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droit de conquête ne pouvait donc exister contre eux, parce que ni l'état de guerre, ni le droit de guerre n'existait. En supposant même que les puissances continentales, qui avaient expressément ou tacitement reconnu la réunion de Gênes à la France, pouvaient regarder les Génois comme des sujets français et leur territoire comme une province française conquise sur le gouvernement français, qui était devenu le souverain de Gênes, la position relative de l'Angleterre n'était pas la même. Pour elle la république de Gênes subsistait encore de droit. Gênes devait être regardée par l'Angleterre comme un état ami, opprimé pour un temps par l'ennemi commun, et rétabli dans l'exercice de ses droits souverains aussitôt que cet ennemi avait été chassé de son territoire. Dans un tel cas, suivant les principes du droit des gens, antérieur à toute promesse et indépendamment de la foi donnée, la republique de Gênes, par le fait même de l'expulsion des Français de son sol, était rétablie dans l'exercice de sa souveraineté, qu'aux yeux de l'Angleterre elle n'avait jamais perdue. Ces principes et ces raisonnements n'étaient pas les siens ils les trouvaient dans les ouvrages les plus accrédités sur le droit public, énoncés longtemps avant les événements de notre époque, et néanmoins applicables à l'affaire dont il était question, comme s'ils avaient été inventés pour elle. Vattel, dans les chapitres 13 et 14o de son troisième livre, avait énoncé avec une grande précision et clarté les principes regardant l'application du jus postliminii aux états, principes qu'il avait puisés dans les ouvrages de ses illustres prédécesseurs.

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« Lorsqu'une nation, un peuple, un état, a été subjugué tout entier, on demande si une révolution peut le faire jouir du droit de postliminie? Il faut encore distinguer les cas pour bien répondre à cette question. Si cet état n'a pas encore donné les mains à sa nouvelle sujétion, s'il ne s'est pas rendu volontairement, et s'il a seulement cessé de résister par

impuissance; si son vainqueur n'a pas quitté l'épée du conquérant, pour prendre le sceptre d'un souverain équitable et pacifique, ce peuple n'est pas véritablement soumis, il est seulement vaincu et opprimé; et lorsque les armes d'un allié le délivrent, il retourne sans doute à son premier état. Son allié ne peut devenir son conquérant; c'est un libérateur qu'il est seulement obligé de récompenser. Que si le dernier vainqueur, n'étant point l'allié de l'état dont nous parlons, prétend le retenir sous ses lois comme un prix de sa victoire, il se met à la place du premier conquérant, et devient l'ennemi de l'état opprimé par celui-ci; cet état peut lui résister légitimement, et profiter d'une occasion favorable pour recouvrer sa liberté. S'il avait été opprimé injustement, celui qui l'arrache au joug de l'oppresseur doit le rétablir généreusement dans tous ses droits 1.»

En considérant avec attention ce passage, disait Mackintosh, on verrait que l'auteur a eu l'intention d'appliquer ses principes à deux cas entièrement distincts: celui d'une délivrance de l'état subjugué par un allié, où le devoir de restauration est strict et précis, et celui d'une délivrance par un état non allié, mais ami, où, suivant l'opinion de l'écrivain, le devoir moral du conquérant est au moins de rétablir la nation opprimée; ce devoir étant fondé seulement sur notre humanité commune et sur les relations amicales qui subsistent entre tous les hommes et toutes les sociétés jusqu'à ce qu'elles soient interrompues par une injuste agression. Il paraît trèsdifficile de concilier ce passage du publiciste avec la réunion de Gênes à la Sardaigne. L'orateur disait n'être pas disposé à exagérer l'autorité de ces écrivains, ou à substituer en aucun cas l'autorité seule aux principes de la raison. Mais à son avis ces publicistes éminents étaient au moins impartiaux dans leurs jugements. Ils déposaient comme témoins des

1 VATTEL, Droit des gens, lib. 3, chap. 13–14.

sentiments et des usages généraux des nations civilisées; et le poids de leurs témoignages recevait une nouvelle augmentation, chaque fois que leur autorité était invoquée par les hommes d'état, et chaque année que l'usage constaté par leurs ouvrages n'était pas interrompu par l'aveu de principes contraires. De cette manière, ces ouvrages furent confirmés par des générations successives, comme monuments consacrant les usages des siècles les plus civilisés et comme dépositaires des jugements délibérés et permanents de la partie la plus éclairée de la race humaine. Ajoutez que leurs témoignages sont ordinairement invoqués par les faibles, et méprisés seulement par ceux qui sont assez forts pour ne pas avoir recours aux sentiments moraux et pour fouler aux pieds les principes de la justice. Les décisions des publicistes n'étaient jamais repoussées que par ceux dont la politique inique était condamnée d'avance par leur digne impartialité 1.

$ 16.

Réunion

à la Suède.

La révolution suédoise de 1809 et l'abdication de Gustave III furent suivies de la paix de Frédériksham, par laquelle la de la Norvége province de Finlande et les îles d'Aland furent cédées à la Russie. Par le traité de Pétersbourg de 1812, entre la Russie et la Suède, la première puissance s'engagea à assurer à la Suède la possession du royaume de Norvége comme indemnité pour la perte de la Finlande et comme prix de l'alliance contre la France. Le Danemark céda la Norvége à la Suède par la paix de Kiel, 1814, et reçut en indemnité la Pomeranie suédoise et l'île de Rugen, qu'il échangea depuis avec la Prusse pour le duché de Lauenbourg. Les deux royaumes scandinaves furent ainsi réunis sous le même sceptre, et la Russie compléta son arrondissement sur les bords de la Baltique, commencé par la paix de Nystadt en 1721.

L'union de la Belgique et du grand-duché de Luxembourg aux anciennes Provinces - Unies de la Hollande, sous la mo

1 HANSARD, Parliamentary debates, vol. XXX, pp. 894–935.

$ 17. Réunion

à la Hollande.

narchie du roi des Pays-Bas, compléta le nouveau système de de la Belgique barrières que le congrès de Vienne avait érigé pour la sécurité de son propre ouvrage. Cet arrangement fut renversé par suite des révolutions française et belge de 1830, et les conditions de la séparation de la Belgique de la Hollande, étant consacrées par le traité du 19 avril 1839, entre ces deux états et entre eux et les cinq grandes puissances, sont devenues partie du droit public de l'Europe.

$ 18. Constitution

confédération

suisse.

La confédération suisse avait senti, en commun avec tous de la les pays limitrophes de la France, le contre-coup de la grande révolution française de 1789. Le nombre des treize anciens cantons fut porté à dix-neuf, par suite de la séparation des districts dépendants des anciens cantons, comme sujets ou alliés, tels que Vaud, Saint-Gall, Argovie, les Grisons et Thurgovie. Les dissensions intérieures de la Suisse furent apaisées sous les auspices de Bonaparte, premier consul de la république française, par l'acte de médiation de 1803, qui reconnaissait l'indépendance des nouveaux cantons. Ces dissensions recommencèrent lors de la chute de l'empire français et de l'envahissement de la Suisse par les alliés en 1813. Un nouveau pacte fédéral fut alors formé, sous leur médiation, auquel tous les cantons accédèrent en 1815. Le nombre des cantons fut porté à vingt-deux par l'addition du Valais, Genève, et Neuchâtel, et l'intégrité, l'indépendance et la neutralité de la confédération suisse furent reconnues par l'acte final du congrès de Vienne, en se référant à la déclaration des puissances alliées qui ont signé le traité de Paris en date du 20 mars 1815 1.

La confédération suisse, comme elle a été organisée par le pacte fédéral, consiste dans une union entre les vingt-deux cantons souverains de la Suisse. Le but de cette union est déclaré être la conservation de leur liberté et de leur indé

1 MARTENS, Nouveau recueil, vol. VIII, p. 173. KLÜBER, Acten des Wiener Congresses, Bd. 7, S. 340.

pendance, de leur sûreté contre toute attaque de la part des puissances étrangères, ainsi que le maintien de l'ordre et de la tranquillité publiques à l'intérieur. Ils se garantissent réciproquement leurs constitutions et territoires. La confédération a une armée et un trésor communs, entretenus par des levées d'hommes et des contributions d'argent dans de certaines proportions fixes entre les divers cantons. Pour subvenir aux dépenses militaires, on a établi une caisse de guerre fédérale, formée par des droits d'entrée sur les marchandises, perçus par les cantons frontières et versés dans le trésor commun. La diète est composée d'un député de chaque canton, dont chacun ayant une seule voix. Elle s'assemble tous les ans alternativement à Berne, Zurich, et Lucerne, qu'on appelle les cantons dirigeants, Vorort. La diète a le pouvoir exclusif de déclarer la guerre, et de faire des traités de paix, de commerce et d'alliance avec les puissances étrangères. Cependant pour ses négociations les trois quarts des voix des cantons sont nécessaires; dans toutes les autres affaires qui sont soumises à la diète, la majorité absolue en décide. Les capitulations militaires, ou traités sur des objets économiques et de police, peuvent être conclus avec les puissances étrangères par chaque canton individuellement : mais ils ne peuvent être contraires ni au pacte fédéral, ni aux alliances existantes, ni aux droits constitutionnels des autres cantons. C'est la diète qui prend toutes les mesures nécessaires pour la sûreté extérieure et intérieure de la confédération. Elle fixe l'organisation du contingent des troupes, ordonne leur mise sur pied, détermine leur emploi, nomme le général, l'étatmajor et les colonels de la confédération. La direction des affaires, quand la diète n'est pas en session, est remise à un chef-lieu, Vorort, muni des pouvoirs exercés jusqu'en 1798. Le chef-lieu alterne tous les deux ans entre les cantons de Zurich, Berne et Lucerne. Dans des circonstances extraordinaires, et si elle ne peut pas rester en permanence, la diète

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