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on vit. Franklin comparaître à la barre. Ces paroles sont restées profondément gravées dans l'âme de tous les politiques anglais; et un très grand personnage anglais osa dire, à Paris, en 1815 : « Nous sommes «< ici dans l'Inde, et Typoob-Saëb est aux Tuileries!! »

4 JUIN. Un certain nombre de sénateurs, que le gouvernement royal ne juge pas répréhensibles de grave égarements dans le cours de la révolution, ont été appelés à siéger dans la salle du palais Bourbon. Le corps législatif y a été aussi convoqué. La constitution de l'an 8 étant abolie de fait, et, par conséquent, les sénatus - consultes organiques modifiant les dispositions relatives aux élections se trouvant invalidés, il ne reste plus de règles pour procéder à la formation d'une représentation nationale. La rapidité des événements, et la nécessité d'établir les premiers fondements d'un nouvel état politique, ne laissent pas la faculté de rassembler des colléges électoraux quelconques : telle est l'excuse mise en avant, et àvec affectation, par les anciens privilégiés, qui craignent que de nouvelles élections ne donnent des députés franchement dévoués aux libertés constitutionnelles, tandis que les muets du corps législatif de Napoléon semblent répondre aux partisans de l'ancien régime d'une soumission aveugle à toutes les vieilles doctrines; ces muets ont fait leurs preuves sous Napoléon! Ainsi le gouvernement a recours à ce même corps législatif que Napoléon réunit le 19, et dispersa le 31 décembre 1813.

Louis XVIII, s'asseyant pour la première fois sur le trône de France, prononce le discours suivant : « ......... Je me félicite d'être devenu le dispensateur <«< des bienfaits que la divine Providence daigne accor<< der à mon peuple. J'ai fait avec l'Autriche, la Russie,

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« l'Angleterre et la Prusse, une paix dans laquelle sont « compris leurs alliés, c'est-à-dire tous les princes de « la chrétienté. La guerre étant universelle, la ré<«< conciliation l'est également. Le rang que la France <«< a toujours occupé parmi les nations n'a été transféré <«< à aucune autre, et lui demeure sans partage. Tout <«< ce que les autres états acquièrent de sécurité accroît <«< également la sienne, et, par conséquent, ajoute à <«< sa puissance véritable. Ce qu'elle ne conserve pas << de ses conquêtes ne doit donc pas être regardé «< comme retranché de sa force réelle. La gloire des «< armées françaises n'a reçu aucune atteinte; les mo<«<numents de leur valeur subsistent, et les chefs-d'œu<< vre des arts nous appartiennent désormais par des <«< droits plus stables et plus assurés que ceux de la « victoire. Les routes du commerce, si long-temps fer«mées, vont être libres. Le marché de la France ne <«< sera plus seul ouvert aux productions de son sol et <«<de son industrie. Celles dont l'habitude lui a fait un << besoin, ou qui sont nécessaires aux arts qu'elle «< exerce, lui seront fournies par les possessions qu'elle «< recouvre. Elle ne sera plus réduite à s'en priver, ou <«< à ne les obtenir qu'à des conditions ruineuses. Nos <<< manufactures vont refleurir; nos villes maritimes <«< vont renaître, et tout nous promet qu'un long calme <«<< au dehors et une félicité durable au dedans seront <«<les heureux fruits de la paix......... C'est guidé par « l'expérience, et secondé par plusieurs d'entre vous, « que j'ai rédigé la charte constitutionnelle dont vous << allez entendre la lecture, et qui asseoit sur des bases <«< solides la prospérité de l'état. »

Le chancelier Dambray (dans un discours redondant en généralités, semé d'allusions à la toute-puissance des rois de France) a l'imprudence de dire, de

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reproduire, de faire sentir de diverses manières, que le roi, « en pleine possession de ses droits héréditaine veut exercer l'autorité qu'il tient de Dieu et <«<< de ses pères qu'en posant lui-même les bornes de « son pouvoir...........................; qu'il a éloigné l'idée que la sou« veraineté doive être dégagée de contre-poids, qu'il <<< les pose lui-même...... ; qu'il ne veut être que le chef <«< suprême.......; que la nation peut désirer une garan<<< tie contre les abus.......; que le roi déploie l'appareil <<< imposant de la royauté pour apporter à son peuple « le bienfait précieux d'une ordonnance de réforma« tion........... » Langage presque blasphématoire, et portant directement atteinte à la confiance qui venait s'établir entre le monarque et la nation! Malheureuses expressions d'un interprète inexact; expressions qui, rapprochées du préambule ministériel de la charte, et surtout des dernières lignes de ce préambule, feront soudain germer en France des semences de division et fourniront de trop sérieux prétextes de désaffection, qu'il faudrait détourner à tous prix ! Il serait si facile de rendre sans mélange le bienfait de cette institution fondamentale !! D'après ce discours du chancelier Dambray, il semblerait que la nation aurait, en adhérant à la déchéance de Napoléon, prononcé la sienne propre. Ce chancelier se gardera de marcher sur les traces de l'Hôpital, et son inconsidération sera plus nuisible, de nos jours, que ne le fut, en 1771, la servile condescendance de Maupeou. Les paroles de ce ministre ne sont-elles pas, en outre, manifestement contraires à la déclaration de Saint-Ouen ( 2 mai)? « Rappelé par l'amour de notre peuple au trône de « nos pères......., résolu d'adopter une constitution « libérale....................., ne pouvant en accepter une qu'il est <«< indispensable de rectifier, nous convoquerons le

<«< sénat et le corps législatif, nous engageant à mettre <«<< sous leurs yeux le travail que nous aurons fait avec <<< une commission........ » En droit ou en fait (comme on voudra l'entendre, d'après l'idée dont on aura primitivement été nourri), la légitimité est la base ou bien la garantie d'un pacte constitutionnel. Nommez le roi avant ou après la nation, pourvu que le roi et la nation s'entendent, qu'importe? Le monarque doit posséder la sagesse; la nation doit vivre dans la confiance. Si l'un ou l'autre se trompe, le remède se trouve dans le gouvernement représentatif, ainsi que le montre l'Angleterre et la Suède. Hors de ce mode de gouvernement, le peuple ne sait où prendre sa garantie; le chef de l'état, où puiser sa sécurité : la catastrophe de l'Espagne (en 1808 ) le témoigne assez hautement. Un souverain, qu'il s'intitule kan, schah, padischah, tzar, empereur, roi, archiduc, grand-duc, duc, etc., ne saurait posséder la puissance en vertu de son organisation individuelle. L'espèce humaine ne présente pas une variété qu'on puisse appeler souveraine. Le monde social ne comporte pas les classifications de la botanique. Gardons - nous d'élever des discussions métaphysiques : c'est se battre à la manière des guerriers d'Ossian, dans la région des nuages, des vapeurs, des fantômes; et cependant les atteintes n'en sont pas moins réelles, les blessures moins cuisantes. Souveraineté du peuple, droit divin des couronnes, l'une et l'autre de ces doctrines absolues ont ravagé l'Europe moderne. On l'a dit, il y a deux siècles, au parlement de Paris : « Les rois et les << peuples ne s'entendirent jamais mieux que dans le << silence. >>

Nous croyons pouvoir nous dispenser de donner ici le texte de la charte constitutionnelle. Ce statut fon

damental est dans la mémoire comme dans le cœur de

tous les Français.

Après une révolution qui a déplacé beaucoup de propriétés, transformé les habitudes, amené d'autres besoins, et après une lacune de vingt-deux ans, Louis XVIII, paraissant sur le trône royal, donne cette charte à la France, comme une garantie pour l'avenir, comme une transaction entre le présent et le passé, entre les intérêts qu'a produits la révolution pour la masse et quelques intérêts particuliers dérivés de l'ancien régime et qui se sont maintenus. En sa qualité de roi, Louis XVIII a cru devoir se considérer comme le représentant universel. S'entourant de quelques hommes qu'il regarde comme sages, comme éclairés, qu'il choisit dans les premiers corps de l'état, pour la confection de cette charte qui n'est improvisée que dans sa facile rédaction, le roi l'annonce avec confiance. Il ne pense pas, sans doute, qu'en la rendant obligatoire à l'instant même, la nation puisse revendiquer un droit d'acceptation. L'importance des bienfaits qu'elle montre semble à ce prince devoir dispenser de toute suspension. Il pense que les hommes en général consentent à devenir heureux. Tous les principes qu'elles consacre sont le résultat d'observations suivies, d'expérience d'un quart de siècle sur les besoins et les voeux de l'immense majorité des Français. Par cet acte, la royauté annonce qu'elle rejette toute alliance avec le despotisme, qu'elle répudie la féodalité; qu'elle veut s'unir seulement à l'intérêt de la propriété, et se mettre dans l'heureuse impuissance de méconnaître les besoins réels et les vœux permanents des Français : elle assiéra donc ainsi le trône sur les plus solides bases, et la charte, si elle est exécutée avec loyauté, aura résolu le problème de

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