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graphie économique qui y ont été réunis sur plusieurs des pays ou des peuples dont les produits figuraient dans les galeries du Champ de Mars. Des comptes rendus de cette nature deviennent de véritables documents, des documents précieux pour l'étude. Nous avons pensé qu'il serait d'un grand intérêt d'en réunir ici au moins un certain nombre. La grosseur de notre volume nous a toutefois imposé le devoir de nous restreindre, et il nous a fallu, bien à regret, écarter de notre choix un grand nombre de morceaux qui auraient mérité d'être conservés.

Nous ne pouvons mieux inaugurer notre petite anthologie que par un article du Times sur le caractère général de l'Exposition; nous n'avons vu nulle part une appréciation aussi élevée, aussi parfaitement impartiale et faite en aussi bons termes que celle du journal anglais.

L'Exposition de Paris est finie; le Champ de Mars est abandonné maintenant aux entrepreneurs et aux emballeurs, et bientôt il présentera un spectacle de désolation qui n'est point complétement en désaccord avec son nom. Nous pensons qu'il n'est aucun de ceux qui se sont lancés dans l'Exposition, ne fût-ce que pour quelques heures, qui puisse apprendre la nouvelle de sa fin sans éprouver un sentiment de regret. Dans le banquet de la semaine dernière, lord Granville en a parlé comme de l'exposition la plus grande, la plus riche, la mieux organisée que le monde ait jamais vue. Ces louanges peuvent paraître exagérées, et pourtant elles nous semblent encore audessous du mérite de leur objet. On peut dire, en effet, que l'Exposition était tout à fait unique. On n'avait rien vu de tel auparavant et il n'est guère possible de prévoir l'époque où l'on reverra pareille chose. Elle a eu naturellement ses détracteurs. Il était possible, sans aucun doute, d'y éprouver des désagréments comme il est possible d'en éprouver partout. Il a été un peu de mode de déprécier les expositions, comme il a été aussi de mode de les vanter outre mesure, et, parmi les gens qui sont venus visiter la dernière avec des préventions hostiles, on peut croire qu'il y en a bien eu quelques-uns qui sont retournés chez eux mécontents. L'Exposition avait, comme la

L'ANNÉE GÉOGR. VI.

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nôtre, le caractère d'une grande boutique; » elle avait en moins que la nôtre l'absence de tout grand coup d'œil. Ces traits de ressemblance et de différence prêtaient l'un comme l'autre à la critique. Mais ce n'était point par une simple comparaison et encore moins par un coup d'œil rapide que l'on pouvait porter un jugement convenable sur l'Exposition. Comme nous l'avons dit, elle était unique; elle avait besoin d'être jugée d'après ses caractères, et pour cela il fallait réellement l'étudier en elle-même. Il fallait, suivant les expressions de Sterne, abandonner les rênes de son imagination et se laisser charmer sans savoir pourquoi, sans s'inquiéter comment. L'Exposition avait le charme et aussi l'ensemble complet de la vie réelle. En s'y prenant bien, un visiteur n'avait besoin de rien, excepté d'un lit en dehors de l'Exposition. Il pouvait entrer à huit heures dans le jardin réservé et rester dans le parc jusqu'à onze heures du soir. Pendant ces quinze heures, il n'était sorte de besoin dont le Champ de Mars ne pût lui offrir la satisfaction. Non-seulement il pouvait manger, mais il pouvait manger à son gré les mets de son pays; il pouvait avoir ses lettres après son dîner, il pouvait trouver là presque autant d'amusements que sur les boulevards.

En un mot, c'était autant que possible un résumé de la vie. C'était une exposition non-seulement de l'industrie, mais des industries de toutes les nations, et, ce qui plus est, c'était aussi l'exposition des industriels de tous les âges du monde. Les galeries de l'histoire du travail n'ont été complètes qu'assez tard, et il est fort à regretter qu'elles aient dû être fermées si tôt. Une révolution prodigieuse s'est faite dans le monde depuis l'âge de la flèche, de la pierre, jusqu'à l'Exposition de Paris. Tous les degrés du développement civilisateur étaient là représentés comme ils ne l'ont jamais été auparavant, et il ne sera pas facile de réunir à nouveau une collection aussi complète. A côté de la stérilité de la vie primitive, la variété féconde de la vie moderne ressortait d'une manière étonnante. La religion, la philanthropie, la science et les arts étaient représentés et pouvaient être appréciés côte à côte. Ce qui faisait, en effet, le caractère de cette Exposition, c'est que rien n'en était exclu; elle pouvait à bon droit revendiquer, à son bénéfice, le vieux titre classique d'Exposition universelle (the world displayed). En tous cas, il n'y a jamais eu de plainte moins raisonnable que celle qui consiste à dire qu'il n'y avait pas de coup d'œil, ou bien que le palais était insignifiant. Le grand triomphe du pa

lais de l'Exposition, c'était de n'être point du tout un palais. On pouvait trouver des coups d'œil partout ailleurs, et quant au palais, on n'avait qu'à faire une promenade dans Paris pour en voir. Mais on était venu pour voir l'Exposition de l'industrie, et c'était bien là ce qu'on voyait. Pouvoir étudier un germe particulier d'industrie dans toutes ses modifications et ses combinaisons, ou bien embrasser dans leur ensemble tous les produits d'une région donnée, c'est là tout ce que l'on peut demander, et c'était là aussi le résultat que l'on obtenait en un clin d'œil. Vous n'aviez qu'à suivre chaque galerie dans son développement, et vous voyiez, malgré vous, tous les degrés de chaque classe particulière de produits. Vous n'aviez qu'à couper ces galeries transversalement, et vous traversiez tous les genres d'industrie d'un même pays pour atteindre d'un côté le petit pavillon monétaire, qui semblait montrer par sa position centrale que l'argent est la base de tout; ou bien encore, en vous dirigeant en sens inverse, vous arriviez à la galerie des aliments, sans lesquels il n'y a point de travail possible.

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Ce n'était pas simplement le monde exposé, c'était aussi le monde disposé. » Si la disposition était parfois trop régu lière, on s'en dédommageait dans le parc, qui permettait de s'étendre à loisir.

On a souvent répété que le parc était le point sans égal de l'Exposition, mais, en réalité, c'était le complément nécessaire de l'ensemble. Un simple bazar ne représente pas l'industrie humaine, mais l'Exposition renfermait aussi des maisons et des écoles, des églises et des établissements de bienfaisance, des théâtres, des ateliers et des jardins. Il est merveilleux que toute cette quantité de constructions diverses aient pu sortir de terre en deux ou trois mois, et il est déplorable de les voir disparaître en moins de temps encore. N'y eût-il eu que le parc seulement, la Commission impériale aurait mérité largement les louanges de lord Granville.

Les expositions ont pour conséquence naturelle de nous mettre en état d'apprécier exactement l'état du progrès artistique et industriel, et de nous suggérer ainsi des perfectionnements dont elles tracent la voie. Il y a des raisons de croire que les Anglais ont tiré grand profit de l'Exposition dernière. Elle semble avoir produit chez nous la conviction que nous avons beaucoup à faire pour soutenir notre rang dans l'industrie, sans parler des arts. N'eût-elle servi qu'à donner chez nous un élan nouveau à l'instruction et un avertissement à nos artisans, nous

lui devrions déjà une profonde reconnaissance. Mais, en outre, on a fait observer avec justesse dans le banquet que les expositions, sans pouvoir assurer le règne de la paix universelle, ont une tendance à donner au public une idée nette de la valeur de la paix et de la grandeur des intérêts que la guerre met en péril.

On a dit à un certain instant que le danger de troubler l'Exposition de Paris avait été pour quelque chose dans la résolution qui a fait différer, sinon totalement répudier l'explosion des tendances guerrières en Europe. Mais l'Exposition est simplement l'ombre dont le commerce et l'industrie forment la substance réelle. Si l'on a eu tant de ménagements et de sollicitude pour l'ombre, que ne doit-on point faire pour la substance? C'est là une réflexion qui gagne du terrain tous les jours. Son influence ira croissant, à mesure que l'on appréciera de plus en plus l'importance de la réalité des choses, et les expositions aident puissamment, sans aucun doute, à faire apprécier cette réalité.

L'Exposition aura longtemps dans le souvenir des peuples le caractère d'une réception des souverains européens aussi bien que d'une exposition des produits de l'activité de leurs sujets. Mais la simple présence de tous ces gouvernants a démontré que l'industrie était elle-même le grand potentat du monde. Dès lors que nous parlons au nom d'un public étranger, nous ne devons pas oublier non plus un mot de remerciment pour les habitants de Paris. La vivacité et l'entrain avec lequel ils ont fraternisé, pendant ce temps, avec tous les peuples et toutes les coutumes du monde a été l'un des éléments les plus remarquables du succès de l'Exposition, et nous craignons bien que la France ne reste à jamais sans rivale à cet égard. Non-seulement toutes choses étaient à l'état d'exposition, mais tout était à sa place et chez soi, dans le Champ de Mars, et autant que possible dans la ville même de Paris. Les dépenses n'étaient point en général aussi exorbitantes qu'on l'avait cru d'abord. En somme, il restera dans la mémoire de notre génération peu de souvenirs plus agréables et plus frappants que celui de Paris en 1867. Dans cette circonstance, les Français ont bien mérité du reste du monde.

S. 1. La richesse forestière de l'Autriche.

Dans une des parties du parc s'élèvent trois grands chantiers. D'énormes tiges de bois en grume, des frênes, des sapins et des chênes, sont couchés à terre; des billes colossales se dressent, mesurant près de deux mètres de diamètre; les poutres équarries s'empilent; des rondelles, débitées parmi de nombreuses essences, s'élèvent en échafaudage. Au centre des chantiers se dessine une cabane en bois sur laquelle s'appuient, dans une disposition des plus pittoresques, des douves, des cercles, des paniers, et où sont appendus la hache, les coins, les griffes en fer, les outils et le barillet du bûcheron.

C'est là que l'Autriche a exposé les échantillons de ses produits forestiers, une des sources les plus fécondes de ses richesses naturelles. Jusqu'en ces derniers temps, privée de voies faciles de communication, l'Autriche était impuissante à tirer parti de ces trésors accumulés depuis des siècles, et l'exportation de ses bois n'entrait que pour peu, comparativement du moins, dans les revenus de l'empire; mais, en pénétrant dans les contrées forestières, les chemins de fer ont déjà considérablement facilité les transports et donné à ce commerce un développement tel, qu'en 1865 l'exportation des bois de l'Autriche atteignait le chiffre de 1820 911 stères. Les années qui ont suivi ont été plus productives encore, et l'avenir doit de beaucoup dépasser ces chiffres. Il suffit de se rendre compte, par un coup d'œil rapide, des immenses réserves forestières que l'Autriche a à sa disposition sur tous les points de son vaste empire, dans la Croatie et l'Esclavonie, dans les provinces illyriennes, dans la Galicie et la Bukovine, enfin dans les pays du nord-ouest.

En Croatie et en Slavonie, où les bois occupent près d'un million d'hectares, l'exploitation ne se fait guère que sur les contrées qui avoisinent les ports de mer; on n'attaque, pour ainsi parler, que la lisière de ces immenses forêts; l'intérieur reste toujours inaccessible, à défaut de moyens de communications. Dans les contrées les plus basses du royaume, dans celles qu'arrosent la Drave et la Save, se trouve le chêne blanc avec son développement merveilleux; il atteint jusqu'à 40 mètres et cube de 10 à 16 stères. Sur les collines et la partie la

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