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IV.

Lettre de Frédéric II, adressée à l'empereur; de Schoenwalde, le 20 avril 1778.

Monsieur mon frère,

Rien ne peut être plus glorieux pour V. M. I. que la résolution qu'elle daigne prendre d'essayer à conjurer l'orage qui se prépare et qui menace tant de peuples innocens. Les succès, sire, que les plus illustres guerriers ont sur leurs ennemis, se partagent entre bien des têtes qui par leur valeur et leur conduite y concourent; mais les bienfaits des souverains envers l'humanité leur sont uniquement attribués, parce qu'ils tiennent à la bonté de leur caractère, comme à l'élévation de leur génie. Il n'est aucune espèce de réputation à laquelle V. M. I. n'ait droit de prétendre, soit que ce soient des traits de valeur, soit que ce soient des actes de modération. Je la crois également capable des uns comme des autres, et V. M. I. peut être persuadée que j'agirai rondement, et me prêterai de bonne foi à tous les moyens de conciliation que l'on pourra proposer, d'une part pour prévenir l'effusion de sang innocent; et de l'autre, sire, par les sentimens d'admiration que j'ai pour votre personne, et dont les profondes impressions ne s'effaceront jamais de mon cœur. Que V. M. I. soit persuadée que si je me suis hasardée à lui ouvrir les sentimens que j'ai pour sa personne, c'est l'expression pure et simple de la vérité. L'on m'accuse d'être plus sincère que flatteur, et je suis incapable de dire ce que je ne pense pas. C'est en attendant ce qu'il plaira à V. M. I. de régler pour l'importante négociation dont il s'agit, que je la prie de me croire avec tous les sentimens de la plus parfaite estime et de la plus haute considération,

monsieur mon frère,

de Votre Majesté impériale,

le bon frère et cousin, FRÉDÉRIC.

V.

Lettre du prince Eugène, vice-roi d'Italie, adressée au Pape, en 1807.

Très-saint père,

A peine de retour à Milan d'un voyage que j'ai été obligé de faire dans les provinces vénitiennes, je m'empresse de répondre à la lettre que V. S. m'a fait l'honneur de m'écrire le 11 mars. J'ose espérer que V. S. me pardonnera de ne pas avoir répondu plus tôt, et je m'estimerais très-heureux si elle daignait m'assurer que mon espérance n'a pas été déçue.

J'ai examiné avec la plus scrupuleuse attention les plaintes de V. S.; elle ne sera dorénavant plus dans le cas de m'en adresser de semblables. J'ai fait donner au général Tisson tous les ordres, et fait faire toutes les défenses que V. S. a désirées.

Mais puisque V. S. m'a fait l'honneur de s'adresser directement à moi pour un objet exclusivement relatif à la ville d'Ancône, il ne lui déplaira pas que je saisisse l'occasion qu'elle m'a fournie de lui écrire, pour l'entretenir, avec candeur et loyauté, d'un objet qui présente un intérêt mille fois plus important et plus général.

Je veux parler de cet état d'abandon où elle semble laisser l'Église d'Italie, par le retard que son cabinet met à l'institution des évêques que S. M. a nommés.

Que V. S. daigne rendre justice aux sentimens qui m'ont inspiré les observations que je vais lui soumettre. Qu'elle daigne se souvenir que ces observations sont confidentielles et n'ont rien d'officiel, et que ce n'est pas à sa politique seule, mais que c'est à son cœur que je les adresse.

Je commence par rappeler les faits. (Suivent les faits.) Je ne dis rien à V. S. pour faire excuser la longueur et l'ingénuité de mes observations. J'ose me persuader que V. S. considèrera cette lettre comme la preuve la moins équivoque de ma profonde vénération pour son caractère sacré, et de mon respectueux attachement pour sa personne.

Je prie V. S. de répandre sur moi sa bénédiction, et je

supplie Dieu, très-saint père, qu'il vous conserve de longues années pour le gouvernement de l'Église.

De Votre Sainteté,

le très-dévoué fils,

le vice-roi d'Italie, prince de Venise,

EUGÈNE-NAPOLÉON.

VI.

Réponse du Saint-Père à la lettre du vice-roi d'Italie;
du 4 juillet 1807.

Dilectissimo in Christo filio nostro Eugenio Napoleoni, Italici regni pro-regi, Mediolanum.

Dilectissimo in Christo fili noster! salutem et apostolicam benedictionem.

C'est une consolation pour notre cœur que de voir, par la réponse de V. A. I. à la lettre que nous lui avons écrite au sujet du général Tisson, l'attachement filial que V. A. I. professe pour nous, et le désir qu'elle exprime que nous en soyons persuadé. Nous n'en avons jamais douté, et nous pouvions attribuer à toute autre cause qu'à un défaut d'intérêt pour nous le retard de cette réponse même ; c'est là ce dont V. A. I. désirait être assurée par nous-même. Nous aussi, avons retardé notre réplique plus que nous n'aurions voulu, non moins à cause de la multiplicité des affaires, que parce que nous avons voulu nous en occuper d'une manière particulière, le contenu de la lettre de V. A. I. nous touchant de trop près pour ne pas exiger de notre part de sérieuses réflexions. Nous allons lui faire connaître nos sentimens avec cette franchise qui est dans notre caractère. Étranger, par la nature de notre institution, à des considérations politiques, nous parlerons à V. A. I. avec confiance le langage franc de la vérité que nous prescrivent les devoirs de notre saint ministère. (Suit un exposé détaillé des faits et des observations qui y ont rapport.) Nous avons tâché de seconder autant qu'il nous a été possible les pieux voeux de V. A. I.; nous la prions d'être persuadée de toute notre bienveillance paternelle, et de la disposition où nous sommes de lui en donner, dans toutes les occasions, les preuves les plus convaincantes.

En attendant, et comme gage de notre affection, nous lui donnons de tout notre cœur la bénédiction apostolique.

PIUS P. P. VII.

Datum die quarta Julii 1807.

VII.

Lettre du Prince-Régent d'Angleterre, adressée au roi de France.
Carlton-House, le 5 août 1814.

Monsieur mon frère et cousin, la longue résidence de V. M. dans ce pays vous a mis en état d'apprécier les sentimens de la nation britannique sur le commerce des esclaves. L'ambassadeur du roi à la cour de V. M. mettra sous les yeux de V. M. les demandes successives et solennelles qui m'ont été adressées par les deux chambres du parlement, et les assurances que je leur ai données de ne pas cesser mes efforts pour délivrer l'Afrique de cette longue suite de souffrances qui sont inséparables d'un commerce si inhumain. Quoique long-temps accoutumé au système du monde, le cœur bienveillant de V. M. rejette, j'en suis sûr, la continuation d'un commerce qui arrête toute perspective de civilisation et d'amélioration dans un grand continent du globe, et je sollicite V. M. d'employer ses puissans efforts pour accélérer le moment de son extinction universelle. La voix et l'exemple de V. M. auront l'influence la plus décisive et la plus heureuse sur le sort de ce peuple malheureux.

Désirant dans toutes les circonstances concerter mes mesures avec V. M. pour la paix commune et le bonheur du genre humain, j'avoue que ce serait pour moi la plus grande satisfaction, si nous étions mis en état d'effacer ensemble cette tache pénible et dégoûtante, non-seulement des usages de nos propres états, mais aussi de ceux de tous les autres états, avec lesquels nous sommes en rapport d'amitié.

En sollicitant de V. M. un favorable accueil pour les représentations que le duc de Wellington est chargé de mettre devant vous sur un sujet si intéressant pour moi et la nation, je suis,

mon bon frère et cousin,
de Votre Majesté,

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Réponse du roi de France à la lettre précédente.

Paris, le 2 septembre 1814.

Monsieur mon frère, le duc de Wellington m'a remis la lettre par laquelle vous m'engagez à joindre mes efforts aux vôtres pour hâter le moment de l'abolition totale de la traite des nègres. J'ai pris aussi connaissance des différentes pièces qui se rapportent au même objet, et qu'il était chargé de me communiquer. Vous rendez justice aux sentimens de mon coeur, en me croyant disposé à adopter toutes les mesures propres à assurer le repos et le bonheur de l'espèce humaine, et en particulier à concourir à l'extinction d'un commerce qui la flétrit; et c'est surtout lorsqu'il s'agit de me concerter avec vous pour atteindre un but aussi salutaire, que vous me trouverez toujours empressé de vous seconder, assuré comme vous l'êtes déjà, que, d'accord avec vous sur le principe, je n'ai dû mettre un délai à l'abolition finale et absolue de la traite des noirs, en ce qui concerne la France, que pour prévenir l'effet de cette mesure comme subite; vous pouvez l'être encore que pendant ce délai même la traite n'aura lieu que sous des restrictions graduelles ; 'que, soit dans nos colonies, soit dans cette partie de la côte d'Afrique où l'on est déjà parvenu à y substituer un commerce d'une autre et meilleure nature, je porterai mes soins à la décourager; et que les moyens dont je m'occupe pour parvenir à la fin que nous nous proposons, vous en offriront sous peu la preuve la plus convaincante. Enfin, regardant comme celui de l'humanité entière l'intérêt que vous et votre nation prenez à l'accomplissement de cette noble entreprise, je me trouverais heureux de pouvoir dans cette occasion vous donner un nouveau témoignage de l'inaltérable amitié et de la parfaite estime avec lesquelles je suis,

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