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ne pourraient pourtant jamais aboutir à un résultat satisfai

sant.

Si, d'après ce qui précède, Votre Majesté daigne partager ma conviction que la consolidation de l'union douanière prussienne est la source des plus graves inconvénients et même de sérieux dangers pour la Monarchie; si, d'autre part, Elle daigne reconnaître avec moi qu'on ne peut réagir avec succès contre cette union douanière que par la mise en pratique immédiate de l'article XIX de l'acte fédéral dans le sens de la deuxième partie des propositions du Hanovre, mais que cela n'est possible que dans le cas d'une renonciation générale à des principes exclusifs, la sagesse de Votre Majesté ne méconnaîtra pas la nécessité pressante d'introduire des modifications de détail dans le système douanier appliqué dans la Monarchie jusqu'à ce jour, et d'aller, sous ce rapport, jusqu'à un point qui nous permette d'entrer en négociation avec les autres États de la Confédération germanique au sujet de l'exécution dudit article XIX de l'acte fédéral, et cela à charge de réciprocité.

A ce propos, je crois pouvoir garantir d'avance que le résultat de ces négociations, loin d'imposer à l'État des sacrifices pécuniaires, serait au contraire une cause d'augmentation pour ses recettes, et que, de plus, l'industrie du pays n'en recevrait aucune atteinte. Il appartient naturellement à l'administration des finances de se prononcer définitivement à cet égard. Mais, en partant de mon point de vue, je ne pourrais m'empêcher de me considérer comme obligé en conscience de faire même des sacrifices, si, contrairement à ma conviction, l'État devait avoir à en supporter à la suite de mesures pareilles; car ces sacrifices, je les regarderais certainement moins comme la conséquence d'un acte volontaire que comme le résultat fatal d'une impérieuse nécessité, parce qu'ils seraient le seul moyen de prévenir un mal plus grand, qui pourrait dans la suite attaquer la prospérité et l'influence de la Monarchie jusque dans leurs racines.

D'après l'exposé que je viens d'avoir l'honneur de soumettre à Votre Majesté, j'ose lui proposer respectueusement de daigner

<< Ordonner à l'administration de l'intérieur, que ce soin regarde, de présenter un Mémoire détaillé sur la question de savoir s'il y aurait lieu de modifier la législation douanière existante, et quelles seraient les modifications à у faire pour mettre l'Autriche à même de coopérer à l'exécution de l'article XIX de l'acte fédéral dans le sens de la deuxième proposition faite par le Hanovre, le 9 août 1832, et d'arriver ainsi à neutraliser les effets de l'union douanière prussienne

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L'ENTREVUE DES SOUVERAINS A MUNCHENGRÆTZ ET SES RÉSULTATS.

1136. Metternich à Hügel, à Paris (E. D. secr.). Vienne, le 22 octobre 1833. 1137. Traité entre l'Autriche, la Prusse et la Russie, daté de Berlin, le 15 octobre 1833, contre la non-intervention (Annexe 1 du no 1136). 1138. Projet d'une dépêche de Metternich à Hügel (Annexe 2 du no 1136).

1136. Vous avez le droit d'être surpris du silence que j'ai gardé vis-à-vis de l'ambassade à Paris sur les résultats de notre séjour à Münchengrætz. La raison de ce silence se trouve expliquée par les circonstances suivantes, circonstances indépendantes de nos vœux comme de notre volonté, et dont l'existence nous a fait éprouver de bien véritables regrets.

Voici le fait, que je vous confie sous le sceau du secret.

Le retard qu'avait éprouvé l'arrivée de l'Empereur de Russie en Bohême a dérangé les plans du Roi de Prusse. Ce Souverain avait mis une lenteur calculée dans son arrivée à Teplitz, et il y prolongea le plus longtemps possible son séjour; mais Sa Majesté Impériale n'ayant pu se mettre en route de Saint-Pétersbourg que vers la fin d'août, la rencontre des trois

* La deuxième proposition du Hanovre, datant du 9 août 1832, visait les moyens de faciliter et de favoriser le commerce et le trafic actif en Allemagne en ce qui concernait les matières premières et les produits manufacturés, ainsi que les mesures à prendre en commun contre la contrebande dans l'intérieur de l'Allemagne, Nous aurons lieu de reparler de l'union douanière prussienne, qui s'étendit toujours davantage et prit plus tard le nom d'union douanière allemande. (Note de l'Editeur.)

Monarques a dû coïncider avec les revues de Magdebourg et de Berlin; et vous savez ce qu'est en Prusse une revue arrétée et annoncée ! Le Roi retourna à Berlin et vit l'Empereur de Russie lors de son passage par Schwedt. Tout dans ces faits est simple; mais ce qui a dû nécessairement avoir des conséquences regrettables, c'est qu'il a été impossible de vaincre la répugnance de M. Ancillon à retourner en Bohême et à prendre, en sa qualité de chef du Cabinet prussien, une part personnelle aux travaux des deux Cabinets impériaux. Cette répugnance ressortait de la faiblesse de caractère de M. Ancillon et de quelques singularités regrettables qu'offre la marche de son esprit. Ce ministre est éminemment peureux et constamment dominé par la crainte de se compromettre. Livré à ces sentiments, il a voulu se ménager le rôle de contrôleur des actes de Münchengrætz et en même temps la certitude de pouvoir se réserver une position qui le mettrait à même d'exercer ce contrôle conjointement avec M. le comte de Bernstorff.

MM. les comtes de Nesselrode et de Ficquelmont reçurent alors des deux Empereurs l'ordre de se rendre à Berlin. Ils y portèrent les arrêtés de Münchengrætz, et ce n'est qu'à la suite d'un travail pénible et après plus de trois semaines qu'ils sont enfin parvenus à atteindre leur but. Le Cabinet prussien s'est joint aux Cours impériales, et la seule différence entre les résultats de Berlin et ceux de la réunion en Bohême consiste dans un changement de forme. Les trois Cours ont contracté un engagement formel relativement à leur détermination de s'opposer dorénavant à l'application du faux et dangereux principe de non-intervention. Cet engagement se trouve renfermé dans l'acte ci-joint, qui a été minuté à Münchengrætz et signé à Berlin (no 1137). Les deux Cabinets impériaux eussent désiré que cet acte fût communiqué textuellement et simplement accompagné d'une dépêche dont vous trouverez le projet dans l'annexe (n° 1138). Le Cabinet prussien, par contre, a demandé avec instance qu'on se bornát à communiquer le contenu de l'acte signé à Berlin. Nous avons cédé pour en finir, mais contre notre conviction relativement à l'utilité de la

nouvelle forme. Nous la trouvons moins forte pour le fond, tandis que le mode de communication est peut-être plus sévère. Il nous semble, en effet, que des paroles renfermant un énoncé de principes, et adressées directement à un tiers, portent un caractère plus sévère que la consignation de ces mêmes principes de la part de puissances indépendantes dans le choix des règles de leur conduite, et la communication pure et simple de l'acte qui les renferme, faite franchement par elles à une puissance tierce. A Berlin, on en a jugé différemment, et l'expérience prouvera si la crainte de blesser une puissance placée sur un terrain faux et dangereux aura dicté un conseil salutaire. En dernière analyse, les deux Cours impériales ont pu apporter des facilités dans leur marche à l'égard de la Prusse, car le but principal qu'elles ont dû se proposer se trouve atteint cette puissance est engagée dans leur solidarité.

C'est, au fond, ce que les ministres prussiens auraient désiré pouvoir éviter. Ils n'ont pas entièrement oublié les antécédents de la marche de leur Cour, et en 1833 ils ont encore éprouvé quelque peine à se priver de la possibilité d'un retour aux dangereux errements de 1796. La route qui pouvait y conduire est coupée, et le but des deux Empereurs se trouve ainsi atteint.

Le malheur veut que l'attitude morale de la Cour de Prusse offre un mélange de pouvoir et d'impuissance. La Prusse compte parmi les puissances de premier ordre sans en avoir en réalité la valeur; sorte de juste milieu entre les Cours du premier et du second rang, elle participe aux devoirs des puissances prépondérantes, et sa configuration géographique, jointe au manque de certaines ressources intérieures essentielles, la refoule au second rang. De ces conditions matérielles résultent dans le Cabinet des combats journaliers, lesquels sont augmentés par la nature de l'esprit de son chef actuel. M. Ancillon a de la peine à oublier ce qu'il a été durant le cours de sa vie entière. Prédicateur et professeur, il ne sait pas descendre de la chaire, où la parole seule domine, et s'établir dans l'arène du Cabinet livré à l'action. La contra

diction lui déplait et l'irrite, tandis que la controverse répond à ses habitudes antérieures. La marche et les travaux diplomatiques du Cabinet prussien ne se ressentent que trop de cette habitude; il abonde facilement en déclamations et en démonstrations, mais il conclut rarement. Les dépêches de M. Ancillon regorgent de phrases de rhétorique, mais elles n'épuisent que peu la question pratique, et les Empires cependant courent bien moins de risques à se passer des premières que de la seconde ! Un grand objet toutefois est atteint, et c'est au bienfait obtenu que nous devrons porter le sacrifice de maint regret aujourd'hui stérile.

J'éprouve le besoin d'ajouter encore ici une observation qui devra offrir à M. l'ambassadeur de Russie la preuve que les arrêtés de Münchengrætz reposent sur la base la plus solide que nous connaissions à des travaux diplomatiques, nommément la franche conviction de ceux qui en sont les auteurs, et il n'a jamais existé de conviction plus uniforme qu'entre les deux Empereurs et leurs Cabinets.

En jetant sur les événements de 1830, et sur les suites qu'ils ont eues jusqu'à cette heure, un coup d'œil sévère, mais impartial, il serait impossible de leur reconnaître d'autre valeur que celle du renouvellement de la révolution de 1789. Ce qui toujours se rencontre dans le renouvellement d'un mal, c'est son identité avec le mal primitif; mais il se manifeste cependant une différence notable dans les corps sur lesquels il est appelé à exercer ses ravages. Il suffit d'arrêter un instant ses regards sur les événements de ces derniers temps pour se convaincre que tel est également le cas de la révolution de 1830 comparée à celle de 1789. Tout dans la première révolution a porté le caractère de la force; tout dans la seconde est empreint de celui de la faiblesse. En 1789, le trône était vieux et la Révolution pleine de la séve et de la vigueur de la jeunesse; en 1830, le trône datait de quinze ans, et tous les éléments révolutionnaires étaient vieux. Sans les fautes commises par Louis XVIII et par Charles X, la révolution de 1830 n'eût point dépassé les limites d'une révolte, et ses succès si faciles ne l'ont pas moins réduite à la valeur d'une révolution

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