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la France cèderait, le tout à la condition d'une suspension des opérations militaires.

Les cours alliées, convaincues par vingt années d'expérience que, dans les négociations avec le cabinet français, les apparences doivent être soigneusement séparées des intentions, déclinèrent cette proposition d'armistice; elles offrirent de signer sur-le-champ les préliminaires de la paix. Cette signature avait pour la France tous les avantages d'un armistice, sans entraîner pour les alliés les inconvéniens d'une suspension d'armes.

Quelques succès partiels venaient cependant de marquer les premiers pas d'une armée formée sous les murs de Paris, de la fleur de la génération actuelle, dernière espérance de la nation, et des débris d'un million de braves morts sur le champ de bataille, ou abandonnés sur les grandes routes depuis Lisbonne jusqu'à Moscou, et sacrifiés à des intérêts étrangers à la France.

Aussitôt les conférences de Châtillon changèrent de caractère; le plénipotentiaire français demeura sans instructions, et fut hors d'état de répondre aux propositions des cours alliées. Les vues du gouvernement français paraissant claires aux puissances, elles se décidèrent pour une marche prononcée, la seule qui fût digne d'elles, de leur force, et de la droiture de leurs intentions. Elles chargèrent leurs plénipotentiaires de remettre un projet de traité préliminaire renfermant toutes les bases qu'elles jugeaient nécessaires pour le rétablissement de l'équilibre politique, et qui, peu de jours auparavant, avaient été offertes par le gouvernement français lui-même, dans un moment où il croyait sans doute son existence compromise. Les principes de la reconstruction de l'Europe se trouvaient établis dans ce projet. La France, rendue aux dimensions que des siècles de gloire et de prospérité, sous la domination de ses rois, lui avaient assurées, devait partager avec l'Europe les bienfaits de la liberté, de l'indépendance nationale et de la paix. Il ne dépendait que de son gouvernement de mettre, par un seul mot, un terme aux souffrances de la nation, de lui rendre, avec la paix, ses colonies, son commerce et le libre exercice de son industrie. Voulait-il plus? Les puissances s'étaient offertes à discuter, dans un esprit de conciliation, ses vœux sur des

objets de possession d'une mutuelle convenance qui dépasseraient les limites de la France avant les guerres de la révolution.

Quinze jours se passèrent sans réponse de la part du gouvernement français. Les plénipotentiaires alliés insistèrent sur un terme péremptoire pour l'acceptation ou le refus des conditions de la paix. On laissa au plénipotentiaire français la latitude de présenter un contre-projet qui répondît à l'esprit et à la substance des conditions proposées par les cours alliées. Le terme du 10 mars fut fixé d'un commun accord. Le plénipotentiaire français ne produisit, à l'échéance du terme, que des pièces dont la discussion, loin de rapprocher du but, n'eût fait que prolonger de stériles négociations. Un nouveau terme de peu de jours fut accordé à la demande du plénipotentiaire de France. Le 15 mars enfin ce plénipotentiaire remit un contre-projet qui ne laissa plus de doute que les malheurs de la France n'avaient pas encore changé les vues de son gouvernement. Revenant sur ceux qu'il avait proposés lui-même, le gouvernement français demanda, dans ce nouveau projet, que des peuples étrangers à l'esprit français, des peuples que des siècles de domination ne fondraient pas dans la nation française, devaient continuer à en faire partie. La France devait conserver des dimensions incompatibles avec l'établissement d'un système d'équilibre, et hors de toute proportion avec les autres grands corps politiques en Europe. Elle devait garder les positions et les points offensifs au moyen desquels son gouvernement avait, pour le malheur de l'Europe et de la France, amené la chute de tant de trônes dans les dernières années, et opéré tant de bouleversemens. Des membres de la famille régnante en France devaient être replacés sur des trônes étrangers; le gouvernement français enfin, ce gouvernement qui, depuis tant d'années, n'a pas moins cherché à régner sur l'Europe en semant la discorde que par la force des armes, devait rester l'arbitre des rapports intérieurs et du sort des puissances de l'Europe.

Les cours alliées, en continuant la négociation sous de tels auspices, eussent manqué à tout ce qu'elles se doivent à ellesmêmes ; elles eussent, dès ce moment, renoncé au but glorieux qu'elles se proposent; leurs efforts n'eussent plus tourné que contre leurs peuples. En signant un traité sur les bases du

contre-projet français, les puissances eussent trompé l'attente de leurs peuples et la confiance de leurs alliés.

C'est dans un moment aussi décisif pour le salut du monde, que les souverains alliés renouvellent l'engagement solennel qu'ils ne poseront pas les armes avant d'avoir atteint le grand objet de leur alliance. La France ne peut s'en prendre qu'à ellemême des maux qu'elle souffre. La paix seule pourra fermer les plaies que l'esprit de domination universelle de son gouvernement, sans exemple dans les annales du monde, lui a portées. Cette paix ne sera plus jamais que celle de l'Europe. Il est temps enfin que les princes puissent, sans influence étrangère, veiller au bien-être de leurs peuples; que les nations respectent leur indépendance réciproque; que les institutions sociales soient à l'abri de bouleversemens journaliers, les propriétés assurées et le commerce libre. L'Europe entière ne forme qu'un vœu; ce vœu est l'expression du premier besoin de tous les peuples. Tous sont réunis pour le soutien d'une seule et même cause: cette cause triomphera du seul obstacle qui lui reste à vaincre.

V.

Déclaration des plénipotentiaires au Congrès de Vienne, sur la traite des Nègres.

DÉCLARATION.

Les plénipotentiaires des puissances qui ont signé le traité de Paris du 30 mai 1814, réunis en conférence, ayant pris en considération que le commerce connu sous le nom de traite des nègres d'Afrique a été envisagé par les hommes justes et éclairés de tous les temps comme répugnant aux principes d'humanité et de la morale universelle; que les circonstances particulières auxquelles ce commerce a dù sa naissance, et la difficulté d'en interrompre brusquement le cours, ont pu couvrir jusqu'à un certain point ce qu'il y avait d'odieux dans sa conservation; mais qu'enfin la voix publique s'est élevée dans tous les pays civilisés pour demander qu'il soit supprimé le plus tôt possible; que, depuis que le caractère et les détails de ce commerce ont été mieux connus, et les maux de toute espèce qui l'accompagnent complètement dévoilés, plusieurs des gou

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vernemens européens ont pris en effet la résolution de le faire cesser, et que successivement toutes les puissances possédant des colonies dans les différentes parties du monde ont reconnu, soit par des actes législatifs, soit par des traités et autres engagemens formels, l'obligation et la nécessité de l'abolir; que, par un article séparé du dernier traité de Paris, la GrandeBretagne et la France se sont engagées à réunir leurs efforts au congrès de Vienne pour faire prononcer par toutes les puissances de la chrétienté l'abolition universelle et définitive de la traite des nègres ; que les plénipotentiaires assemblés dans ce congrès ne sauraient mieux honorer leur mission, remplir leur devoir, et manifester les principes qui guident leurs augustes souverains, qu'en travaillant à réaliser cet engagement, et en proclamant au nom de leurs souverains le désir de mettre un terme à un fléau qui a si long-temps désolé l'Afrique, dégradé l'Europe, et affligé l'humanité; lesdits plénipotentiaires sont convenus d'ouvrir leurs délibérations sur les moyens d'accomplir un objet aussi salutaire, par une déclaration solennelle des principes qui les ont dirigés dans ce travail. En conséquence, et dûment autorisés à cet acte d'adhésion unanime de leurs cours respectives au principe énoncé dans ledit article séparé du traité de Paris, ils déclarent à la face de l'Europe que, regardant l'abolition universelle de la traite des nègres comme une mesure particulièrement digne de leur attention, conforme à l'esprit du siècle et aux principes généreux de leurs augustes souverains, ils sont animés du désir sincère de concourir à l'exécution la plus prompte et la plus efficace de cette mesure, par tous les moyens à leur disposition, et d'agir dans l'emploi de ces moyens avec tout le zèle et toute la persévérance qu'ils doivent à une si grande et si belle cause.

Trop instruits, toutefois, des sentimens de leurs souverains, pour ne pas prévoir que, quelque honorable que soit leur but, ils ne le poursuivront pas sans de justes ménagemens pour les intérêts, les habitudes et les préventions même de leurs sujets, lesdits plénipotentiaires reconnaissent en même temps que cette déclaration générale ne saurait préjuger le terme que chaque puissance en particulier pourrait envisager comme le plus convenable pour l'abolition définitive du commerce des nègres. Par conséquent, la détermination de l'époque où ce commerce

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doit universellement cesser sera un objet de négociation entre les puissances; bien entendu que l'on ne négligera aucun moyen propre à en assurer et à en accélérer la marche; et que l'engagement réciproque contracté par la présente déclaration entre les souverains qui y ont pris part, ne sera considéré comme rempli qu'au moment où un succès complet aura couronné leurs efforts réunis. En portant cette déclaration à la connaissance de l'Europe et de toutes les nations civilisées de la terre, lesdits plénipotentiaires se flattent d'engager tous les autres gouvernemens, et notamment ceux qui, en abolissant la traite des nègres, ont manifesté déjà les mêmes sentimens, à les appuyer de leur suffrage dans une cause dont le triomphe final sera un des plus beaux monumens du siècle qui l'a embrassée et qui l'aura glorieusement terminée.

Vienne, le 8 février 1815.

VI.

Déclaration publiée au nom des cours d'Autriche, de Prusse et de Russie, lors de la clôture du Congrès à Laybach, le 12 mai 1821.

DÉCLARATION.

L'Europe connaît les motifs de la résolution prise par les souverains alliés d'étouffer les complots et de faire cesser les troubles qui menaçaient l'existence de cette paix générale dont le rétablissement a coûté tant d'efforts et tant de sacrifices.

Au moment même où leur généreuse détermination s'accomplissait dans le royaume de Naples, une rebellion d'un genre plus odieux encore, s'il était possible, éclata dans le Piémont.

Ni les liens qui depuis tant de siècles unissent la maison régnante de Savoie à son peuple, ni les bienfaits d'une administration éclairée sous un prince sage et sous des lois paternelles, ni la triste perspective des maux auxquels la patrie allait être exposée, n'ont pu contenir les desseins des pervers.

Le plan d'une subversion générale était tracé. Dans cette vaste combinaison contre le repos des nations, les conspirateurs du Piémont avaient leur rôle assigné. Ils se sont hâtés de le remplir.

Le trône et l'état ont été trahis, les sermens violés, l'hon

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