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lie. Le Pô devait former la ligne de démarcation entre les deux états.

Deux mois s'écoulèrent en négociations continuelles avec les alliés, et une correspondance non moins active avec le général en chef de l'armée française d'Italie. Les forces militaires de Naples n'étaient pour aucun des deux partis; ni l'un ni l'autre ne pouvait compter sur elles ou n'avait à les combattre. L'Autriche était la puissance pour laquelle cet état des choses avait le moins de désavantages; elle pouvait diriger ses principales forces contre l'ennemi commun sans s'inquiéter de l'Italie.

Enfin, le 11 janvier 1814, un traité fut signé entre l'Autriche et Naples *. Cependant, sous le prétexte que les ratifications n'étaient pas échangées, l'armée napolitaine resta encore longtemps dans l'inaction. Des preuves écrites, tombées entre les mains des alliés, ne laissèrent plus de doutes que les intelligences secrètes du roi avec l'ennemi ne durassent encore; elles montraient alors principalement le dessein de donner le change à l'empereur des Français sur l'accession effective du roi à l'alliance des puissances. Les victoires remportées dans l'intérieur de la France décidèrent cependant le rôle du roi. Paris était tombé entre les mains des alliés, et l'armée napolitaine commença à entrer en campagne.

La convention du 11 avril 1814 avait mis fin à la guerre contre Napoléon. Les négociations de Paris fixèrent les rapports mutuels de la France et de ses anciens ennemis. Toutes les armées commencèrent leur retraite ; les Napolitains se retirèrent dans les Marches pontificales, sur lesquelles le roi avait des prétentions à faire valoir en vertu de la convention du 11 avril.

Les rapports de toutes les puissances devaient être fixés au congrès de Vienne. Toutes les branches de la maison de Bourbon se prononcèrent contre la reconnaissance du roi Joachim. La situation du dernier avait assurément beaucoup changé par le retour des anciennes dynasties aux trônes de France et d'Espagne. Une politique prudente lui devait prescrire de borner uniquement ses vues ultérieures à la conservation d'un des plus beaux royaumes du monde, en renonçant à toute conquête, surtout quand ces conquêtes ne pouvaient se faire qu'au détri

* V. cet acte, ci-après, TRAITÉS ET CONVENTIONS, II.

ment d'un voisin qui ne pouvait nuire sous les rapports militaires, et qui était de la plus grande importance sous les rapports politiques. Mais la modération et la fidélité sont des mots vides de sens pour les souverains de la nouvelle race française.

Au lieu de penser à sa propre conservation, le roi Joachim forma secrètement de vastes plans pour l'avenir. Il en prépara l'exécution en employant tous les élémens d'une révolution militaire et politique. Auçun de ses projets, aucun de ses mouvemens n'échappa au cabinet autrichien. Ce n'était point là le moyen de faire changer les dispositions des cours qui s'opposaient à l'admission du roi de Naples au rang des souverains de l'Europe.

Lorsque le fardeau des efforts militaires devint insupportable au royaume, le roi se détermina à des démarches plus entreprenantes. Dans le courant de février dernier, il fit connaître au cabinet autrichien son projet d'envoyer une armée en France, à l'effet de quoi il ne demandait rien moins que le passage par la moyenne et la haute Italie. Une proposition aussi étrange fut repoussée comme elle le méritait.

S. M. l'empereur adressa aux gouvernemens de France et de Naples, le 25 et le 26 février 1815, des déclarations par lesquelles ce monarque prononçait la ferme résolution de ne permettre, en aucun cas, que la tranquillité de la haute et de la moyenne Italie fût compromise par le passage de troupes étrangères.

S. M. I. donna en même temps l'ordre de faire marcher dans ses états d'Italie une augmentation considérable de forces militaires pour soutenir sa déclaration. La France y répondit par des assurances formelles que le roi n'avait aucun projet semblable; le roi Joachim ne donna point de contre-déclaration; le moment de dévoiler ses véritables desseins n'était pas encore arrivé.

Le 5 avril, la nouvelle de l'évasion de Bonaparte arriva à Naples. Le roi fit aussitôt appeler le ministre d'Autriche, et lui déclara qu'il resterait fidèle au système d'alliance. Il fit renouveler cette déclaration aux cabinets autrichien et anglais. En même temps il envoya le comte de Beaufremont, son aide-decamp, en France, avec la mission de chercher Bonaparte et de l'assurer de son appui. A peine la nouvelle de l'entrée de Bonaparte était-elle parvenue à Naples, que le roi fit déclarer positive

ment à la cour de Rome « qu'il regardait la cause de Bonaparte comme la sienne, et qu'il lui prouverait maintenant qu'il ne lui avait jamais été étranger.» Il demanda en même temps le passage à travers le territoire de Rome pour deux de ses divisions, qui cependant, loin de se conduire hostilement, ne troubleraient pas le Saint-Père dans sa capitale. Le pape protesta contre cette violation de son territoire; lorsqu'elle eut lieu, S. S. quitta Rome et se rendit à Florence.

Le 8 avril, les plénipotentiaires de Naples à Vienne remirent au cabinet une note qui, en donnant l'assurance des sentimens d'amitié de leur maître et de sa volonté immuable de ne jamais se séparer de l'Autriche, contenait la notification « que S. M. se voyait forcée, d'après le changement de l'état des choses, et pour sa propre sûreté, ainsi que sous le rapport des mesures militaires que toutes les puissances jugeaient nécessaire d'adopter, à donner aussi une position plus étendue à ses forces militaires ; qu'en conséquence cette position aurait lieu en dedans de la ligne de démarcation que l'armistice de l'année 1813 avait fixée à l'armée napolitaine. >

Cependant l'armée napolitaine avait, le 30 mars, commencé sans déclaration les hostilités contre les postes autrichiens dans la Légation.

S. M. I., pénétrée du sentiment de son plein droit, remplie de confiance dans la valeur de son armée et dans la fidélité éprouvée de ses peuples, ainsi que dans ses relations étroites avec toutes les puissances de l'Europe, a, par une note officielle du 10 de ce mois, fait déclarer au gouvernement napolitain, qu'elle regardait les deux états comme étant en guerre, et qu'elle en abandonnait la décision ultérieure à la force des armes.

IV.

Déclaration des puissances alliées à l'entrée de leurs armées sur le territoire neutre de la Suisse; publiée à Lorrach le 21 décembre 1813.

La marche irrésistible d'une guerre sur le caractère et le but de laquelle il ne peut plus exister deux manières de voir parmi tous les contemporains justes et éclairés; la nécessité de conso

lider les heureux résultats qu'on a obtenus jusqu'à ce jour, et le désir d'atteindre, par les moyens les plus prompts et les plus énergiques, le but qu'on s'est proposé, une paix solide et durable, ont conduit sur les frontières de la Suisse les armées des souverains alliés, et les forcent, pour la continuation de leurs opérations, de traverser une partie du territoire suisse. Aux yeux du monde, cette démarche est peut-être suffisamment justifiée par la nécessité qu'impose une entreprise dont la justice est généralement reconnue; cependant une considération d'une si haute importance ne paraîtrait pas suffisante aux puissances alliées, si la Suisse se trouvait dans une situation qui lui permit d'opposer aux progrès de leurs armes une neutralité légitime et véritable; mais la Suisse est si peu dans ce cas, que tous les principes du droit des gens autorisent à regarder comme nul ce qu'aujourd'hui elle appelle sa neutralité.

Les puissances alliées contestent si peu le droit de chaque état indépendant de fixer, à son gré et suivant ses lumières, ses rapports avec les états voisins, que c'est principalement pour le maintien de ce droit qu'elles ont pris les armes. L'état, même le moins considérable, ne doit pas être gêné dans le choix des mesures politiques qu'il a à prendre aussitôt qu'il est capable de se déterminer librement et sans influence étrangère; et si, dans une lutte entre deux voisins plus puissans que lui, il se déclarait neutre, toute violation de son territoire serait une infraction au droit des gens.

Mais il ne peut exister de véritable neutralité pour un état tant qu'il ne jouit pas d'une véritable indépendance. La prétendue neutralité d'un état qui n'est pas accidentellement dirigé, mais qui est régulièrement gouverné par une volonté étrangère, est pour lui-même un mot vide de sens, pour ses voisins une épée à deux tranchans, tandis qu'elle assure à l'état dont il porte les fers un avantage permanent sur ses adversaires, et un moyen immanquable d'exécuter ses desseins. Lorsque par conséquent, dans une guerre dont le but précis et unique est de mettre des bornes à une prépondérance menaçante, cette neutralité fictive sert de rempart à l'injustice, et devient un obstacle pour les projets de ceux qui veulent établir un meilleur ordre de choses, elle doit disparaître en même temps que la source du mal qu'elle protége.

Il est une vérité incontestable, c'est que telle serait la position de la Suisse, d'une part envers la France, de l'autre envers les souverains qui ont pris les armes pour l'indépendance de l'Europe, si la neutralité proclamée par son gouvernement fédératif était maintenue.

L'histoire de ce pays intéressant, qui, sous les rapports géographiques, militaires, politiques et moraux, a, durant tant de siècles, fait un des principaux ornemens de l'Europe en conservant la pureté de ses principes, ne présente depuis quinze ans qu'une suite de violences employées par les dominateurs de la France en révolution pour renverser sa constitution vénérable, saper sa liberté et son bien-être, entraîner ses paisibles habitans dans des guerres intestines, piller ses trésors, fruits d'une sage économie, démembrer de tous côtés son territoire, et fouler aux pieds ses droits les plus sacrés. Après que la Suisse eut souffert tous les maux et tous les opprobres que la cruauté de ses oppresseurs fut capable d'inventer; après qu'elle eut, avec ses provinces occidentales et méridionales, perdu les boulevards de son indépendance contre la France; après qu'elle eut, avec ses lois, ses richesses, ses institutions, le sentiment de sa force, et avec la concorde intérieure, perdu la force nécessaire pour résister, il lui fut enfin, en 1803, imposé, sous le nom vague et difficile à expliquer d'acte de médiation, une forme de gouvernement qui devait, disait-on, mettre un terme à ses souffrances, mais qui, dans le fait, ne fit que mettre le sceau à sa nullité politique la plus complète, et préparer les voies à de plus grands maux, une forme de gouvernement qui, sans les conjonctures heureuses de ce moment, aurait tôt ou tard amené sa ruine totale.

Cette forme de gouvernement était uniquement calculée pour donner de la régularité, de la durée, et une apparence de légitimité à la domination que la France avait jusqu'alors exercée sur la Suisse d'une manière arbitraire, irrégulière et souvent même criminelle. Le succès a répondu à l'attente: au milieu des orages qui depuis dix ans dévastent l'Europe, la Suisse n'a acheté l'ombre de tranquillité dont elle a joui qu'en se soumettant aveuglément à la volonté toute-puissante de la France. Tout ce qu'elle avait pu sauver de forces et de ressources dut être consacré au service de la France. Un signe donné par l'em

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