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naturelle; j'avais à lui parler de choses fort importantes. Il s'agissait, entre autres, des enfants, notamment de Léontine, qui songe sérieusement à épouser Sandor, qui l'a souvent conjurée de se décider. Clément a eu avec Sandor un long entretien d'où il est sorti complétement satisfait. Ce dernier est venu de très-bonne heure ; je lui ai parlé ainsi qu'à Clément, puis je les ai laissés seuls, et, à la suite de cet entretien, le oui décisif a été prononcé.

29 novembre.

J'ai été chez Clément, où j'ai trouvé Tatistscheff; tous deux étaient très-préoccupés des événements considérables qui se déroulent actuellement. Clément a lu des dépêches qu'il envoie en Angleterre. La retraite des ministres Grey et Melbourne, qui ont fait place à un ministère tory qui semble avoir les suffrages de tous les partis, s'effectue sous les auspices les plus favorables, et Clément se sent soulagé depuis qu'il voit Wellington prendre tranquillement les affaires en main sans vouloir les diriger lui-même, car on dit qu'il fera entrer Peel dans le ministère, qui n'est pas encore constitué. En se retirant, Palmerston a écrit à l'envoyé qui se trouve ici, Strangway, un billet remarquable, qui était à peu près conçu en ces termes : « We are out! Les whigs ont fait place à leurs adversaires, et le duc de Wellington est chargé de former le nouveau Cabinet. Montrez immédiatement ce billet au prince de Metternich, qui n'a probablement jamais appris une nouvelle aussi agréable que celle qui lui annonce qu'il est enfin débarrassé de moi. » Clément a fait une noble et fière réponse *.

9 décembre.

Après le diner, Clément a expédié un courrier pour SaintPétersbourg. Tatistscheff est venu le soir et s'est longuement entretenu avec lui des projets de son Empereur, qui veut avoir,

*Voir « Retraite de Palmerston », no 1174. (Note de l'Éditeur.)

au mois de septembre prochain, une entrevue avec le nôtre, et qui veut amener l'Impératrice avec lui.

11 décembre.

Nous avons mis en place un magnifique vase en malachite, que l'Empereur Nicolas vient d'envoyer à mon mari. La forme et la couleur de ce vase sont fort belles; mais il est si grand et si lourd qu'on ne sait pas bien qu'en faire. Nous l'avons logé provisoirement dans le salon des colonnes.

22 décembre.

Après le diner, il m'a fallu aller à la Cour, vu que l'Empereur nous avait invités à un concert. Il a dit à Clément de venir si cela ne l'ennuyait pas trop, et de m'amener avec lui; puis il a ajouté: « Je me réjouis beaucoup de revoir votre femme. » Nous n'avons trouvé que la Cour, ce qui forme déjà un nombre de personnes respectable. L'Empereur m'a dit quelques paroles affectueuses. Le concert n'a pas été particulièrement amusant, mais par bonheur il n'a pas été long. Thalberg, qui a joué du piano d'une manière ravissante, a aidé à faire passer le reste de la soirée, qui a un peu traîné en longueur. L'Archiduchesse Sophie était très-belle; elle aussi a été aimable; elle m'a assuré qu'au moment de mes couches elle avait prié pour moi.

26 décembre.

Clément s'est réveillé avec de fortes douleurs rhumatismales et est resté longtemps couché. Jaeger lui a prescrit un bain.

27 décembre.

Clément souffre encore beaucoup, mais il a pu s'habiller et aller jusqu'à son cabinet.

28 décembre.

Clément continue d'être souffrant; pourtant il s'est levé et a travaillé dans son cabinet. Je l'ai soigné; il est si bon, si affectueux, si reconnaissant des petits services que je puis lui rendre! Nous avons dîné seuls; pendant les premières heures de la soirée, il m'a dicté des dépêches, ce qui m'a fait grand plaisir.

31 décembre.

Ce jour de fête s'est passé tristement pour moi. Clément est tourmenté par son rhumatisme; il a passé toute la journée au lit. Il a été très-souffrant dans la matinée, et il a fallu lui faire des compresses. Je l'ai quitté aussi peu que possible, et j'ai été vraiment heureuse de pouvoir luiêtre utile. J'ai fété l'heure de minuit en appelant la bénédiction céleste sur mes enfants et sur mon mari, qui dormait paisiblement. J'ai remercié Dieu pour les innombrables bienfaits dont il m'a comblée, et je l'ai prié avec ferveur de me conserver ce qu'il m'a donné et d'accorder sa grâce à ma famille, à mon mari et à mes enfants. Ainsi soit-il !

SUR LES ÉVÉNEMENTS POLITIQUES DU JOUR.

EXTRAITS DE LETTRES CONFIDENTIELLES DE METTERNICH A APPONYI, A PARIS, ÉCRITES DU 12 JANVIER AU 24 DÉCEMBRE 1834, EN DEUX PARTIES.

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I.

1147. Le diadème en diamants de la princesse Mélanie. — 1148. La duchesse de Berry est-elle prisonnière en Autriche? – Les royalistes en France. — 1149. Entretien avec Sainte-Aulaire sur l'éventualité possible de l'effondrement de la Porte. 1150. L'horizon politique s'éclaircit. 1151. Expédition contre le Piémont, faite par des réfugiés polonais partis de Suisse.— La Giovane Italia.-1152. L'affaire des Échelles. Justification de l'entrevue des Empereurs à Münchengrætz.- Le comité allemand à Paris. - Boerne et Heine. · Cordon sanitaire moral contre la Suisse. — 1153. La situation

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en Suisse.

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de la France.-1154. Crise ministérielle à Paris. Conduite de Rumigny 1155. Dangers menaçants pour le repos de l'Europe. Scènes Troubles à Lyon et à Paris. Discours de Thiers sur le Congrès allemand. — 1157. Entretien de LouisPhilippe avec le prince Paul Esterhazy. Signification du mot «< répu

à Bruxelles. — 1156. Agitation en Galicie.

blique » en France.

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La quadruple alliance. Point de mesures exécutoires prises par la Confédération contre Francfort. — 1158. Apparition de l'escadre anglaise devant Nauplie.

Metternich à Apponyi. Vienne, le 12 janvier 1834.

1147. Vous connaissez Vienne, et vous savez que les commérages y courent avec facilité. Vous savez également qu'ils ne dépassent guère le seuil de ma porte; je dois cependant vous prémunir contre le plus notable du jour.

Le 1er de l'an, j'ai réuni chez moi à un grand dîner le corps diplomatique. Voici ce qui s'y est passé. Ma femme avait soigné sa toilette comme il convenait à la circonstance. M. le comte de Sainte-Aulaire lui dit : « Quels beaux diamants vous avez, madame! mais ils sont superbes, - mais ce sont les joyaux

de la Couronne ! » Mélanie, un peu impatientée, car plusieurs personnes lui avaient déjà parlé de sa toilette, à laquelle vous savez qu'elle n'attache pas plus de valeur qu'il ne faut, lui répondit : « Mes diamants sont ce qu'ils sont; je les porte comme on me les a donnés ; je ne les ai pas volés. » M. de Sainte-Aulaire a repris : « Ce diadème n'est pas volé, mais il est déplacé. Au lieu d'être sur votre tête, il devrait être à vos pieds!

"

Cette conversation, parfaitement anodine et toute de bonne amitié, car Mélanie aime beaucoup les Sainte-Aulaire, s'est passée au milieu du salon; des groupes d'écouteurs n'étaient pas loin, et dans l'un de ces groupes il doit s'être trouvé un amateur de fagots. C'est depuis deux ou trois jours qu'il doit avoir trouvé moyen de placer sa marchandise, et le bruit d'une scène politique entre l'ambassadeur et la princesse de Metternich s'est fait jour.

Comme nous vivons dans un temps où les commérages de salons deviennent facilement par les gazettes des nouvelles publiques, je vous mande les faits. Si par hasard vous deviez

en entendre parler, veuillez donner connaissance au Roi de la présente lettre. C'est tout ce que je regarde comme utile et de bon procédé. Vous savez ce que je pense des commérages, et je ne doute pas que Sa Majesté leur accorde tout aussi peu

de valeur *.

20 janvier.

1148. Je suppose qu'un article qui a paru dans la feuille des 27 et 28 de la Gazette de France, sous le titre de « Madame », aura fixé votre attention comme elle a dû fixer la nôtre. C'est évidemment une production informe de cette division qui tous les jours s'affirme dans le sein des royalistes de France, c'est-à-dire de cette fraction qui, à mon avis, ne peut être caractérisée mieux que par l'épithète de radicaux blancs.

Peu enclin à se livrer à des soucis par suite d'attaques que les factieux d'une couleur quelconque se plaisent à diriger contre sa personne, l'Empereur n'est sensible qu'à ce qui touche à son honneur. Aussi Sa Majesté, en prenant connaissance du susdit article, m'a-t-elle incontinent ordonné de faire passer la pièce ci-jointe à Madame la duchesse de Berry par l'intermédiaire de M. de Saint-Priest, qui par hasard se trouvait à Vienne. La duchesse n'a pas tardé à faire la réplique également ci-jointe **.

En vous mandant ces faits, notre intention ne se borne pas à vous confirmer dans la connaissance que vous avez de l'attitude morale de notre auguste Maître en ce qui concerne l'asile

* Voir sur le même sujet le journal de la princesse Mélanie, page 557, etc. (Note de l'Editeur.) ** Voici le texte exact et complet du premier de ces documents, tel qu'il se trouve annexé à la lettre ci-dessus :

Déclaration verbale faite par le prince de Metternich

à M. le comte de Saint-Priest, le 5 janvier 1834.

« L'Empereur ayant pris connaissance d'un article dans la feuille de la Gazette de France des 27 et 28 décembre 1833, intitulé « Madame », désire s'assurer d'une manière positive si le contenu de cet article répond aux sentiments de Madame la duchesse de Berry, ou s'il n'y répond pas; c'est-à-dire, si Son Altesse Royale se regarde comme prisonnière dans les États autrichiens, ou comme y jouissant d'un asile réclamé par elle. L'Empereur n'entend pas

« FöregåendeFortsätt »