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nègres, beaucoup d'effets et de marchandises, n'ayant perdu que cinquante hommes, et ayant causé aux Anglais une perte de deux millions.

Les ennemis, desirant se venger, vinrent à Saint-Domingue, tirèrent plus de quatre mille coups de canon qui ne firent aucun mal, et se retirèrent sans avoir osé tenter une descente.

Le Roi, pour s'opposer aux desseins que les ennemis avaient sur les côtes d'Italie, fit équiper des vaisseaux à Toulon et à Brest, et en donna le commandement au maréchal de Tourville. Ce général partit de Toulon avec tous les vaisseaux armés dans ce port, et se disposa à faire sa jonction avec le comte de Château-Regnault, sous les ordres duquel était la division de Brest.

Le comte de Château-Regnault avait mis à la voile le 7 mai. II se trouvait par le travers de Carthagène, lorsqu'il fit rencontre de cinq bâtimens marchands anglais, sur lesquels il détacha M. Duchalart avec trois vaisseaux. Cet officier en prit deux chargés de vin, d'eau-de-vie et de savon; les trois autres se sauvèrent dans une petite anse appelée Porto-magno, et mouillèrent très-près de terre, ainsi que plusieurs barques qui avaient gagné le port. M. Duchalart ayant trouvé à l'entrée de cette baie deux corvettes, jeta à bord quelques soldats, fit mettre en mer toutes les chaloupes et canots, et en forma un détachement, dont il donna le commandement à M. d'Hautefort, avec ordre d'attaquer les bâtimens anglais les uns après les autres ; tandis que lui, avec ses vaisseaux, s'approcherait le plus qu'il pourrait et protégerait son entreprise. Au premier signal, M. d'Hautefort aborda un des navires anglais. L'action fut si vive, que le capitaine et son équipage lâchèrent prise et se sauvèrent à terre. M. d'Hautefort passa ensuite aux deux autres; le premier prit le parti de se faire sauter; et l'autre, après un rude combat, se voyant réduit à douze hommes, demanda quartier; mais il était si maltraité, qu'on fut obligé d'y mettre le fen, ainsi qu'à huit barques qui se trouvaient dans la baie.

Peu de temps après, M. Duchalart aperçut vers l'embouchure de l'Ebre quatre vaisseaux espagnols et cinq galères qui venaient de porter quatre mille hommes à Barcelone. Secouru de MM. d'Amfreville, de Villars et des Augiers, il se mit à la poursuite de ces bâtimens, en força deux à s'échouer, et deux autres à se brûler pour éviter de tomber au pouvoir des Français.

M. d'Amfreville, avec plusieurs brûlots et chaloupes, attaqua de nouveau les deux vaisseaux échoués sur la côte, et les força

à se faire sauter. Après cette expédition, M. de Château-Regnault ayant joint le maréchal de Tourville, ils secondèrent l'un et l'autre les entreprises du maréchal de Noailles, qui faisait alors le siége de Roses, et lui facilitèrent ensuite la conquête de Palamos, de Girone, d'Ostalrie et de Castelfollit.

M. Renau, capitaine de vaisseau, qui, au génie le plus profond pour la marine, joignait un courage intrépide, avait fait construire à Brest un vaisseau de 54, selon des règles particulières qu'il avait établies; et comme sa manière avait trouvé beaucoup de contradicteurs, il demanda le commandement de ce vaisseau pour en apprécier lui-même les qualités ou les défauts. S'étant mis en mer, il rencontra deux .vaisseaux anglais richement chargés, et attaqua l'un deux, le Barkley-castle, qui était d'un échantillon beaucoup plus fort que le sien. Le combat fut très-sanglant, et, au bout de trois heures, le vaisseau ennemi fut enlevé à la vue de plusieurs gardes-côtes anglais qui n'étaient qu'à trois lieues sous le vent; mais crible de coups de canon, il ne put être sauvé, et coula bas le lendemain : sur cinq cent mille livres sterling qu'il y avait à bord, l'équipage ne put profiter que de cent mille écus; le reste fut englouti.

Dans le cours de cette campagne, Duguay - Trouin montait une frégate de quarante canons: après quelques jours de croisière, il tomba, par un temps de brumes, dans une escadre de six vaisseaux de guerre anglais; un deux, nommé l'Adventure, le joignit et le combattit pendant quatre heures. Duguay - Trouin se voyant démâté et serré de près, forma la résolution d'aborder; manœuvre hardie dans sa position, mais que la proximité de l'Anglais rendait possible. Il allait atteindre l'ennemi qui était trop éloigné de son escadre pour en être secouru, quand, par une méprise malheureuse, la barre ayant été changée, fit éloigner la frégate. Duguay-Trouin étant alors sur le gaillard d'avant pour sauter le premier à l'abordage, courut aussitôt à l'arrière pour faire mettre promptement la barre sous le vent; mais l'An. glais, voyant son dessein, revint au vent et le canonna vigoureusement. Dans ces entrefaites, le feu prit à la sainte-barbe. Les soldats et les matelots ébranlés abandonnèrent leur poste pour aller se cacher dans la cale. Duguay-Trouin, indigné, se précipita sur eux et les force, le pistolet et l'épée à la main, à remonter sur le pont. I engagea de nouveau le combat contre toute l'escadre anglaise, et l'on ignore quelle en aurait été l'issue, si un boulet amorti ne fut venu le renverser et lui faire perdre connaissance. L'équipage privé de son chef amena le pavillon,

et le feu cessa de part et d'autre. Le capitaine anglais, pénétré d'admiration pour Duguay-Trouin, lui donna tous les secours qui dépendaient de lui avec cette générosité qui naît de l'estime. Il conduisit et débarqua son prisonnier à Plymouth. Là, Duguay-Trouin fut libre pendant quelque temps sur parole; mais ayant été arrêté par ordre de l'amirauté, il fut enfermé dans une chambre grillée. Sa captivité ne fut pas longue : aussi aimable que courageux, il avait su plaire à une jeune anglaise ; ce fut elle qui brisa ses fers et qui hâta son retour en France.

Peu de jours après son arrivée, s'étant remis en croisière sur le vaisseau le Français, il s'empara, sur les côtes d'Irlande, de six navires anglais richement chargés, et du vaisseau de guerre le Sans - pareil. Le combat qu'il soutint contre ce dernier fut long et opiniâtre, et tous les officiers anglais furent tués ou blessés. Duguay - Trouin perdit la moitié de son équipage, et revint à Brest avec ses prises qu'une tempête avait fort endommagées.

Le 28 octobre de la même année, M. de la Roche-Vezanzay, commandant une frégate de 26 canons, fut attaqué par six bâtimens hollandais, dont le moindre était de 28 à 30 pièces de canon. Démâté de son petit mât de hune, et menacé de perdre ses autres mâts que les boulets avaient atteints, il fit cependant une défense si vigoureuse, que les ennemis, aussi maltraités que lui, furent obligés de l'abandonner. Tous les officiers français se distinguèrent beaucoup dans ce combat, qui fut un des plus vifs de la guerre presque tous furent blessés, néanmoins aucun ne cessa de prendre part à l'action.

Ce fut cette même année que Jean Bart rendit un service signalé à la France, en sauvant un convoi de grains que le Roi faisait venir du nord pour apaiser la disette qui désolait toutes les parties du royaume. Il partit de Brest le 27 juin avec six vaisseaux et deux flûtes, pour aller au-devant de ce convoi, et le découvrit à la hauteur du Texel, au milieu de huit vaisseaux de guerre hollandais qui s'en étaient emparés. Il se mit aussitôt en ligne, donna l'ordre à ses capitaines de ne tirer qu'à portée de pistolet, et bientôt le combat s'engagea d'une manière terrible. Jean Bart se dirigea sur le vaisseau commandant, qui portait 54 canons, l'aborda et s'en rendit maître après beaucoup d'efforts. M. de Saint-Pol en aborda un autre et l'enleva également. Un troisième se rendit à M. de Benneville; les cinq autres prirent la fuite, et les navires du convoi gagnèrent les ports de Dunkerque, du Havre et de Dieppe.

Sa Majesté, pour donner à M. Bart un témoignage de sa sa

tisfaction, lui accorda des lettres de noblesse, et fit avancer son fils. qui s'était distingué dans cette affaire.

1695.

Prise d'un vaisseau anglais de 70, par MM. de Nesmond et de la Villetreux.-Autre prise de trois navires de la même nation, par A1 M. DuguayTrouin et de Beaubriant. Tentatives des Anglais sur Marseille et Toulon. Bombardement de Saint-Malo et de Dunkerque. Dfferentes prises faites par le marquis de Nesmond. - Prise d'un vaisseau de guerre anglais, par M. de

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la Bellière, et d'un bâtiment de 22 canons par M. de Grand-Maison-Deshayes. M. de Gennes s'empare du fort de Gambie. Prise d'un vaisseau hollandais par M. de Forbin.

MM. de Nesmond (1) et de la Villetreux, armateurs de SaintMalo, rencontrèrent, le 26 avril, à vingt lieues des Sorlingues, deux vaisseaux de guerre anglais, l'un de 70 et l'autre de 54 canons. M. de Nesmond détacha M. de la Villetreux contre ce dernier, et se présenta lui-même contre le plus fort. Il le combattit si vivement, depuis huit heures du soir jusqu'à onze heures et demie, que lui ayant tué plus de quatre-vingts hommes et abattu son grand mât, il l'obligea à se rendre. Ce vaisseau avait quatre cents hommes d'équipage et une très riche cargaison. M. de la Villetreux, malgré la vigueur avec laquelle il canonna l'autre, ne put l'empêcher de gagner le large et de se sauver.

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MM. Duguay-Trouin et de Beaubriant ayant été chargés de détruire les baleiniers hollandais sur les côtes du Spitzberg, rencontrèrent, après trois mois de croisière, trois vaisseaux anglais venant des Indes orientales, et s'en emparèrent à la suite d'une action des plus chaudes : ils avaient à bord des richesses considérables.

Les ennemis, après avoir hiverné dans les ports d'Espagne, parurent sur les côtes de Provence, et menacèrent de bombarder Marseille et Toulon; mais le maréchal de Tourville, qui avait pris les plus sages précautions pour les prévenir, empêcha l'effet de leurs tentatives.

Leur flotte, composée de vingt-cinq vaisseaux de guerre et d'autant de galiotes à bombes, outre plusieurs machines infernales, revint dans l'Océan, et l'amiral Russel, voulant se venger du mauvais succès qu'il avait eu, vint bombarder Saint-Malo. Plusieurs maisons furent brûlées et d'autres ébranlées. Il se di

(1) Il ne faut pas confondre M. de Nesmond avec le marquis du même

nom.

rigea ensuite sur Dunkerque, où il échoua complétement, malgré l'emploi de ses machines infernales.

Dans ces entrefaites, le marquis de Nesmond attaqua, dans les mers d'Irlande, deux vaisseaux anglais qui revenaient des Indes et s'en rendit maître : ils valaient plus de dix millions. Il prit, en outre, dans les mêmes parages, deux navires qui venaient de la Barbade avec un chargement de sucre, de coton et de dents d'éléphant; et par le travers du cap Finistère, un vaisseau de guerre, ainsi que six bâtimens hollandais qu'il escortait: ces dernières prises furent estimées six millions.

Le 24 septembre, M. de la Bellière, capitaine de vaisseau, rencontra, à cinquante lieues du cap Clare, une flotte de vingt navires marchands, escortés par deux vaisseaux de guerre anglais, et se détermina à l'attaquer, quoique inférieur en forces. Un des bâtimens convoyeurs s'étant mis en devoir de la défendre, M. de la Bellière gouverna sur lui; et après l'avoir vigoureusement canonné, il l'aborda et jeta sur son bord trente de ses meilleurs hommes, qui en restèrent maîtres après une heure de combat corps à corps. Les autres bâtimens profitèrent de la nuit pour se

sauver.

M. de Grandmaison - Deshayes, commandant la frégate le Duc du Maine, prit, après une heure et demie d'un combat très - vif, l'Aigle volant, de Middelbourg, armé de vingt-deux canons, venant de Guinée avec un chargement de poudre d'or et d'autres marchandises précieuses.

M. de Gennes, capitaine de vaisseau, commandant une escadre de six vaisseaux armés en course, attaqua le fort de Gambie, dans l'île de Gorée, près du cap Vert, le fit capituler et le détruisit. Il y trouva cent deux canons, cinq cents quintaux d'ivoire, trois cent quarante de cire, deux cent trente esclaves et pour quatre-vingt mille écus de marchandises. Les Anglais estimèrent leur perte à deux millions.

Le chevalier de Forbin, commandant le vaisseau le Marquis, destiné à favoriser le commerce et à donner la chasse aux corsaires de Flessingue qui le désolaient depuis quelque temps, eut ordre de conduire une flotte marchande dans le Levant. Il rencontra dans l'archipel, près de Cérigo, un vaisseau hollandais de soixante-huit pièces de canon et de deux cent soixante hommes d'équipage, qui venait de Smyrne; il l'attaqua à plusieurs reprises, et, après un combat très - vif, il parvint à le faire amener. Sa cargaison fut estimée cinq cent soixante mille piastres.

Ann, marit. II. Partie. 1822.

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