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$4. Distinction

entre le droit

le droit na

turel selon

Grotius.

naturel. Ceci a donné lieu à une branche nouvelle et distincte de leur science, qu'ils ont appelée Droit des gens, Jus gentium.

Selon Grotius, le droit des gens diffère du droit naturel des gens et en ce que celui-ci n'a pas la même origine que l'autre, et qu'ils ne sont pas également obligatoires, puisque le droit des gens n'est obligatoire qu'en vertu du consentement général des nations, tandis que le droit naturel l'est toujours. Dans l'introduction de son ouvrage il dit: «Je me suis servi · en faveur de ce droit des témoignages des philosophes, des historiens, des poètes et même des orateurs, non qu'il faille s'y fier aveuglément, car ils s'accommodent souvent aux préjugés de leur secte, à la nature de leur sujet et à l'intérêt de leur cause; mais c'est que quand plusieurs esprits, en divers temps et en divers lieux, sont d'accord dans les sentiments, cela doit être rapporté à une cause générale; or dans les questions dont il s'agit ici, cette cause ne peut être que l'une ou l'autre de ces deux, ou une juste conséquence tirée des principes de la justice naturelle, ou un consentement universel. La première nous découvre le droit naturel, la seconde le droit des gens. Pour distinguer ces deux branches d'une même science, il faut considérer non les termes dont les auteurs se servent pour les désigner (car ils confondent souvent le droit naturel avec le droit des gens), mais la nature du sujet dont il est question. Car si une maxime dont on ne peut déduire des principes certains se trouve néanmoins observée partout, on a lieu d'en inférer qu'elle doit son orgine « à l'institution positive.» Il avait dit plus haut: «Comme les lois de chaque État se rapportent à son avantage particulier, le consentement de tous les États, ou du moins du plus grand nombre, a pu produire entre eux certaines lois communes, et il parait qu'effectivement on a établi de telles lois qui tendraient à l'utilité, non de chaque corps en particulier, mais du vaste assemblage de tous ces corps.

C'est ce que l'on appelle le droit des gens lorsqu'on le distingue du droit naturel1.»

Tous les raisonnements de Grotius reposent donc sur la distinction qu'il fait entre le droit des gens naturel et le droit des gens positif ou volontaire. Il fait dériver le premier élément du droit des gens de la supposition d'une société où les hommes vivent ensemble dans ce que l'on a appelé l'état de nature; cette société naturelle n'a d'au're supérieur que Dieu, d'autre droit que la loi divine gravée dans le cœur de l'homme et annoncée par la voix de la conscience. Les nations vivant entre elles dans un pareil état d'indépendance mutuelle, doivent nécessairement être régies par cette même loi. Pour démontrer l'exactitude de sa définition un peu obscure du droit naturel, il a fait preuve d'une vaste érudition; lui-même nous apprend toutes les sources où il a puisé. Il a ensuite basé le droit des gens positif ou volontaire sur le consentement de toutes les nations, ou de la plupart d'entre elles, à observer certaines règles de conduite dans leurs relations réciproques. Il s'est attaché à démontrer l'existence de ces règles, en n'invoquant les mêmes autorités que pour sa défition du droit naturel. Nous voyons donc sur quelles

Illa

1 Usus sum etiam ad juris hujus probationem testimoniis philosophorum, historicorum, poëtarum, postremo et oratorum: non quod illis indiscrete credendum sit; solent enim sectæ, argumento, causæ servire: sed quod ubi multi diversis temporibus ac locis idem pro certe affirmant, id ad causam universalem referri debeat: quæ in nostris quæstionibus alia esse non potest quam aut recta illatio ex naturæ principiis procedens, aut communis aliqnis consensus. jus naturæ indicat, hic jus gentium: quorum discrimen non quidem ex ipsis testimoniis (passim enim scriptores voces juris naturæ et gentium permiscent), sed ex materiæ qualitate intelligendum est. Quod enim ex certis principiis certa argumentatione deduci non potest, et tamen ubique observatum apparet, sequitur ut ex voluntate libera ortum habeat........ Sed sicut cujusque civitatis jura utilitatem suæ civitatis respiciunt, ita inter civitates aut omnes aut plerasque ex consensu jura quædam nasci potuerunt; et nata apparent, quæ ntilitatem respicerent non cœtuum singulorum sed magnæ illius universitatis. Et hoc jus est quod gentium dicitur, quoties id nomen a jnre naturali distinguimns. GROTIUS, de Jure belli ac pacis proleg.)

fictions ou hypothèses Grotius a fondé tout le droit des gens. Mais il est évident que son prétendų état de nature n'a jamais existé! quant au consentement général des nations, dont il parle, cela peut tout au plus être considéré comme un consentement tacite, tel que le jus non scriptum quod concensus facit des jurisconsultes romains. Ce consentement ne peut être démontré que par la disposition plus ou moins constante des nations à observer entre elles les règles de justice internationale reconnues par les publicistes. Grotius aurait sans doute mieux fait de chercher l'orgine du droit naturel des gens dans le principe du bonheur général, vaguement indiqué par Leibnitz1, plus clairement énoncé par Cumberland2, et reconnu par la plupart des écrivains modernes comme la base de toute morale internationale 3. Mais du temps où Grotius écrivait, ce principe, qui a si fortement contribué à dissiper les erreurs introduites par ce publiciste et ses disciples dans la science du droit international, était fort peu répandu. Pour connaître les principes et les règles de la morale internationale, qu'il faut distinguer du droit international, il ne suffit pas d'appliquer aux nations les maximes qui règlent la conduite morale des individus; on doit rechercher par quels moyens les nations peuvent, dans leurs rapports mutuels, contribuer de la manière la plus efficace au bonheur général des hommes. On est guidé dans cette recherche par l'observation et par la méditation: l'une sert à faire connaître les faits; l'autre nous indique la connexion

1 Et jus quidem merum sive strictum nascitur ex principio servandæ pacis; æquitas sive caritas ad majus aliquid contendit, ut dum quisque alteri prodest quantum potest, felicitatem suam augeat in aliena; et ut verbo dicam, jus strictum miseriam vitat, jus superius ad felicitatem tendit, sed qualis in hanc mortalitatem cadit. (LEIBNITZ, de Usu actorum publicorum, § 13.)

2 Lex naturæ est propositio naturaliter cognita, actiones indicans effectrices communis boni. (CUMBERLAND, de Legibus naturæ, cap. v, § 1.)

3 BENTHAM. Principles of international law, part. XVIII, p. 537.

qu'il y a entre ces faits considérés comme causes et comme effets, et nous montre les règles de conduite qu'il faut suivre dans des circonstances semblables 1.

$ 5. Identité du droit naturel

des gens

selon Hobbes et

Ni Hobbes ni Puffendorf ne partagent les opinions de Grotius sur l'origine et sur la force obligatoire du droit des et du droit gens positif. Dans son ouvrage de Cive, le premier partage le droit naturel entre le droit naturel des hommes Puffendorf. et le droit naturel des États, ordinairement appelé le droit des gens. «Les préceptes de tous les deux,» dit-il, «sont les mêmes; mais comme les États une fois établis prennent les qualités personnelles des individus, ce droit, que nous appelons naturel quand il est appliqué aux individus, s'appelle droit des gens quand il est appliqué à des êtres entiers ou à des nations ou peuples entiers 1.»

Puffendorf, après avoir cité cette opinion, déclare qu'il y souscrit pleinement, et dit qu'il ne reconnaît pas «< d'autre espèce de droit des gens volontaire ou positif qui ait la force de loi proprement dite, et qui soit imposé aux nations comme émanant d'un supérieur 3.»

3

Après avoir ainsi nié l'existence d'un droit des gens positif, fondé sur le consentement des nations et distinct du droit des gens naturel, Puffendorf modifie cette opinion, en admettant que l'usage des nations civilisées a introduit certaines règles pour adoucir les pratiques de la guerre; que ces règles sont fondées sur un consentement tacite et général, et qu'elles cessent d'être obligatoires du moment

1 SENIOR, Edinburgh Review, no CLVI, p. 310-321; et WHEATON, Histoire des Progrès du droit des gens, t. I, introduction, p. 60.

2 Præcepta utriusque eadem sunt: sed quia civitates semel institutæ induunt proprietates hominum personales, lex quam, loquentes de hominum singulorum officio, naturalem dicimus, adplicata totis civitatibus, nationibus sive gentibus, vocatur jus gentium. (HOBBES, de Cive, cap. XIY, § 4.)

3 Cui sententiæ et nos plane subscribimus. Nec præterea aliud jus gentium, voluntarium seu positivum dari arbitramus, quod quidem legis propiæ dictæ vim habeat, quæ gentes tamquam a surperiore profecta stringat. (PUFFENDORF, de Jure naturæ et gentium, lib. II, cap. 1, § 23.)

où un État engagé dans une guerre juste, déclare qu'il ne veut pas s'y soumettre. Il est incontestable qu'une nation belligérante qui veut ainsi se soustraire à l'obligation du droit des gens concernant la manière usitée de faire la guerre, peut le faire, mais elle s'expose ainsi à ce que les autres nations usent du droit de représailles envers elle, et elle se met en hostilité générale avec les peuples civilisés. Un célèbre magistrat et publiciste anglais a fort bien observé « qu'une grande partie du droit des gens est basée sur l'usage et les pratiques des nations. Ce droit a commencé par des principes généraux empruntés au droit naturel; mais il ne marche avec ces principes que jusqu'à un certain point, et s'il s'arrête à ce point, nous ne pouvons pas prétendre aller plus loin, et dire que la seule théorie générale pourra nous soutenir dans un progrès ultérieur. Ainsi, par exemple, d'après les principes généraux, il est permis de détruire son ennemi, et les seuls principes généraux ne font pas beaucoup de distinction sur la manière dont on remplit ce but de la guerre; mais le droit conventionnel du genre humain, témoigné par l'usage général, établit une distinction et permet certains moyens de destruction, tandis qu'il en défend d'autres, et un État belligérant est tenu de se renfermer dans les moyens que l'usage général du genre humain a employés, et de renoncer à ceux que ce même usage n'a pas sanctionnés dans les pratiques de la guerre, quoiqu'ils aient pu l'être par ses principes et ses objets 1.»

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On peut faire la même observation à l'égard de ce que dit Puffendorf sur les priviléges des ambassadeurs, priviléges que Grotius prétend du droit volontaire des gens, tandis que Puffendorf les regarde comme dépendant ou du droit naturel qui donne aux ministres publics un caractère sacré et inviolable, ou du consentement tacite constaté par l'usage des nations, leur attribuant certains

1 Sir W. SCOTT (Lord Stowell) Robinson's Admiralty Reports, vol. I, P. 140.

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