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en même temps que Holtoman par la cour d'Angleterre, sur le cas de Mendoza, l'ambassadeur d'Espagne, accusé d'avoir conspiré contre la reine Élisabeth. Ces deux légistes ont été d'accord, dans leurs conclusions, sur le principe qu'un ambassadeur, quoique pris en flagrant délit de conspiration contre le gouvernement du pays où il est accrédité, ne peut pas être puni de mort, mais qu'il doit être renvoyé à son maître, pour être puni à sa discrétion. Par suite de cette consultation, Mendoza reçut seulement ordre de quitter le royaume, et un agent fut envoyé en Espagne pour présenter une plainte contre lui'.

Tel fut aussi l'avis de Grotius, qui, écrivant au commencement du siècle suivant, soutenait que le consentement tacite des nations avait exempté la personne des ambassadeurs et leur suite de la juridiction criminelle et civile de l'état par lequel l'ambassadeur avait été reçu à cette condition sous-entendue, dans tous les cas, excepté ceux où la juste nécessité d'une défense légitime crée une exception à toutes les lois humaines 2.

Il y a cependant un cas remarquable, qui est arrivé peu de temps après la publication de son ouvrage, et qui semble militer contre le caractère sacré et inviolable attribué à ces personnes. Ce fut celui de Don Pantaléon Sa, frère de l'ambassadeur portugais en Angleterre, qui fut jugé, trouvé coupable, et exécuté pour un meurtre atroce, dans l'année 1653.

D'après le compte rendu de cette affaire par Zouch, élève et successeur de Gentili dans la chaire de droit à Oxford, et qui fut aussi un des juges commissaires dans la procédure de l'accusé, il paraît que ses moyens de défense comme appartenant à la suite de l'ambassadeur ont été rejetés par le tribunal. S'il avait été l'ambassadeur lui-même, il n'y a pas le moindre doute, suivant l'opinion de Grotius et d'autres pu

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1 WARD, History of the law of nations, vol. II, p. 523.
2 GROTIUS, De jure belli ac pacis, lib. II, cap. XVIII, § IV.

§ 15. Wicquefort, né en 1598, mort en 1682.

blicistes, qu'il aurait dû être renvoyé au tribunal de son pays pour y être jugé. Mais l'autorité de ces écrivains, en étendant les priviléges d'exterritorialité aux personnes de la suite de l'ambassadeur, fut repoussée par le tribunal, et Zouch luimême donna son adhésion à ce jugement'.

La conduite de Cromwell, dans ce cas singulier, est sévèrement condamné par Leibnitz, comme une violation du droit des gens; et Bynkershoek, dont l'ouvrage De foro legatorum fut publié en 1721, déclare qu'il n'a pu trouver, après des recherches très-diligentes, que quatre cas où l'ambassadeur et les personnes de sa suite avaient été jugés et punis dans le territoire de l'état auprès duquel ils étaient accrédités. Il ajoute que tous ces cas étaient distingués par des circonstances particulières, ou bien qu'ils avaient été condamnés par les publicistes; et même s'ils n'avaient pas été désapprouvés, les exemples de l'application de la règle générale ont beaucoup plus de poids que les exceptions, comme preuves de l'usage et de l'opinion générale des hommes civilisés".

Un des ouvrages les plus remarquables publiés pendant le dix-septième siècle concernant les droits et les devoirs des ministres publics, est celui de Wicquefort. Cet auteur naquit à Amsterdam en 1598, et devint ministre résident de l'électeur de Brandebourg à Paris, en 1626. Il resta dans ce poste jusqu'en 1658; quand le cardinal Mazarin, ayant intercepté sa correspondance d'un caractère offensant pour ce ministre, lui ordonna de quitter le royaume, et, sur son refus, le fit emprisonner à la Bastille, et l'envoya ensuite sous escorte à Calais, où il fut embarqué pour l'Angleterre. A son retour dans son pays natal, Wicquefort fut nommé, à la recommandation du

1 Ric. Zouch, Solutio quæstionis veteris et novæ de legati delinquentis judice competente. Oxon. 1657.

2 LEIBNITZ, De jure suprematus ac legationis principum Germaniæ, cap. VI, p. 44. BYNKERSHOEK, De foro legatorum, cap. XVIII. 3 L'Ambassadeur et ses fonctions, à Cologne, 4679.

grand-pensionnaire Jean de Witt, historiographe de la république et secrétaire interprète des dépêches. Il recevait en même temps une pension secrète de Louis XIV. Il fut nommé par le duc de Lunebourg, son résident à la Haye, et ayant été accusé, en 1675, d'avoir communiqué les secrets de l'état aux étrangers, il fut jugé par la cour suprême de la province de la Hollande et condamné à être emprisonné pour la vie. Il resta en prison jusqu'en 1679, quand l'adresse et l'amour filial de sa fille l'aidèrent à s'évader. Il se retira à Zelle dans le pays de Hanovre, où il mourut, à l'âge de quatre-vingt-cinq ans, en 1682.

De l'ambassadeur et de ses fonctions.

La vie bizarre et singulièrement variée de cet aventurier Son ouvrage pourrait avoir contribué à fournir des matériaux pour son traité jadis célèbre, et plutôt historique que didactique dans son caractère. Cet ouvrage fut composé pendant son long emprisonnement en Hollande. Il dit lui-même dans la préface : <«<Pour moi, je ne promets pas un traité où il ne manque rien, tant parce que la matière est inépuisable en elle-même, que parce que cette production s'étant faite dans l'ennui d'une très-dure et insupportable captivité, il ne se peut que l'on ne trouve partout des marques de mon chagrin, aussi bien que des infirmités qui me sont communes avec tous les hommes, et que je reconnais être grandes en ma personne. Je n'avais dans ma solitude d'autre compagnie que celle de quelques livres, qu'il fallait mendier du fiscal, ni d'autres divertissements que celui de la lecture. Celle de l'histoire moderne et de tous les temps faisait une partie de mon occupation; je me plaisais à y remarquer quelques passages qui eussent pu servir, sinon à la composition d'un traité régulier et méthodique, du moins au soulagement de ceux qui, ayant plus de fonds et plus de capacité que moi, pourraient aussi s'y appliquer avec plus d'assiduité et avec plus de succès. Mais mon malheur m'ayant fait perdre toutes mes pensées, et ayant rompu toutes mes mesures, il a fait succéder à un projet assez raisonnable,

$ 16. Bynkershoek.

cet amas d'exemples qui ont été publiés sous le titre de Mémoires touchant les ministres publics. Ils parlent si amplement des exemptions, immunités, priviléges et avantages, que le droit des gens leur attribue, que pour leur donner quelque forme de traité, il suffisait, à mon avis, de démêler et de rectifier dans cette troisième édition ce qu'il y a de confus et d'irrégulier dans les deux premières. Je sais bien que tout ce que j'en pourrais dire ne fera pas une science qui ait ses principes mathématiques, ou qui soit fondée sur des raisons démonstratives sur lesquelles on puisse faire des règles certaines et infaillibles; mais aussi crois-je pouvoir réduire tout mon discours à des maximes où il se trouvera quelque chose de fort approchant d'une infaillibilité morale. >>

Bien sûrement le traité de Wicquefort, considéré comme ouvrage scientifique, mérite très peu le caractère « d'infaillibilité morale » que lui attribue l'auteur avec tant de complaisance. En effet ce n'est qu'une collection d'exemples historiques, ou d'anecdotes, plus ou moins applicables au sujet, mais rassemblés sans méthode et sans que les principes, qui doivent guider leur application à des cas analogues, y aient reçu un développement suffisant.

Le caractère du traité de Bynkershoek De foro legatorum Traité du juge est bien différent. Le mérite de cet excellent ouvrage est encompétent des ambassadeurs. core rehaussé par la circonstance qu'il fut écrit à la bâte, au milieu des distractions d'autres occupations, et sur une affaire particulière alors pendante devant la cour suprême de la Hollande, dont l'auteur fut un conseiller très-distingué '.

1 «Tam festinante calamo, et nunc scriptum vides **** memineris etiam, me non aliter scribere, quam solent occupatissimi.»> (Præf. in fin.)

Le traité de BYNKERSHOEK, De foro legatorum, fut publié pour la première fois à la Haye en 1721. Une traduction en français, par son ami Barbeyrac, a paru en 4723, sous le titre de Traité du juge compétent des ambassadeurs. L'auteur parle de cette version, dans une lettre au traducteur, datée du 25 decembre 4722, dans

Dans le premier chapitre de ce traité, Bynkershoek traite de divers rangs et titres de ministres publics, et démontre qu'ils doivent tous jouir également de la protection du droit international. Les écrivains antérieurs sur cette matière avaient confondu le legatus du droit romain, le député d'une province ou d'une ville envoyé à Rome pour les affaires de ses commettants, avec l'ambassadeur moderne représentant un état souverain envers un gouvernement étranger. En effet on ne trouve qu'un seul passage des jurisconsultes qui se serve du mot legatus dans le sens moderne d'un ministre public'. Les analogies du droit romain ne pouvaient donc jeter qu'une faible lumière sur cette question qu'il fallait examiner d'après les principes. Il passe donc à la considération des principes par lesquels la question de juridiction dans le cas des ambassadeurs doit être examinée.

(Chap. 2.) Il pose comme base de tout son raisonnement, que toute juridiction civile est fondée sur la sujétion de la personne, ou de la chose, au souverain du lieu. La juridiction civile des tribunaux de justice dépend par conséquent du domicile quant à la personne, et de la loi Loci rei sitæ, quant aux biens. Mais il demande comment la personne ou les effets d'un ambassadeur qui, par une fiction de droit, est supposé garder encore son domicile d'origine, de résider dans le territoire de l'état qu'il représente, et dont les biens mobiliers sont régis par la même loi que sa personne, peuvent être arrêtés ou saisis par autorité de la loi du pays où il est accrédité?

Il éclaircit son raisonnement (chap. 3) par le cas analogue

les termes suivants : «Quod libellum meum De foro legatorum gallice verteris, quod illustraveris, quod denique ubi a me dissentis, tam amice dissereris eorum omnium nomine ago tibi, quas debeo, gratias relaturus etiam si potero, etc. >>

1 «Si quis legatum hostium pulsasset, contra jus gentium id commissum esse existimatur, quia sancti habentur legati» (Dig. 1. L., tit. VII. De legat. leg. ult.)

Juridiction civile sur les ministres publics et leurs biens.

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