Sidor som bilder
PDF
ePub

NOTICE SUR LES MOUTONS DE LA KARAMANIE

( ASIE-MINEURE).

[Nous extrayons du Bulletin de la Société impériale zoologique d'acclimatation la communication suivante, faite à la Société par M. Texier, sur les moutons de Karamanie (Asie-Mineure) donnés à la Société impériale d'acclimatation par S. Exc. le maréchal Vaillant.]

Le nom de karamanli donné aux moutons de la Société impériale d'acclimatation indique qu'ils sont originaires de Karamanie. La particule li, en langue turque, indique la provenance c'est ainsi qu'on dit Osmanli, descendant d'Osman; Tunisli, habitant de Tunis, etc.

La Karamanie est une des plus grandes provinces de l'Asie-Mineure. Elle comprend le territoire de l'ancienne Cappadoce, celui de la Pamphylie et d'une partie de la Cilicie. Ces contrées ont été de tout temps renommées par la beauté et l'abondance de leurs troupeaux. Strabon (liv. XII, p. 525) nous apprend que chaque année, indépendamment d'un faible tribut en argent, la Cappadoce fournissait au roi de Perse 1,500 chevaux, 2,000 mulets et 50,000 moutons.

Les Cappadociens ont toujours été célèbres dans l'art d'élever les chevaux et le bétail. La table de Peutinger indique le haras d'un certain Pampalus qui élevait principalement des chevaux de char (equi currules).

La Cappadoce se distingue par un caractère qui est déjà mentionné par les géographes de l'antiquité : elle est complétement privée de bois; de là lui vient le nom de Axylon, qui lui était donné par les Grecs. Son territoire se compose de vastes steppes parcourus aujourd'hui par les Turcomans nomades. Au centre est un grand lac salé qui fournit en abondance du sel à toute la contrée. Comme cette substance n'est soumise à aucun impôt en Turquie, ce sel se vend sur le pied de 20 paras (10 à 12 c.) la livre turque (1 kil. 250). Les éleveurs ont l'habitude d'en distribuer une très-grande quantité au bétail, et pour que les ani

maux n'en mangent pas trop à la fois, on le mélange avec un peu d'argile rouge. Le matin et le soir, les bergers en déposent des petits tas sur des pierres plates, et le bétail, bœufs, moutons ou chèvres, vont lécher cette poudre salée. Dans les provinces où l'on trouve du sel fossile, on est dans l'usage de mettre un bloc de sel près de la mangeoire des chevaux. Le cheval lèche ce sel en mangeant son orge.

Tout le sous-sol de la Cappadoce est composé de tuf volcanique. L'eau est rare dans toute la contrée; mais ce tuf est recouvert par une épaisse couche de terre végétale qui forme, au printemps, une prairie naturelle où les troupeaux trouvent une pâture abondante. Le droit de parcours étant presque sans limites, les nomades se déplacent à mesure que l'herbe s'épuise.

Ce caractère de la contrée s'étend au nord, bien au-delà de la province de Cappadoce ou Karamanie, jusqu'au territoire d'Angora. Cette province porte le nom de Haïmana : c'est là surtout que se rencontrent les chèvres à toison soyeuse, connues en Occident sous le nom de chèvres d'Angora.

Tout le centre et le sud de la Caramanie nourrissent d'innombrables troupeaux de moutons, qui diffèrent de ceux d'Europe par une particularité remarquable. La queue de ces moutons est comme un appendice de toute la peau du dos; elle forme une masse de graisse qui pèse jusqu'à 6 kilogrammes, et quelquefois davantage.

Ces moutons existent dans le pays de temps immémorial, car ils sont cités par Hérodote en ces termes (Hérodote, liv. III, chap. cxIII) : « Les Arabes ont deux espèces de moutons dignes d'admiration, et qu'on ne voit point ailleurs. Les uns ont la queue longue au moins de 3 coudées; si on la laissait traîner, il y viendrait des ulcères, parce que la terre l'écorcherait; mais aujourd'hui tous les bergers du pays savent faire des petits chariots sur chacun desquels ils attachent la queue de ces animaux. L'autre espèce de moutons a la queue large d'une coudée. C'est cette dernière espèce qui, par suite des relations avec

la Syrie et l'Asie-Mineure, s'est propagée en Cappadoce au point d'avoir remplacé toute autre race de mouton. »>

Maintenant, à Constantinople comme à Smyrne, et dans toutes les villes de l'intérieur, on ne mange plus que cette espèce de moutons à grosse queue. On la retrouve dans tout le nord de la Perse, et j'ai même remarqué que dans cette dernière contrée les moutons sont infiniment plus grands; ils sont de couleur fauve.

La laine de ces moutons est assez grossière, elle ne pourrait être utilisée pour la confection des draps fins; mais on l'emploie dans la fabrication des feutres, et surtout des tapis turcs, qui sont connus en France sous le nom de tapis de Smyrne, sans doute parce que le commerce les tire de cette échelle, car dans toute la ville de Smyrne il n'y a pas une seule fabrique de tapis: Smyrne les tire d'Ouschak, ville de l'intérieur. Les petits tapis de prière, vendus par le commerce sous le nom de tapis de Perse, se fabriquent à Guerdes, autre ville d'Asie-Mineure.

La laine de mouton de Caramanie sert aussi à fabriquer des étoffes pour les tentes, et des manteaux noirs appelés par les Turcs habas. Ces manteaux se fabriquaient anciennement en Cilicie, d'où ils avaient pris le nom de cilices; c'était le costume de deuil de l'antiquité.

La fabrique française emploie une grande quantité de laines d'Asie, qui arrrivent en France par l'échelle de Smyrne, sous le nom de laines de Karamanie. Elles sont dans leur ensemble de cette couleur grise, connue dans le commerce sous le nom de burel: cette nuance résulte des diverses couleurs mélangées, depuis le gris jusqu'au fauve foncé.

Les laines de Karamanie entrent avantageusement dans la fabrication de quelques grosses étoffes, notamment les tissus pour cabans des marins du commerce sur les côtes de la Méditerranée, les limousines pour voituriers, etc. Mais la destination la plus générale s'applique à la fabrication des couvertures pour le service des troupes françaises de terre et de mer la nuance des laines, leur souplesse,

les rendent parfaitement convenables pour cet emploi, La maison Tesserenc et Calvet, de Lodève, qui, depuis nombre d'années est chargée de la fourniture des armées, en consomme des quantités considérables.

A Marseille, le prix moyen de ces laines était de 50 à 60 fr. les 50 kilog. nets de droits. Les droits étaient de 22 fr. les 100 kilog.; mais depuis le décret du 19 janvier 1853, le droit a été réduit à 3 fr. les 100 kilog.; mais en revanche, le prix des laines s'est considérablement élevé et se maintient entre 80 et 85 fr. les 50 kilog. Les fabricants pensent que, vu l'extension donnée à la fabrication des tissus de laine, ces prix se maintiendront longtemps.

Ces laines, arrivant en suint, doivent éprouver chez les fabricants un nouveau lavage, qui occasionne encore du déchet. Convenablement assorties, ces laines sont employées aussi pour la fabrication des lisières et de la matelasserie commune.

La race des moutons à grosse queue est répandue dans toute l'Asie-Mineure et la Perse; elle est moins commune en Egypte; elle est à peine connue dans l'Afrique française, mais elle est extrêmement répandue dans les régions du cap de Bonne-Espérance (Histoire générale des voyages, t. V, p. 214). Cette queue ressemble à un énorme coussin de graisse (t. III, p. 297); on voit des moutons dont les queues sont si grosses, que les bergers sont obligés de les soutenir par un petit chariot pour aider l'animal à marcher.

C'est exactement ce que dit Hérodote. J'ai, de mon côté, observé le même usage dans les environs de Konieh. En Perse, j'ai vu des béliers, engraissés pour le sacrifice du courban Baïram, qui avaient acquis le volume d'un veau. La queue ne pesait pas moins de 20 livres. Ces animaux ne marchaient plus : ils pouvaient à peine se tenir debout.

La graisse de ces queues est légère, huileuse, et est employée dans les cuisines en guise de beurre; elle sert en Orient, où le porc est abhorré, pour tous les usages où nous employons l'axonge. On la bat dans l'eau, on en retire

la Syrie et l'Asie-Mineure, s'est propagée en Cappadoce au point d'avoir remplacé toute autre race de mouton. >>

Maintenant, à Constantinople comme à Smyrne, et dans toutes les villes de l'intérieur, on ne mange plus que cette espèce de moutons à grosse queue. On la retrouve dans tout le nord de la Perse, et j'ai même remarqué que dans cette dernière contrée les moutons sont infiniment plus grands; ils sont de couleur fauve.

La laine de ces moutons est assez grossière, elle ne pourrait être utilisée pour la confection des draps fins; mais on l'emploie dans la fabrication des feutres, et surtout des tapis turcs, qui sont connus en France sous le nom de tapis de Smyrne, sans doute parce que le commerce les tire de cette échelle, car dans toute la ville de Smyrne il n'y a pas une seule fabrique de tapis: Smyrne les tire d'Ouschak, ville de l'intérieur. Les petits tapis de prière, vendus par le commerce sous le nom de tapis de Perse, se fabriquent à Guerdes, autre ville d'Asie-Mineure.

La laine de mouton de Caramanie sert aussi à fabriquer des étoffes pour les tentes, et des manteaux noirs appelés par les Turcs habas. Ces manteaux se fabriquaient anciennement en Cilicie, d'où ils avaient pris le nom de cilices; c'était le costume de deuil de l'antiquité.

La fabrique française emploie une grande quantité de laines d'Asie, qui arrrivent en France par l'échelle de Smyrne, sous le nom de laines de Karamanie. Elles sont dans leur ensemble de cette couleur grise, connue dans le commerce sous le nom de burel : cette nuance résulte des diverses couleurs mélangées, depuis le gris jusqu'au fauve foncé.

Les laines de Karamanie entrent avantageusement dans la fabrication de quelques grosses étoffes, notamment les tissus pour cabans des marins du commerce sur les côtes de la Méditerranée, les limousines pour voituriers, etc. Mais la destination la plus générale s'applique à la fabrication des couvertures pour le service des troupes françaises de terre et de mer la nuance des laines, leur souplesse,

« FöregåendeFortsätt »