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exécutions à

plus infâmes et que le peuple de Moscou détestait. Mais il était là par la volonté du Tsar (98).

Partout il institua des fonctionnaires et des officiers de son choix, et sur lesquels il croyait pouvoir compter: il congédia surtout ceux qui étaient remplis de présomption et qui en savaient trop. Quelques uns, même, disparurent.

Les principaux Seigneurs et les vrais patriotes étaient vivement affligés en voyant toutes ces choses et ils commencèrent à s'apercevoir que le nouveau souverain n'était pas le souverain légitime. Quelques individus, pour la plupart ecclésiastiques Nombreuses et religieux, qui connaissaient les secrets de l'état, se laissèrent Moscou. aller à commettre des indiscrétiens à son égard: ceux d'entre eux qui en étaient soupçonnés coupables, furent exécutés ou enlevés. Plusieurs personnes du peuple et de la bourgeoisie subirent le même sort à Moscou. Car toute parole offensante pour le Tsar était à l'instant punie du dernier supplice ou de la confiscation des biens. Toutes les nuits, on ne faisait que livrer à la torture et mettre à mort des malheureux: mais, malgré tout le mystère dont on entourait ces exécutions, il fut impossible d'empêcher les gens de parler.

à Moscou con

Dans ce déplorable état de choses, il se trama secrètement une conspiration ayant pour but de se défaire du Tsar: elle avait pour chef principal Vassili Ivanovitch Schouisky, qui savait fort bien à quoi s'en tenir sur l'authenticité de Démétrius, et qui, comme je l'ai déjà rapporté, avait toujours donné sur ce point le témoignage le plus catégorique. Conspiration Schouisky n'avait cessé de tenir de nombreux conciliabules tre Démétrius. avec quelques conjurés, tant seigneurs que marchands, auxquels il croyait pouvoir se fier, à l'effet de rechercher les moyens et l'occasion de tuer le Tsar. Mais leur complot est dénoncé par quelques traîtres qui n'en savaient pourtant pas grand-chose et ne purent apporter aucune preuve à l'appui de leur révélation. Cependant, on saisit plusieurs conjurés et on les met à la torture: quelques uns font des aveux, d'autres restent impénétrables. Schouisky est arrêté et on le proclame cou

pable de lèse-majesté pour avoir attenté à la vie du Tsar. Mis en jugement, il est condamné à mort et l'exécution Les conspira est fixée au 25 Août (99).

Ce jour-là, on le conduit sur l'esplanade devant le Kremlin: la vaste place est occupée par 800 Strelitz, bien armés, et commandés par Basmanoff. Celui-ci, voyant les spectateurs très attristés du sort de Schouisky, parcourait la place, à cheval, et, s'adressant aux groupes, il leur disait que le coupable n'avait d'autre but que celui de bouleverser de nouveau l'empire et que ses machinations auraient occasionné des maux terribles. Notre Tsar, disait-il, est plein de clémence et il fait exécuter seulement ceux qui ont deux fois mérité la mort". Par ces paroles, il s'efforcait de tourner le sentiment populaire contre le malheureux Schouisky. Mais il dut s'apercevoir que l'affliction du peuple était réellement très vive.

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Le bourreau arrive et se met à déshabiller le condamné qui se tenait debout devant un grand billot sur lequel la hâche était prête. L'exécuteur se met en devoir d'ôter aussi la riche chemise toute brodée d'or et de perles: c'était un objet qu'il convoitait, mais Schouisky refuse de s'en laisser dépouiller et veut mourir avec ce vêtement. On attendit encore quelques instants, afin de voir s'il n'arriverait pas un message de grâce: mais ce répit eut lieu contre le gré de Basmanoff et de plusieurs autres qui auraient voulu que l'exécution se fît sans délai.

Enfin, on vit sortir du Kremlin un chancelier à cheval: il n'y mettait aucune hâte, car il était aussi de ceux qui désiraient la mort du malheureux Schouisky: ce chancelier apportait le rescrit par lequel le Tsar lui faisait grâce de la vie (100). Cette nouvelle combla de joie la multitude des bourgeois et tous les habitants de Moscou.

Alors, Basmanoff se mit de nouveau à chevaucher sur la place en criant: "O quel gracieux souverain le ciel nous a donné! Voyez! il pardonne même aux traîtres qui cherchent à lui ôter la vie!" Cet acte de clémence avait, sans aucun

teurs sont sai

sis.

doute, pour but de frapper le cœur du peuple et de convaincre plus fortement encore pauvres et riches, que le Tsar était bien le véritable Démétrius. On a dit qu'il était dû à l'intercession de la vieille Tsarine-mère. Mais, en réalité, il avait été inspiré par Jean Boutchinsky et ses frères, hommes pleins d'intelligence que Démétrius avait amenés avec lui de Pologne et dont l'un était son premier secrétaire et l'accompagnait partout. Ils ne cessaient de conseiller au Tsar d'épar gner le petit nombre de Seigneurs qui existaient encore, de les traiter avec douceur, de leur témoigner de l'amitié, en l'assurant que par ce moyen il obtiendrait beaucoup plus que par les supplices, qui, en définitive, devaient avoir pour résultat de donner au peuple des soupçons et des doutes sur la légitimité de son souverain. Ces Boutchinsky étaient d'origine allemande et l'un d'eux appartenait à l'église Reformée.

Après avoir été gracié, Vassili Ivanovitch Schouisky et ses deux frères Dmitri et Ivan, sont envoyés en exil ou en prison à Viatca (101); mais, vers la Noël, sur les instances réitérées des Boutchinsky, ils reçoivent une nouvelle commutation de peine et reviennent à Moscou. Ils ne cessèrent point cependant de travailler au bonheur de la patrie en s'opposant fortement à l'invasion de l'hérésie que l'on cherchait à y introduire, et conspirèrent en secret, et avec la même énergie qu'auparavant, pour se défaire du Tsar.

Tous les jours, çà et là, on exécutait encore un grand nombre de personnes: en même temps Dieu avertissait visiblement Démétrius, mais celui-ci était aveuglé: il ne se souciait point des Moscovites et ne croyait pas aux rapports qu'on lui faisait sur l'état des choses.

Il me faut maintenant dire quelques mots de sa vie et de ses actions domestiques.

Il envoya de fortes sommes d'argent en Pologne pour payer ses dettes et rembourser à chacun ce qu'il en avait emprunté. Les Polonais arrivaient aussi en grand nombre à Moscou et en emportaient beaucoup de numéraire, en venant y vendre

de riches bijoux et d'autres objets précieux que les marchands y apportaient et que le Tsar recherchait vivement. Tout ce qui était rare ou curieux excitait son envie: ceux qui les lui présentaient en obtenaient vîte le prix et pouvaient s'en retourner contents. Il fit construire sur les grands remparts du Kremlin un magnifique palais d'où il pouvait voir toute la ville, car ces remparts sont situés sur une haute montagne au pied de laquelle coule le fleuve de la Moskova. Ce palais se composait de deux demeures contigues et formant angle; l'une de ces demeures était destinée à la future Tsarine. Voici, à peu près, la figure de ce palais. (*)

lais qu'il fait

Dans l'intérieur des appartements, il fit dresser de splen- Nouveau pa dides baldaquins dorés; les murs étaient tendus de précieuses bâtir. étoffes en or et de velours brodé. Les clous, les charnières et autres ferrures des portes étaient recouverts d'une épaisse dorure, les fourneaux étaient des chefs-d'œuvre de l'art, aux fenêtres pendaient des tentures de drap et de velours cramoisi. Il fit construire aussi des bains magnifiques et de belles tours. Quoique dans l'enceinte de son palais se trouvassent déjà de vastes écuries, il fit bâtir une écurie particulière auprès de sa nouvelle demeure. Dans ces nouveaux édifices, il fit ménager une foule de portes dérobées et de passages secrets; ce qui prouve qu'il suivait l'exemple des tyrans et qu'il vivait, comme eux, dans une crainte perpétuelle.

Il faisait rechercher par tout l'empire les chiens les plus forts et les plus féroces. Les dimanches, il faisait apporter dans l'arrière-cour du palais, des cages renfermant des ours sauvages et prenait plaisir à mettre ces animaux aux prises avec ses chiens. Souvent même il ordonnait aux premiers nobles du pays qui, du reste, sont d'habiles chasseurs, d'entrer dans l'arène, armés d'un simple épieu et de se mesurer avec des ours. J'ai vu de mes yeux cet émouvant spectacle: j'ai vu plusieurs fois un homme attaquer un ours énorme qui

(*) Voyez page 146.

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