt2, dont M. Morris nous donne une nouvelle édition, provient de cette source, car on y reconnaitra facilement la Somme des vertus et des vices composée, dit M. Brunet, par un docteur de l'ordre des Frères prêcheurs, nommé Lorens ou Laurent, mort vers la fin du XIIIe siècle. Le traducteur anglais, moine de Saint-Augustin de Cantorbéry, se nommait Michel de Norgate, et le but qu'il s'était proposé en donnant une version d'un livre bien connu en France, était de détourner des voies de l'impureté et du péché « les vieillards et les

1 Gesta Regis Henrici Secundi Benedicti Abbas. The Chronicle of the Reigns of Henri II, and Richard I., A.D. 1169-1192, known commonly under the name of Benedict of Peterborough. Edited from the Cotton MSS., by William Stubbs, M. A. 2 vols. (Longmans and Co.)

2 Dan Michel's Ayenbile of Inwyt, or Remorse of Conscience. In the Kentish Dialect, 1340, A.D. Edited from the unique MS. in the British Museum, by Richard Morris. (Trübner and Co.)

jeunes gens, les parents et leurs enfants. » Rien de meilleur que ces conseils, rien de plus édifiant, et l'œuvre serait à l'abri de toute critique si l'auteur n'avait pas jugé à propos d'entrer, pour de certains vices, dans des détails un peu trop vifs. Le titre : Ayenbit of Inwyt se comprend sans difficulté; c'est la traduction exacte du français Le remords de la Conscience. Il y a quelques années, M. Stevenson publia pour le Roxburgh club une édition de cet ouvrage, mais le travail de ce docte clergyman laissait beaucoup à désirer au point de vue de la correction, et on regrettait surtout d'y voir le texte altéré, selon le système adopté par le duc de Roannez pour Pascal, et par le chevalier de Perrin pour Mme de Sévigné, c'est-à-dire de façon à ne pas effaroucher la susceptibilité des lecteurs du XIXe siècle. M. Morris a compris tout autrement les devoirs d'un éditeur. Il nous donne, tel qu'il est, l'ouvrage de Michel de Norgate. La traduction est scrupuleuse; s'en offense qui voudra.

— Parmi les autres volumes que l'early text Society a récemment donnés au public, il y a plusieurs ouvrages de piété qui ne manquent pas d'intérêt, parce qu'ils nous montrent quelles étaient les habitudes religieuses de nos pères, comment ils entendaient l'art de prêcher et celui d'expliquer d'une manière allégorique les différentes circonstances de la vie chrétienne. Tout le monde connaît le fameux Voyage du Chrétien du prédicateur puritain John Bunyan; on trouvera une fiction du même genre admirablement bien composée dans un petit traité intitulé: Of the abbey of Saint Spirit, qui fait partie d'une réimpression due aux soins de M. Furnivall'.

Le roman de Melusine a aussi paru à la Société réclamer une nouvelle édition : ce conte est un de ceux dont la réputation est européenne et que presque toutes les littératures ont reproduite. Faut-il en rapporter l'origine au Draconcalopedes ou à la déesse Derceto des Tyriens? doit-on remonter plus haut même, et voir dans cette curieuse fiction un souvenir légendaire du péché originel et de la chute de l'homme? c'est ce que nous ne nous chargeons pas de décider. Nous renverrons nos lecteurs à la préface de M. Skeat, qui pose les différentes hypothèses, mais ne conclut pas.

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L'histoire d'Angleterre au XVIIe siècle ne contient pas de pages plus émouvantes que celles que nous montrent les victimes du gouvernement despotique de Charles Ier quittant leur patrie, leurs habitudes, leurs biens, faisant le sacrifice de tout ce qu'ils possédaient pour obéir aux inspirations de leur conscience. On peut désapprouver les idées

1 The Stacions of Rome. In verse, from the Vernon MS,, ab. 1370 A.D., and in prose, from the Porkington MS., ab. 1460-70 A.D.; and The Pilgrim's Sea Voyage (temp. Hen. VI.) with Clene Maydenhod, ab. 1370. (Edited by F. J. Furnivall. (Trübner and Co.)

2 The Romans of Partenay, or of Lusignan, otherwise known as the Tale of Melusine. Translated from the French of La Coudrette; about 1500-1520 A.D. Edited from an unique Manuscript in the Library of Trinity College, Cambridge, with an Introduction, Maps, and Glossarial Index, by the Rev. W. W. Skeat. (Trübner and Co.)

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