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deux mois de chemin. A l'occident, treize peuples, également très-nombreux, habitent les bords de la « mer de Constantinople et le pays au nord jusqu'à la « mer d'Youzag. Ces derniers demeurent dans des villes «< sans murailles, et occupent tout le désert jusqu'aux limites des Higriens (?). Leur pays s'étend l'espace de quatre mois de chemin, et leur nombre égale celui des sables de la mer; ils sont tous mes tributaires. J'accorde aux Russes le passage, pour qu'ils entrent dans leur territoire; ils leur font des guerres terribles, et si je le leur permettais, ils dévasteraient « tout le pays des Ismaélites jusqu'à Bagdad. »>

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Nous trouvons, dans cette lettre, des notions qui s'accordent avec les récits des historiens grecs et des géographes arabes. En disant que la nation qui habitait, avant les Khazares, le pays arrosé par le Volga, et qui fut chassée de son territoire par ces peuples, alla s'établir sur les bords du Danube, le roi Joseph indique assez clairement les Boulgares, dont une partie, selon les historiens de la Byzantine, émigra des bords du Volga, et l'autre, avec son prince Batbaya, fut obligée de se soumettre aux Khazares qui arrivaient de la Berzylie.

Ce que le roi Joseph dit du passage que les Russes obtenaient du roi des Khazares, pour aller faire la guerre à d'autres nations, confirmerait, s'il en était besoin, les relations arabes des deux expéditions russes dans la mer Caspienne; et le peu de détails que le roi khazare donne sur sa capitale, est conforme aux descriptions de Mass'oudi et d'Ebn Haoucal.

Ces deux lettres furent publiées en hébreu, sous le titre de Caoul-Moubesser, ou d'Annonce joyeuse, par Isaac, fils d'Abraham, fils de Jehoudah A'crisch. L'éditeur nous apprend que, dans un voyage qu'il fit, en 1562, de Constantinople en Égypte, il lui tomba entre les mains une lettre adressée par Raf Khasdaï au roi des Cozares, ainsi que la réponse de ce prince, et qu'il avait jugé utile de les rendre publiques, pour faire connaître que les Juifs, depuis leur dispersion, avaient possédé un royaume sur la terre. Le texte de ces deux lettres fut inséré, avec une traduction latine, par le savant Jean Buxtorf, dans sa préface du Liber Cosri (ou Livre du Khazare), qu'il fit imprimer à Bâle en 1660.

Ce dernier ouvrage, traduit de l'hébreu par Buxtorf, contient l'exposition des dogmes du judaïsme, selon les principes des rabbins, dans des dialogues supposés entre un roi khazare païen, qui, connaissant les ténèbres où il est plongé, cherche à découvrir quelle est la meilleure des religions, et un savant rabbin qui s'efforce de lui démontrer que sa croyance est la seule véritable. Averti en songe que Dieu agréait ses vertus, mais désapprouvait les pratiques de son culte, ce prince, doué d'une ame pieuse, après avoir longtemps médité sur le meilleur mode d'adorer l'Éternel, se décide à consulter un philosophe (païen), et l'interroge sur sa croyance. Peu satisfait de ses réponses, il fait venir un chrétien, puis un mahométan; mais ni l'un ni l'autre ne peuvent le convaincre; il s'adresse enfin à un docteur juif: les premières paroles du

rabbin lui inspirant de la confiance, il écoute avec attention le développement de sa doctrine, et, entraîné par la force de ses arguments, il embrasse la foi israélite, qu'il fait également adopter à son peuple.

On voit que c'est une fiction dont un docteur rabbinite a fait usage, pour exposer, sous la forme de dialogues, les articles de sa croyance, et combattre les opinions des philosophes, ainsi que les principes des Juifs caraïtes. Jehudah Hallevi, ou le Lévite, Juif espagnol du douzième siècle, qui écrivit, en langue arabe, cet ouvrage très-estimé des Juifs de sa secte, nous apprend que le rabbin qu'il met en scène conversant avec le roi khazare vivait quatre siècles avant lui, et, selon des savants israélites plus modernes, cet interlocuteur était Rabbi Isaac Sangari.

Le livre de Cosri, divisé en cinq parties, fut traduit de l'arabe en hébreu par Rabbi Jehudah-Aben-Tysbon, et de cette dernière langue en latin par Johan Buxtorf; mais cet érudit hébraïsant ne veut pas croire à l'existence du royaume juif, dont il n'est fait mention, ditil, nulle autre part. J. P. Baratier, qui, à l'âge de onze ans, traduisit la Relation des Voyages de Benjamin de Tudèle, et y joignit huit dissertations pleines de recherches, dont la septième contient une version française des deux lettres mentionnées, par lui faite de l'hébreu ; ce jeune savant, qui, selon le témoignage de son père, parlait couramment le latin à l'âge de

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1 Voyage de Rabbi Benjamin de Tudèle, in-12, tom., II, pag. 285 et suiv.

quatre ans et demi, qui, à six ans, lisait le grec et apprenait déja l'hébreu, traite aussi de fable tout ce que contient la lettre du roi Joseph. Selon lui, c'est une fiction de Khasdaï, qui voulut donner de la considération à ses co-religionnaires, en publiant qu'il existait un royaume juif. Basnage n'y croit pas non plus. Il dit, après avoir fait mention des mêmes lettres : « Mais il y a ceci de fâcheux, qu'on a beau chercher « ce royaume, on a beau en avoir la description faite « par le roi Joseph, on ne le trouve point. Benjamin « de Tudèle, qui voyagea partout, au douzième siècle, " pour chercher les restes de sa nation, ne découvrit pas ce royaume si fameux. Tous ceux qui sont venus depuis n'ont pu le déterrer. Cela seul suffit pour « faire voir qu'il est chimérique, et que c'est une imagination, que l'envie d'avoir un royaume gouverné << par des Juifs a fait naître. » Il fallait le témoignage des géographes arabes pour constater un fait qui paraît si peu vraisemblable. On pourrait citer, comme une preuve ultérieure de sa réalité, que les Lesghes et plusieurs autres peuplades du Caucase appellent encore aujourd'hui les Juifs du nom de Ghyssr, qui est leur manière de prononcer celui de Khazare2.

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1 Hist. des Juifs, 1707, in-12, tom. V, liv. vII, pag. 1446.

2 Reineggs, Reise in den Caucasus, pag. 64.

ch. 1,

NOTE XXVIII. (Pag. 81.)

Il y avait, au dixième siècle, deux royaumes boulgares, l'un sur le Volga, l'autre sur le Danube. Le premier est appelé Boulgarie noire par Constantin Porphyrogénète, et Grande-Boulgarie, par Théophanes.

Voici comment cet historien rapporte la dispersion des peuples Boulgares: Sous le règne de Constantin (642-668), Crobat, souverain de la Grande-Boulgarie, pays situé près des Palus-Méotides et arrosé par le fleuve Cuphis', chef aussi de la nation appelée Catragore, qui appartient à la même race (que les Boulgares), laissa cinq fils l'aîné, Batbaïan, demeura dans sa patrie; le second, Cotragus, ou (Cathargus), passa le Don, et se fixa vis-à-vis de son aîné; le troisième, nommé Asparuch, s'établit entre le Dniester et l'Onglon. Le quatrième et le cinquième émigrèrent jusqu'au-delà du Danube ; le quatrième passa même avec toutes ses troupes dans la Pannonie, et se soumit au khacan des Avares, qui régnait sur cette contrée 3.

Nous avons vu que, selon Ebn Haoucal, la ville de Boulgar, sur le Volga, fut saccagée par les Russes

1 De adm. Imp., cap. XII.

2 Ce fleuve, suivant Théophanes, se jetait dans le PontEuxin, vers son extrémité (orientale), près de Nécropyles et d'un promontoire appelé la Face du Bélier.

3 Ap. Stritter., tom. II, pag. 504.

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