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aux Finois, ainsi qu'à leurs voisins, les Slaves établis sur les bords du lac Ladoga. Ces Slaves Novgorodiens ne tardèrent cependant pas à chasser les Varègues de leur territoire; mais, se voyant en proie aux discordes civiles, ils se décidèrent à les rappeler. «Ils envoyèrent, << dit Nestor, de l'autre côté de la mer, chez les VarèguesRusses; car ces Varègues s'appelaient Russes, comme « d'autres se nommaient Suédois, Normands, Anglais «<et Goths. Leurs députés dirent aux Russes, de la « part des Tchoudes, des Slaves, des Krivitsches : Notre pays est vaste et fertile; mais il y manque le « bon ordre; venez nous gouverner. On choisit trois « frères qui vinrent avec leurs familles et une suite nombreuse : l'aîné, Rurik, s'établit à Nowgorod; « le second, Sinéus, à Biélozéro ; le troisième, Truwor, « à Isborsk. De ces Varègues le pays fut appelé Russie. « Les habitants actuels de Nowgorod sont d'origine Varègue; auparavant, ils étaient Slaves. »

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Ce fut en 862 que les trois frères Varègues-Russes arrivèrent sur les bords du lac Ladoga, et reçurent les soumissions des peuples tchoudes et slaves de cette contrée. Ils étendirent promptement leur domination à l'orient et au midi; le nom national de ces étrangers devint commun aux peuples réunis sous leur empire, et le nouvel état, fondé par Rurik, agrandi par ses successeurs, fut appelé Rossie, véritable prononciation de ce nom, qui est même indiquée par les historiens du Bas-Empire, et par l'Arabe Yacout, dans son dictionnaire géographique.

On serait plus étonné de ne trouver dans les an

ciennes chroniques de la Scandinavie aucune mention de ces Varègues, qui avaient fondé un grand empire, s'il n'était constaté que les plus anciens de ces monuments sont de plusieurs siècles postérieurs à l'époque en question. Un pareil laps de temps, sans le secours de l'écriture, avait bien pu effacer, chez les Scandinaves, le souvenir d'événements qui s'étaient passés dans des pays lointains, quoiqu'ils fussent glorieux pour les Varègues; mais, existait-il alors, dans la Scandinavie, un peuple appelé Rosse? Nous n'en connaissons point d'autres qui aient pu porter ce nom que les habitants du Roslagen, province située au nord de Stockholm, sur la partie de la côte la plus rapprochée de la Finlande, avec laquelle elle communique par les îles d'Aland. Il est donc probable que ce fut du Roslagen que se firent les premières communications entre la Suède et la Finlande; ce qui explique pourquoi les Finois donnent aux Suédois le nom de Ruotsilaïni, et à la Suède le nom de Ruotsima ; les terminaisons laini et ma signifiant, en finois, peuple et pays.

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On trouve cependant un témoignage de l'existence, au neuvième siècle, d'un peuple scandinave nommé Rossé, et il a été fréquemment cité par les auteurs modernes qui ont fait des recherches sur l'origine des fondateurs de l'empire russe. Les Annales Rerum Francorum, depuis la mort de Charles Martel jusqu'à l'année 882, dont l'antique manuscrit fut trouvé dans le couvent de Saint-Bertin, rapportent que l'empereur Louis-le-Pieux reçut, en 839, à Ingelheim, des am

bassadeurs de l'empereur romain Théophile, avec des lettres où ce monarque lui exprimait le désir de resserrer les liens d'amitié qui subsistaient entre les deux empires, et lui faisait part des victoires qu'il venait de remporter sur ses ennemis. Il lui recommandait en même temps plusieurs individus qu'il avait fait partir avec ses ambassadeurs et qui, se disant Rosses de nation, assuraient avoir été envoyés par leur roi, nommé Chacan, pour porter à Théophile des paroles d'amitié. Cet empereur priait Louis-le-Pieux de faciliter leur retour dans leur patrie, par les pays de sa domination, afin qu'ils pussent éviter les territoires des nations barbares et féroces qu'ils avaient traversés avec beaucoup de dangers, en se rendant à Constantinople. Louis ayant pris des informations sur ces individus et appris qu'ils étaient Suédois, soupçonna qu'ils avaient été envoyés pour examiner secrètement ce qui se passait dans les états des deux empereurs, et donna l'ordre de les détenir jusqu'à ce qu'on pût connaître le vrai but de leur voyage. Il manda à Théophile qu'il avait accueilli ces étrangers à sa recommandation, et que s'il était constaté qu'ils fussent venus dans de bonnes intentions, il leur fournirait les moyens de retourner dans leur patrie, à moins que la route ne fût trop périlleuse, et que, dans ce cas, il les ferait reconduire à la cour de Théophile'.

Il a été observé avec raison que le nom de Chacan

1 Annales Francorum Bertiniani, ap. Duchêne, tom. III, pag. 195.

ne doit être pris ici que pour le nom propre scandinave de Hakan. A l'époque en question, la Suède était divisée en petits états; il est probable que l'un d'eux s'appelait Rosse, quoique nous ne puissions maintenant trouver ce nom que dans celui de Roslagen. Mais, n'existerait-il pas encore d'autres indices de l'origine scandinave des fondateurs de l'empire russe ? Il est reconnu, qu'au défaut de témoignages historiques, c'est à sa langue qu'on peut, le plus sûrement, distinguer à quelle race d'hommes un peuple appartenait. Or, les noms des officiers et des seigneurs varégues qui nous ont été conservés par les Annales russes sont les mêmes que ceux qui étaient usités parmi les Scandinaves, comme, par exemple, Rurik, Trouvor, et les noms de la plupart des députés d'Oleg et d'Igor qui signèrent les traités de paix conclus entre ces souverains russes et les empereurs de Byzance, dans les années 906, 911 et 945. Ces traités commencent ainsi : Nous, Rosses de naissance, Karl, Inegeld, Farlaff, Weremund, Roulaw, Goudi, Roald, Lidoulfast, Stemid, etc. « Parmi les cinquante noms «< des députés et marchands russes qui signèrent le « traité de 945, il n'y en a, dit M. Karamsin', que << deux ou trois de slaves; tous les autres sont • normands.

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Nous pouvons d'ailleurs reconnaître la langue des Varègues-Rosses par quelques mots que Constantin Porphyrogénète nous en a conservés. Cet empereur a

1 Ist. Gossoud. Ross., t. I, p. 150.

consigné, dans le neuvième chapitre de son précieux Traité de l'Administration de l'Empire, les noms des principales cataractes du Dniéper, en langue slave et en langue russe.

<«< La première, dit-il, est appelée dans ces deux langues Essoupi, qui signifie ne pas dormir. » En suédois, on dirait, aujourd'hui, ej sofva.

La seconde était appelée par les Rosses Oulvorssi, c'est-à-dire, île de la Cataracte. Holmfors, en suédois, signifie Cataracte de l'île.

La troisième, dit Constantin, se nomme, en slave, Guélandri, c'est-à-dire, son de la Cataracte, et il omet ici le nom rosse; mais il s'est probablement mépris, en rapportant le nom rosse au lieu du nom slave; car Gællande, participe de galla, signifie résonnant en suédois, et Lehrberg nous apprend qu'aujourd'hui la même cataracte est appelée, en slavon, Svonezkoï, mot formé de Svon, qui signifie Son '.

La quatrième était appelée par les Rosses Eifar, parce que les pélicans faisaient leurs nids dans les rochers de cette cataracte. Le même mot, écrit Ooijevaar, et prononcé Ouyefar, signifie en hollandais, cigogne. On voit que les Varègues, ne trouvant pas, dans leur idiome, le nom du pélican, y ont substitué celui d'un autre oiseau aquatique.

La cinquième cataracte était appelée Barouforos par

1 Beschreibung des untern Dniepers und seiner Wasserfälle, p. 359.

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