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intérieur dans lequel existent et les catégories et les rapports. Comme l'écriture imprime son cachet au langage et influe sur l'élaboration de la parole, l'écriture idéographique arrête plutôt qu'elle ne facilite le perfectionnement de la langue; et, d'un autre côté, le langage lui-même réagissant sur la perception des idées et l'élaboration de la pensée, son imperfection accoutume l'intelligence à se contenter de pensées vagues, mal circonscrites, enveloppées d'une sorte de nuage.....

Il est évident que l'auteur de ce Mémoire a cherché dans la théorie, plutôt que dans les faits, la solution des questions proposées. Non seulement il admet en général une influence de l'écriture sur le système grammatical des langues, mais encore il n'hésite point à caractériser l'espèce d'influence qui appartient à chacun des deux genres d'écriture; celle que l'écriture idéographique exerce sur le langage, ne lui paraît propre qu'à en diminuer les ressources et à en arrêter le perfectionnement, et ces fâcheux effets ne lui semblent pas même, comme à l'un des plus profonds et des plus savans philologues de nos jours, M. G. de Humboldt, compensés par des avantages dignes d'entrer dans la balance; l'écriture phonographique, au contraire, et surtout l'écriture alphabétique est, à son avis, éminemment propre à favoriser les développemens d'une langue, à multiplier les richesses de sa nomenclature et les ressources de sa syntaxe.

Des conclusions toutes contraires ont été suggérées à l'auteur du Mémoire n° 3, ayant pour épigraphe : Gentes quoque ac loca et alia multa reperias inter nominum causas. (Quintil., Instit. orat. I, 4.), par les faits, ou du moins par l'aspect sous lequel ils se sont offerts à ses méditations. Le mémoire qu'il a adressé cette année à la Commission, n'est que la suite et le complément d'un premier travail qu'il avait présenté au concours en 1826. Sans se faire connaître, il a pris soin de nous instruire de cette circonstance, et nous a mis à portée de remonter à son premier Mémoire, en donnant au second la même épigraphe qu'il avait adoptée la première fois. La Commission, qui n'a vu en cela rien d'irrégulier, a dû réunir ces deux parties d'un même travail, et les soumettre à un seul examen : elle a reconnu que les idées de l'auteur n'avaient éprouvé aucun changement; que le système qu'il avait adopté d'abord, ne

différait en rien des conclusions qu'il a tirées en dernier lieu de ses recherches; qu'il a seulement multiplié les exemples, ajouté de nouveaux développemens à ses premiers raisonnemens, insisté avec une nouvelle force sur les résultats. Avant de donner une idée de ce travail, qui est plus çonforme que le Mémoire no 1, aux conditions énoncées dans le programme, nous ne pouvons nous dispenser d'observer que l'auteur a eu tort de croire que la Commission avait d'avance une opinion toute formée sur le problême dont elle demandait la solution, et qu'un travail dont les conclusions seraient contraires à cette opinion, n'obtiendrait pas d'elle un accueil favorable.

L'auteur pense qu'il est impossible de résoudre les questions proposées par des preuves directes et de fait, qui équivalent à des démonstrations et forcent l'assentiment, parce qu'il faudrait pour cela pouvoir remonter à l'origine primitive de plusieurs langues, et suivre l'histoire de la formation et des variations de leur système grammatical pendant une suite de siècles, tant avant que les nations qui les parlent eussent aucune écriture, que postérieurement à l'invention ou à l'adoption de l'un des deux genres d'écriture. Toutefois, en comparant le système grammatical de diverses langues, placées dans des circonstances semblables ou opposées sous le double rapport, soit de la possession d'une écriture quelconque ou de l'absence de toute écriture, soit de l'écriture idéographique ou phonographique, il se croit suffisamment autorisé à affirmer que la différence qu'on observe entre les langues riches en catégories, en formes ou en flexions, et les idiomes qui en sont dépourvus, ou n'en ont qu'un très-petit nombre, ne tient point du tout, ou du moins tient pour bien peu de chose à la nature de l'écriture.

Les preuves de cette assertion, ce sont 1° l'extrême ressemblance qui s'est conservée dans les formes grammaticales des divers idiomes d'une même famille et des dialectes d'une même langue, quoique les uns aient été parlés par des peuplades qui n'ont eu une écriture quelconque que quinze ou vingt siècles. après l'époque où les autres ont joui de cet avantage; 2° que la même simplicité du système grammatical, la même pauvreté ou la même absence de catégories ou de flexions, se remarquent chez les nations dont les unes ont eu de tous temps une écriture idéographique, tandis que les autres, ou sont restées pri

vées d'écriture, ou ont adopté une écriture alphabétique: tels sont les Chinois, comparés aux Birmans et aux Malais; 3o que chez des peuples qui étaient en possession d'une écriture alphabétique, les formes grammaticales, au lieu de se multiplier, se sont en grande partie effacées et ont disparu peu à peu, ce qui s'observe dans la plupart des idiomes vulgaires de l'Inde, dérivés du samscrit, et spécialement dans le Bengali; l'auteur aurait pu ajouter dans un grand nombre des langages de l'Europe, dérivés du latin, dans le grec moderne, et dans l'arabe vulgaire.

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De plus, l'auteur fortifie son opinion de quelques considérations. Il fait observer qu'il n'est guère possible de douter que partout le langage ne fût déjà réduit en système, avant que l'on connût l'écriture; que partout, et notamment en Chine et dans l'ancienne Égypte, l'écriture, pendant long-temps, ne fut pas d'un usage assez répandu pour exercer une influence puissante sur le langage de la masse de la nation; que d'ailleurs l'écriture idéographique ne fut jamais entièrement privée du concours de l'écriture alphabétique, vérité que suggère la simple théorie et qui est confirmée par de nouvelles découvertes.

Enfin, s'il fallait rendre raison de ces différences dont on a cherché l'origine dans l'influence de l'écriture, l'auteur croirait plutôt en découvrir la cause dans la nature opposée des langues monosyllabiques ou polysyllabiques, dans la diversité du génie des peuples, produit d'une multitude de circonstances souvent inappréciables; surtout, dans la littérature et dans les compositions primitives qui, chez chaque nation, lui ont servi de modèle et de type.

De quelque talent qu'ait fait preuve l'auteur du Mémoire no 1, et quelque soin que celui du Mémoire no 3 ait apporté à multiplier les faits et à en faire ressortir les conséquences, la Commission a pensé que la théorie du premier n'était pas à l'abri de quelques fortes objections, et ne se trouvait pas suffisam ment appuyée sur des faits incontestables; et que les inductions que le dernier a tirées des faits, perdraient peut-être de leur valeur, si, au lieu de ne juger du système grammatical de divers idiomes que par les règles nues de la grammaire, et par l'écorce, s'il nous est permis d'user de cette expression, on pénétrait dans le génie des langues, et on en découvrait par

une étude plus approfondie toutes les ressources. Les efforts faits pour résoudre le problême ayant conduit deux hommes d'un mérite distingué, quoique divers, à des résultats directement opposés, la Commission a mieux senti toute la difficulté d'arriver à une solution complète de la question, du moins dans l'état actuel de nos connaissances. Pour être juste envers les deux auteurs, elle n'a point voulu adjuger le prix d'un combat où elle ne pouvait discerner le vainqueur. Elle a arrêté de leur donner à tous deux un haut témoignage de son estime et du cas qu'elle fait de leurs travaux, en proclamant leurs noms dans cette séance solennelle, et de partager également entre eux la somme qui était destinée au meilleur Mémoire.

Le Mémoire n° 1 a pour auteur M. le baron de Massias. L'auteur du Mémoire n° 3 est M. Schleyermacher, bibliothécaire à Darmstadt.

La Commission propose, pour sujet du prix qu'elle adjugera le 24 avril 1829, l'analyse raisonnée du système grammatical de la langue basque. Le prix sera de 1,200 francs. Toute personne est admise à concourir, excepté les membres résidans de l'Institut. Les Mémoires seront écrits en français ou en latin, et ne seront reçus que jusqu'au 1er janvier 1829.

2. COMPARAISON DE L'ÉCRITURE UNIVERSELLE du D' FRANKLIN, avec celle du D' GILCHRIST. ( Oriental Herald; mai 1826, p. 308.)

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De tous les projets qui, depuis nombre d'années, ont été proposés dans le but de procurer aux hommes l'immense avantage de pouvoir se communiquer leurs idées au moyen d'une seule et même écriture, on n'en a vu aucun non pas exécuté, mais seulement tenté avec quelque succès, malgré toute l'activité, on pourrait même dire l'opiniâtreté des auteurs à réaliser leurs chimères. Si l'on a essayé le plan de Volney, c'est qu'il contenait des idées vraiment neuves, des observations judicieuses, et plus que tout cela l'essai d'un système de transcription des mots orientaux en caractères européens, qui méritait, sous plus d'un rapport, l'attention des philosophes et des gens de lettres. Cependant on y renonça bientôt par des raisons qu'il serait trop long de rapporter ici, mais qui sont habilement développées par le savant auteur des Recherches sur les langues

tartares, dans un article de ses Mélanges asiatiques où il examine et discute, avec cette clarté, et cette finesse d'observation qui lui sont familières, plusieurs points du système de Volney.

M. Gilchrist, qui vient nous exposer ses idées sur le même sujet, est auteur d'un dictionnaire anglais - hindostani estimé, qui est précédé d'une introduction où il donne, de son côté, un système de transcription des mots orientaux, et où il dit, je crois, quelque chose de son plan d'écriture universelle. Aujourd'hui il nous assure qu'il est arrivé au nec plus ultrà de ses travaux sur ce sujet, et qu'il est à la veille d'adopter ce système universel qu'il projette depuis si long-temps. On doit regretter que M. G. n'ait pas employé à des travaux plus solides et plus utiles, le temps qu'il a consacré, on pourrait même dire perdu, à méditer et à combiner un plan qui ne sera probablement jamais d'aucune utilité. Quel est ce plan? M. G. ne nous l'expose pas dans l'article de l'Oriental Herald que nous avons sous les yeux, et qui ne contient qu'un parallèle entre l'écriture que Franklin avait imaginée, non pas comme pouvant servir à tous les peuples de l'univers, mais applicable seulement à l'anglais, et l'écriture universelle de M. G.

Dans l'alphabet que Franklin avait imaginé pour écrire l'anglais comme on le prononce, les lettres c, j, q, w, x et y, sont retranchées comme inutiles, mais il y a six nouveaux signes qui, combinés avec ceux des anciens qui n'ont pas été retranchés, doivent suffire pour exprimer tous les sons distincts du langage. La différence des voyelles brèves et longues est exprimée par une seule ou par deux voyelles. Quelques-unes des idées relatives à ce nouvel alphabet, sont consignées dans deux lettres écrites avec les signes qui le composent, et M. G. transcrit à son tour ces deux lettres suivant son système. Voilà, à bien dire, à quoi se réduit le parallèle annoncé par M. G., entre ces deux écritures. Le reste n'est qu'un verbiage ampoulé et obscur, où l'on n'aperçoit que la mauvaise humeur d'un homme. mécontent de ne pas voir réussir ses projets. Au reste, il est facile de se convaincre, en comparant l'une avec l'autre ces lettres écrites suivant les deux systèmes, que les modifications apportées par M. G. à celui de Franklin, sont très-légères, et se réduisent à peu près à la suppression du redoublement des

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